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Blur, l’album, fête ses 20 ans : Le quartet britpop dans le flou noise rock

C’est au bout de 4 albums que la formation Blur change de style et propose un album éponyme. Pour son 20e anniversaire, replongeons dans cet opus cultissime.

Il serait superflu de vous présenter Blur. D’icônes britpop à icônes musicales tout court, de Leisure en 1991 à The Magic Whip en 2015, la formation est entrée dans la légende, ni plus ni moins. Mais en 1995, les choses n’étaient pas les mêmes.
Ainsi, après un The Great Escape réussi mais mineur, les critiques vont bon train, les tensions au sein du groupe s’amplifient. Albarn, Coxon, James et Rowntree décident alors de faire un virage à 180°, de ré-imaginer, de réinventer Blur. Coxon prend le contrôle des sonorités de la formation, Albarn commence à écrire de façon plus personnelle, moins fantaisiste. L’enregistrement devient un enfer lo-fi de destruction. Les fans, confus, attendent, encore et encore.

Song 2 lancée en message d’alerte à tous ceux passés à côté de ce nouvel album, la surprise est totale. L’hymne maintenant culte se révèle être une bombe rock passant sous la barre des 2 minutes, détruisant tout sur son passage avec un rythme effréné et une basse distordue au possible. Blur est mort, vive Blur. Précurseur des expérimentations que le groupe s’offrira par la suite avec notamment 13 en 1999, l’éponyme album Blur paraît le 10 Février 1997.

Adulé, décrié, adoré, conspué: là sont les marques d’une prise de risque, d’un vrai changement. Le quartet a abandonné ses atours britpop pour se lancer dans une quête sonique unique, expérimentale, radicale. Pour les 20 ans de cette monumentale variation, il est temps de replonger dans l’album qui a construit le Blur d’aujourd’hui.

 

La pochette

La photo (évidemment floue) a été réalisée par des collaborateurs de longue date du groupe: Yacht Associates, composé de Chris Thomson et Richard Bull. Sur la photo, on distingue un patient emmené d’urgence sur un lit d’hôpital; un sentiment d’urgence est renforcé par le flou artistique qui rend la photo à peine lisible. Bien plus qu’une volonté esthétique, ce choix fait finalement écho à l’album en lui-même: autant que le patient a besoin d’être emmené, dans un état critique, Blur, dans un état critique, a besoin de cet album de façon vitale pour se réinventer. Photo qui combine « optimisme et effroi » d’après Yacht Associates, la pochette, maintenant culte, restitue parfaitement l’importance de cet éponyme effort dans la discographie du groupe.

 

Le titre

La volonté de proposer un album éponyme dans une discographie déjà conséquente n’est jamais un choix anodin. Tout est question de contexte: ici, un quartet prenant l’eau, croulant sous les critiques et les tensions. De là, un besoin vital de renouveau, d’identité inédite, de renaissance: pour ce 5ème album détruisant toute affiliation du groupe avec la britpop, le titre l’associera éternellement avec le groupe. Blur.

 

Les thèmes

Il n’est ici pas tant question de ce qui est abordé mais de comment cela a été abordé. Là où Damon Albarn se réfugiait derrière des entités fictives dans les précédents albums du groupe (Tracy Jacks, Dan Abnormal), Blur voit le chanteur adopter une approche plus directe de ses expériences et de son ressenti; toujours avec cette voix si reconnaissable. De l’aveu même du groupe, ils refusent d’expliquer certaines paroles, car « ce serait une expérience désagréable pour tout le monde ». A vous donc de vous plonger dans l’énigme Blur et dans l’esprit torturé de Damon Albarn.

 

La réception

Comme évoqué précédemment avec Franz Ferdinand, la prise de risque paye, mais est coûteuse. En se débarrassant de leur étiquette britpop, Blur s’est attiré les foudres des fans et des critiques de la première heure, tout en gagnant en intérêt pour un public jusque-là insensible. Choix à double tranchant, réinvention essentielle, Blur a signé pour le meilleur et quoi qu’en disent les critiques le renouveau du groupe, et a soufflé un vent singulier sur la scène musicale britannique, tout en livrant des morceaux irrésistiblement cultes.

 

3 singles à retenir

Beetlebum

Le premier single annonciateur de la tempête à venir. Démarrant sur un riff inspiré de Coxon, le titre se construit avant de déployer un refrain superbe et irrésistible; un grand classique.

Song 2

Est-il encore utile de la présenter? Song 2 est l’hymne ultime de Blur, la chanson qui évoque quelque chose à tous ceux connaissant le groupe de près ou de loin. Moins de 2 minutes d’un ensemble effréné et jouissif, jusqu’à cette basse distordue en refrain et ce riff énervé. Un titre incontournable, un morceau live incomparable.

On Your Own

L’un des ultimes singles du groupe. Le titre se construit doucement jusqu’à un refrain évidemment placé sous le signe de la distorsion, avec ce riff rythmé et déphasé; et la voix de Damon Albarn, toujours aussi incroyable.

3 non-singles à retenir

Death of a Party

L’un des titres les plus calmes de Blur, Death of a Party installe un calme tendu et ténu, et cache son jeu jusqu’à un sublime refrain, à grand renfort de basse rebondissante, d’inspiré lick de guitare et d’élégants synthétiseurs. Une réussite, évidemment.

Chinese Bombs

Avec Song 2, c’est sans doute celle qui porte le mieux le message de ce 5ème album. Brûlot noise-rock passant sous la barre de la minute 30, Chinese Bombs est une déflagration, un plaisir jouissif, un titre unique qui ne laisse aucune chance à son auditoire. Destructeur et fascinant.

Movin’ On

Un des derniers titres de l’album lui aussi placé sous le signe de la distorsion. Les couplets, aguicheurs, laissent la place à des refrains à la progression mélodique imparable, pour mieux placer des ruptures énervées et un pont démontrant mieux que jamais tout le talent sonique de Coxon. Un régal.

Qu’ajouter à ce Blur? De réinvention en prise de risque en inédites sonorités, contre vent et marée, le groupe a su se réinventer de la plus majestueuse des façons avec un opus imparable qui n’a pas pris une ride pour son 20ème anniversaire. Un coup de maître, un tour de force, une jouissive et essentielle anomalie dans la discographie d’un groupe qui passe maintenant à la postérité. Flou artistique, écran noir, rideaux.

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