Interview : Minor Victories

Rencontre avec Justin Lockey et Rachel Goswell, les deux têtes pensantes de Minor Victories dont le merveilleux premier album éponyme vient de sortir.

 

 

Comme tout super-groupe débarquant sur la scène musicale, on se demande ce qui vous a poussé à monter Minor Victories ?

Justin Lockey : L’idée est venu de moi et Rachel. Il faut remonter à septembre 2014. Avec Rob, qui est aussi le manager d’Editors, on a eu une conversation à propos de Rachel que j’appréciais beaucoup. Il me disait qu’elle était probablement seule et libre à ce moment.

Rachel Goswell : Et on a sorti plusieurs morceaux de la première session que nous avions faite.

J.L : Et puis le temps passant, les choses ont pris une autre tournure. Avec Editors, nous avons enregistré un nouvel album, sur lequel Rachel a participé. On l’a terminé, et Rachel bouclait une tournée avec Slowdive. On s’est dit alors qu’on devait peut-être terminé ce qu’on avait commencé. Et on a pris James [Lockey, son frère, NDLR] et Stuart.

R.G : Stuart Braithwaite que j’avais rencontré en 2013, sur un été où on faisait beaucoup de festivals ensemble. On avait pas mal sympathisé après concerts. Et nous avions besoin d’un guitariste, le nom de Stuart est le premier qui m’est venue à l’esprit.

J.L : Elle m’a dit au téléphone, ‘j’ai Stuart’. Et moi je lui ai répondu : ‘Et moi j’ai mon frère’. On va faire un groupe.

 

Est-ce que Minor Victories est le fruit d’une frustration, ou plutôt le désir de vivre quelque chose de nouveau ?

J.L : Assurément une frustrations (rires). Chaque membre voyait les choses différemment dans leurs groupes respectifs. Personnellement, j’adore le travail d’élaboration, on apprend beaucoup des gens. J’avais besoin de rencontrer de nouvelles personnes. Au bout d’un moment, tu t’ennuies. On tourne beaucoup, on est ensemble, mais on ne rencontre pas de gens, on les voit passer, comme en festivals. Tu n’as pas le temps pour autre chose. Je pense qu’entre deux albums, c’est bien de sauter sur autre chose. Et je ne pourrais pas faire autre chose que de bosser, je suis obligé.

R.G : Un peu comme un alcoolique.

J.L : Ca a été finalement assez naturel. Du genre, ‘allez, on le fait cet album’

 

 

Pourquoi avoir choisi ce nom ? En quoi des victoires pourraient-elles être mineures ?

J.L : Je vais te dire pourquoi on a choisi ce nom. Ca vient d’une très bon amie, qui s’appelle Hazel Wilde et joue dans un groupe nommé Lanterns On The Lake. Son partenaire, Paul Gregory, qui joue dans ce groupe et a aussi mixé notre album. L’histoire remonte à leur premier EP. Nous cherchions un nom au groupe – et je t’avoue que chercher un nom est le pire truc au monde.

R.G : Plusieurs noms avaient été suggérés, mais aucun ne fonctionnait.

J.L : Et je me suis souvenu d’Hazel, de leur premier EP, qui s’appelait Misfortunes & Minor Victories. Je le trouvais génial, et ça faisait le titre d’un EP méconnu. Du gâchis (rires). Et un jour, j’ai envoyé un texto à Hazel, en lui disant : ‘Je te préviens, je vais utiliser une partie du titre de ton EP’ parce que ça sonnait vraiment bien. Et elle m’a répondu : ‘Ouais si je peux jouer du tambourin quelque part sur ton album’. Finalement, Paul l’a mixé et il n’y avait pas de tambourin. Mais l’histoire vient de là.

Comment opériez-vous dans le groupe, qui écrivait, composait, arrangeait ?

J.L : Tout le monde faisait un peu de tout. J’ai fait beaucoup de production de chez moi. Imaginez une étoile noire, avec quelques satellites autour. Et bien tous ces satellites envoyaient leurs trucs dans ma réserve, où je récupérais tout, le faisais coller, et le renvoyais. Et c’était du genre, ‘ouais j’aime ça’, ‘ça moins’, ‘essayons cela’. Ca ressemble un bordel comme ça.

