Review : Muse – Drones

Muse revient avec un 7e opus nerveux, engagé et explosif. Chronique d’un album que beaucoup aimeront détester.

 

S’il y a bien un groupe qui attise autant la dévotion de fans et la haine d’autres, c’est Muse. Le trio du Devon nous revient à l’aube de cet été 2015 avec Drones, un 7e opus studio que le leader Matthew Bellamy avait promis d’être plus heavy, avec en ligne de mire un retour aux sources. Promesse tenue ? Oui. Drones est haletant, un album mené tambour battant par une ligne conductrice rock nerveuse et des paroles aussi sombres qu’engagées. Il prouve également que le groupe n’a en rien renié les sons de leurs débuts, tout en persistant à donner à leur musique une dimension rock de stades qui donne la nausée à plus d’un mélomane. Les trois derniers opus du groupe, Black Holes & Revelations, The Resistance et le dernier-né The 2nd Law, ont consacré Muse dans leur maîtrise du show rock à grande échelle. Après l’incroyable tournée des stades du The Unsustainable Tour, le groupe affiche sa volonté de revenir à une musique plus pure et plus simple d’un point de vue musique rock, une volonté qui prendra forme trois ans plus tard avec Drones.

Ce 7e opus, résolument rock et noir, conte l’histoire d’un jeune homme désespéré qui ne croit plus en son monde, tombant sous la coupe de ses dirigeants, avant de prendre conscience et de se libérer de ses oppresseurs. Les thématiques – guerre, dictature, révolution, domination de l’homme, menace d’apocalypse – sont loin d’être étrangères à Muse, et plus particulièrement à sa tête pensante, Matthew Bellamy. L’homme est fasciné par la conspiration, les théories du complot, les sociétés secrètes, autant de sujets qu’il potasse et insère dans ses chansons depuis plusieurs années. Drones, qui se pose clairement comme un album dans l’air du temps, ressemble fortement à l’effort le plus abouti de Bellamy en matière de songwriting.

On retrouve dans Drones autant d’ingrédients qui ont fait la quintessence de la musique et de la pensée Muse. Reapers, qui est de loin le morceau le plus heavy, promesse lointaine semblant être mise en doute par bon nombre d’observateurs – surtout après la sortie de Dead Inside dont les rythmes pop sont en contraste avec la noirceur de la chanson – résume assez bien Drones pour sa dimension rock, électrique. Ses riffs rappellent autant Stockholm Syndrome que les débuts sauvages du groupe à l’ère Showbiz. Ce son indéniablement rock, on le retrouvera sur Pyscho où le riff d’Agitated taillé pour le live est revisité de manière pertinente, The Handler et assurément Defector.

 

 

Drones suit également une logique narrative que se ressentira dans les rythmes choisis. Le départ est nerveux avec Psycho (coupé par Mercy, ses pianos rappelant Starlight et son refrain entêtant), et l’enchaînement Reapers – The Handler où la tension est palpable, à la hauteur des enjeux. L’arc [JFK] + Defector constitue lui, un revirement de situation. En plus de résumer tout ce que Muse incarne de mieux. Matthew Bellamy a en effet porté son choix sur un célèbre discours de John Fitzgerald Kennedy prononcé à la presse le 27 avril 1961. Et c’est loin d’être un hasard, puisque ce discours-clé dénonçant avec le poids des mots « une conspiration monolithique et impitoyable qui compte principalement sur des moyens secrets pour étendre sa sphère d’influence par l’infiltration plutôt que l’invasion, la subversion plutôt que les élections et l’intimidation au lieu du libre arbitre » précipite pour certains JFK vers sa chute et son assassinat. Le court extrait introduit le très réussi Defector où le héros de Drones prend conscience qu’il a le pouvoir de s’affranchir et de se libérer. Suit derrière le morceau Revolt, un morceau pop au refrain facile qui parle de révolution (et le fait moins bien qu’Uprising), et se pose comme la seule véritable et navrante déception de Drones.

 

 

Et puis il y a cette faculté très typique chez Muse à créer des morceaux d’anthologie. Un propos qui s’illustrera avec Aftermath, titre romantique qui commence avec un son de guitare que l’on sait familier chez U2, et qui s’avère en fait être un véritable morceau crève-cœur, un hymne très beau et mélodieux. Mais surtout, que dire de The Globalist, cette merveille de dix minutes ? Annoncé comme une suite à Citizen Erased, morceau ô combien apprécié des amoureux de Muse, The Globalist voit le groupe exceller à nouveau dans l’art de créer des mélodies, changer de rythmes abruptement, tout en gardant une forme de cohérence qui rendra la création encore plus démente. Débutant dans une ambiance de western apocalyptique rappelant Invincible, la longue partition alterne texte à la sensibilité exacerbée, grandiloquence rock et séquence sombre où le piano se pose comme un parfait contre-pied à la guitare. L’album se terminera par le titre Drones, un audacieux final en canon et a capella, à ériger comme le symbole d’un groupe qui a tenté de varier les plaisirs, rassembler les fans autour d’un album qu’ils n’auraient pas écouté ailleurs, le tout avec la patte Muse. Drones, un album à la croisée entre le vieux et le nouveau Muse ? Pour sûr.

 

Tracklisting :

Dead Inside
[Drill Sergeant]
Psycho
Mercy
Reapers
The Handler
[JFK]
Defector
Revolt
Aftermath
The Globalist
Drones

 

Nos titres favoris : The Globalist, Defector, Reapers

 

LA NOTE : 7,5 / 10

 

 

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