Skunk Anansie : « Le prochain album sera radical et neuf »

Une tournée acoustique, les 20 ans, de nouveaux projets… Rencontre avec Ace, le guitariste de Skunk Anansie, à quelques heures de leur show à La Cigale.

 

Skunk Anansie à La Cigale

 

Ce doit être une question barbante qu’on doit vous poser trop régulièrement, mais pourquoi et comment avez-vous eu cette idée de transvaser vos meilleurs titres en acoustique ?

Tu te méprends parce qu’en fait c’est une très bonne question. C’est un enchaînement d’événements à vrai dire, et tout est parti d’une invitation à un festival acoustique en Suisse, le Zermatt. Ils nous ont demandé de faire un show acoustique pour eux, ce que nous n’avions jamais fait jusqu’ici. On a bien joué quelques titres pour des radios. On s’est dit, « on ne sait pas… », et eux : « Écoutez, on vous fait venir, on vous paie bien, vous restez pendant tout le week-end, un petit hôtel sympa ». Effectivement, ils ont bien payé. On s’est dit que ça pouvait être cool et fun de tenter cela. C’était tellement bien que le manager en sortant du show, « on a eu un superbe week-end, on va utiliser l’argent pour rentrer à Londres, et monter un show acoustique et le filmer. Au lendemain de notre retour, on jouait à Cadogan Hall, alors qu’on n’avait jamais joué un show dans ce but. Les billets se sont vendus en une poignée de minutes, et tout le monde était excité par tout ça. Après ça, on a fait quelques télé, et le manager nous a dit si on était intéresser par une tournée. « On n’est pas vraiment pas un groupe acoustique, mais on va la faire ». Et tout est sold-out. En Angleterre, tout est parti en 8 minutes. C’est parti d’un festival et ça finit en tournée. Mais on ne le fera qu’une fois, parce qu’on n’est pas vraiment un groupe fait pour l’acoustique.

 

J’étais moi-même surpris par cette démarche pour un groupe assez heavy. Et au final on est face à quelque chose de rafraîchissant et d’étonnant…

C’est un truc de Skunk, on est juste bon dans ce qu’on fait parce qu’on le fait depuis longtemps. On a un bon fonctionnement. On n’est pas les meilleurs musiciens au monde, mais on est vraiment ensemble. Quand on fait quelque chose, que ce soit de l’électrique ou de l’acoustique, on essaye de faire de sortir le meilleur de nos capacités. Travailler sur les arrangements, les voix, les cordes, la basse ici, le piano là-bas. Et c’est ce qui a surpris les fans qui pensaient voir un show acoustique basique, mais non… Tout a été ré-arrangé. C’est un vrai ensemble. Je pense que c’est bien mieux que ce à quoi s’attendaient certaines personnes.

 

Ace - Skunk Anansie à La Cigale

 

Et c’était une manière aussi d’exposer encore plus la voix si particulière de Skin ?

Oui, de toute évidence. On peut l’entendre encore mieux ici, et les paroles sont encore plus claires.

 

Vous avez enregistré ce DVD dès votre premier show. Comment vous sentiez-vous avant de monter sur scène ? Intimidé, craintif ?

C’était flippant, pour sûr. Et en même temps très intense. On devait être irréprochable, parce qu’au final, c’est très différent de faire un show acoustique qu’un show rock que vous pouvez moduler. Mais là, vous ne pouviez rien changer. Il y avait tous ces micros dans la salle, pour les cordes, les violons, la batterie… On ne peut pas dire, « je prends ma guitare et je vais bouger là… » Tout doit rester comme c’est. On était très concentré sur le fait que tout se passe bien. Habituellement, on pouvait faire des erreurs, et oublier aussi vite. Mais là, ça relevait du cauchemar du genre, ‘ne merde pas, ne fout pas tout en l’air’

 

« Avec l’acoustique, nous sommes de meilleurs musiciens »

 

Qu’est-ce que vous avez appris avec cette expérience, et cette tournée acoustique ?

Je pense qu’on a appris des choses en tant que personne. Par exemple, ne plus s’amuser, au lieu de s’inquiéter ou tracasser à chaque instant. On s’est dit que cette tournée devait être fun, de ne pas être stressante. Et puis on a appris à jouer en acoustique. Je vais sortir de cette tournée en étant capable d’assurer un concert en acoustique, ce que je ne savais pas faire avant. On est de meilleurs musiciens en ce sens.

 

Dix ans en arrière, vous auriez pensé ça ?