 

Votre son sonne à la fois épique et sombre, un peu à l’image des clips que vous avez sorti d’ailleurs. Y’a-t-il une storyline derrière ?

R.G : Musicalement, je dirais que c’est 20 mois de notre vie résumés.

J.L : Au niveau des paroles, ce qui est le domaine de Rachel, tout vient du cerveau chelou de Goswell. Musicalement, je crois que ça a pris assez facilement, on était d’accord sur les textures. Je viens d’ailleurs de réaliser que je ne jouais pas du tout de guitare sur cet album. L’histoire, ce sont les différentes sonorités de types venus de divers groupes, des éléments, sans qu’il n’y en ait un qui prédomine sur le reste. Quant aux paroles, de ce que j’ai compris, c’est effectivement sombre (rires).

R.G : Non, pas tout !

J.L : Je crois sincèrement que les paroles ont plus de poids que la musique pour le coup.

R.G : La musique aussi est sombre.

J.L : Non, attends, tes textes foutent la trouille.

R.G : Ce qu’il faut noter, c’est que sur l’ensemble de l’album, la musique est d’abord venue, puis les textes. Le seul morceau où on a fait l’inverse, c’est Breaking My Light, que j’avais imaginé et écrit sur un piano assez creepy. J’ai écrit le premier couple et le refrain, je lui ai envoyé, et lui a posé un chef-d’œuvre de piano dessus. Et je n’avais plus qu’à écrire le reste. Certaines étaient plus longues à écrire que d’autres, ça a dû prendre quatre mois en tout. Après, narrativement, les gens peuvent les interpréter comme ils l’entendent, sans que j’ai à leur dire de quelle histoire spécifique c’est tiré.

J.L : Mais c’est sombre de toute façon.

R.G : Higher Hopes dégage quelque chose d’heureux, d’optimiste. Contrairement aux premiers titres. On voulait quelque chose de gros et de puissant pour démarrer, et finir sur des notes plus légères.

 

 

Vous dites que la première chanson est un gros démarrage. Ce qui m’a surtout étonné à l’écoute de ce titre, c’est pas tant la puissance qui s’en dégage, mais la précision des sons, le côté méticuleux. Etait-ce compliqué à orchestrer ?

J.L : Non. Tout allait bien ensemble, parce que chaque partie sonnait bien, ce que les autres ont fait était nickel. Y’avait pas de truc de merde à retirer (rires). Non sérieusement, il n’y a pas d’hésitations bizarres, ça matchait.

R.G : C’était quelque chose de facile et naturel. Il n’y avait pas de sons bizarres, et Dieu sait qu’avec l’électronique, ça pourrait. C’était un album facile à concevoir. On a été beaucoup en contact ensemble, quasiment tous les jours durant les six derniers mois. On a beaucoup ri.

J.L : Il n’y avait pas d’égo en plus. Pas de clashs. Ce qui est plutôt rare.

 

Vous avez deux très beaux invités sur ce premier album. Mark Kozelek de Sun Kil Moon, et James Graham de The Twilight Sad. Pourquoi ces deux-là ?

J.L : Mark parce que Rachel le connaissait depuis très longtemps.

R.G : 20 ans en effet.

J.L : Au milieu du processus, on s’est demandé si on invitait d’autres personnes. Quitte à un faire un super-groupe, autant qu’on fasse un gros truc, avec des tonnes de gens dedans. Mais c’était trop compliqué.

R.G : On avait quelques personnes à l’esprit cela dit. Mark était la personne la plus intéressante de toutes.

J.L : Quant à James Graham, c’était une évidence aussi. Elle nous vient de Stuart, qui le connaissait bien, d’autant qu’ils viennent du même coin d’Ecosse. Il a quelque chose de très mélancolique dans la voix qui faisait la différence.

 

No Comments

Post A Comment