Slowdive – Slowdive

Et le shoegaze naquit de nouveau de ses cendres. Slowdive revient des abysses, un éponyme sous les bras. Ecoute et critique. 

Bienvenue sur une bobine de Gregg Araki. La bande-originale parfaite pour vos soirées cigarettes et cafés plus ou moins froids, baignées d’étoiles, de nuages ou bien d’une rosée délicate. Qu’importe, vous détenez ici un album qui vous apporte son propre climat. Au delà des sonorités des Cure, d’Explosions In The Sky, de Loveless ou des plus juvéniles DIIV, les fusions du shoegaze avec le lyrisme musical des années 90 semblait encore manquer cruellement à l’échiquier. Face à nous, on observe un tournant majeur. Comme un saut imprévisible dans le passé pour mieux nous projeter dans un futur – on l’espère- meilleur. Formé en 1989, Slowdive détenait déjà les clés du genre. Depuis, malgré la rouille et la multiplication des serrures, on reconnaîtrait cette porte parmi tant d’autres. Ouvrez, laissez vous éblouir. Lentement…

Cinq paires de mains autour d’un disque ancré dans différentes temporalités. Celle du passé tout d’abord, puisqu’il est difficile de ne pas penser au règne des Smiths, ou l’instauration de l’art de vivre en musique. Un temps où chacun se laissait vivre au rythme d’albums précurseurs, où chaque vie possédait sa bande-son. En soit, voici l’aspect cinématographique de la musique. Avec le Velvet Undergound et notamment Ride, la scène grunge se déploya en une fleur capable de produire un nectar ultra-prolifique. Le shoegaze, plus aérien et davantage ancré dans un « déstructurisme » totalement assumé, vint lui aussi titiller les tympans les plus curieux. Depuis, il a survécu, ou du moins s’est transformé, s’est multiplié. Pour mieux se rassembler ? Se ressembler en tout cas. Cet album éponyme que nous apporte sagement Slowdive après la sortie de Pygmalion en 1995 (qui n’a d’ailleurs pas pris une ride), reste une des meilleures choses qui soient arrivées cette année. La tête dans le guidon et allant droit vers l’avenir, la bande de la belle Rachel Goswell étonne autant qu’elle émerveille. But ultime d’un disque, celui de détenir son propre univers. En soit, il est naturel pour Slowdive de proposer son paysage mental, comme un compte-rendu sincère de ses dernières années d’errances, de séparations et de doutes.

Ainsi, de son ouverture Slomo au majestueux final Falling Ashes, cet éponyme se signe comme un nouveau départ, ancré malgré tout dans un son maîtrisé, magné avec dextérité. En huit morceaux, le groupe arpente ses teintes fétiches ; le grise, bleu et le sépia. En s’éloignant de la facilité, Slowdive assemble ses morceaux comme une histoire cohérente, oeuvre à la mélancolie. Heureusement, cette émotion est ici largement apprivoisée. Elle est, par certains moments, galvanisée par le désespoir (Star Roving, Don’t Know Why). Quelques minutes plus tard, elle demeurera apaisée, ne perdant toutefois jamais de sa superbe (Sugar For The Pill, Everyone KnowsFalling Ashes).

La production ne lésine pas en gigantisme. Slowdive a toujours su trouver le juste milieux entre la ballade et l’éloge du rock. Parfois saturé au maximum, le son des guitares englobent une batterie excellemment bien masterisée. Survient alors l’écho recherché, comme si chaque morceau s’étirait sans jamais se perdre dans une quelconque longueur. On plonge doucement, mais sûrement vers une sensation nouvelle, moins éparpillée (No Longer Making Time), où la structure est d’autant plus claire qu’elle nous renverse (une fois de plus). Loin des slows et de la brume sonore, on y voit désormais un peu plus clair. L’exploration que nous propose Slowdive nous parait comme une évidence. Si cet album éponyme est avant tout un cadeau pour les fans nostalgiques, c’est aussi une invitation pour les nouveaux venus (que nous sommes). Pas moins matures mais certainement plus grands, les cinq musiciens ont repris place sur leur trône poussiéreux. Rien ne change, tout se transforme, Slowdive ressort glorieux de son propre cosmos.

Tracklisting

Slomo

Star Roving

Don’t Know Why

Sugar For the Pill

Everyone Knows

No Longer Making Time

Go Get It

Falling Ashes

Nos morceaux favoris : Slomo, Star Roving, Everyone Knows, No Longer Making Time, Go Get It…

La note : 10/10

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