Non, jamais. On n’aurait pas pu imaginer cela. On se disait plutôt qu’on ne ferait jamais de show acoustique, que jamais on ne touchera à ce genre de guitares. Jusqu’à ce concert au Zermatt. On était alors plus client à le faire.

 

Skunk Anansie à La Cigale

 

Quand vous jouez sur scène en acoustique, pendant cette tournée, vous ne ressentez pas ce petit désir de revenir à un rock plus dur, ou plutôt ce manque ?

Si, totalement (rires). Je ne peux plus attendre ! On a déjà un peu parlé de ce à quoi ressemblerait le futur album, du genre « ouais, on va faire un truc très heavy, y’aura des riffs »… On est passé par les extrêmes, de Black Traffic à ça. Avant ce dernier opus, on passait notre temps à faire des mélodies, et là, on faisait juste craquer les amplis. Et là, ça sera encore différent, parce qu’on a expérimenté l’acoustique. Qui sait, on aura peut-être des chansons acoustiques sur le prochain album…

 

« On veut toujours que ce soit pertinent, moderne, neuf et excitant »

 

Et comment imaginez-vous le futur album ?

Je le vois radicalement nouveau et moderne. Une autre évolution. Ce qui est cool avec ce groupe, c’est qu’il n’a jamais cessé d’évoluer, des premiers jours jusqu’ici, chaque opus était différent. Celui-ci est évidemment plus classique, je suppose. On est plutôt progressif, on veut toujours que ce soit pertinent, moderne, neuf et excitant. Je peux donc garantir que le prochain album sera radical et neuf.

 

20 ans que Skunk Anansie existe, et l’industrie musicale a évolué depuis. Comment ressentez-vous cette évolution, quand on entend trop régulièrement les mots crise par exemple ?

 

Je ne suis pas sûr de voir l’évolution de notre industrie musicale d’un mauvais œil. Bien sûr il y a ce téléchargement illégal qui est à bannir, mais je crois que c’est la seule chose négative de cette industrie. Quand on voit l’exposition qu’on peut avoir, entre YouTube ou les réseaux sociaux, c’est absolument fantastique. Nous, ce qu’on peut faire, c’est s’adapter pour survivre. On est finalement habitué à aller sur les réseaux sociaux, comme à tenir notre merchandising et s’y impliquer. Je m’en occupe personnellement, et je sais que si on ne fait pas ce travail un peu éloigné de la musique, on ne fera pas d’argent. On est assez indépendant finalement. On budgète notre album, on le fait, on l’enregistre, on le sort et on en fait ce qu’on en veut. On n’a pas d’étreinte. Reste le téléchargement illégal, qui est un frein commercial qui empêche l’argent de rentrer. Heureusement, il y a le marché du live, qui fonctionne bien. En somme, un groupe doit s’appliquer sur le merchandising, le live, et aussi enregistrer ses albums, de faire des albums de qualité pour prétendre à de bons et gros concerts, parce que sans concert, tu ne fais pas d’argent.

 

 

Et si Skunk Anansie s’était créé il y a un ou deux ans ?

Tu sais quoi, je pense que si on avait commencé l’an dernier, le groupe serait le même que celui qu’on a formé dans les années 90. Si on arrivait là avec Skin, ça serait quand même quelque chose de nouveau, parce qu’en vingt ans, je n’ai pas vu de groupes faire aussi bien dans ce registre. Le truc fun là-dedans, c’est par exemple d’aller en Italie, et de voir qu’il y a une dizaine de tribute bands de Skunk Anansie, et là-bas, il n’y a pas de groupes comme nous. C’est un peu comme Led Zep ou Black Sabbath en leurs temps : des groupes uniques, imités mais jamais égalés. On peut donc croiser des groupes dont les sons ressemblent à ceux de Skunk, mais ce n’est pas du Skunk. Ce qui est génial, parce que tu n’as pas besoin d’être massivement connu pour être original, et c’est ce que nous rend heureux de le faire.

 

Quels sont les projets après cette tournée ?

On va déjà la finir, et je pense qu’on n’en fera pas d’autre. Pas de festivals non plus, on en a déjà énormément l’année dernière pour finir le Black Traffic Tour. On a besoin de finir cette tournée, disparaître, écrire de nouvelles choses et revenir avec un nouveau son, ce qui pourrait prendre six mois, et environ un an pour l’enregistrer, le mixer et booker une nouvelle tournée (si on se base sur l’agenda de Black Traffic).

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