29 Mai Interview : Happyness
Sympathiques et très ouverts, les Happyness sont aussi drôles et intéressants que leurs chansons. Votre correspondante Soundofbrit a rencontré Benji et Jonny, le duo racine du groupe, à peine deux heures avant leur concert en ouverture des Dandy Warhols au Fri-Son.
D’ailleurs, la bande de Londres bénéficie du soutien du quatuor de Portland: Courtney Taylor-Taylor et Brent DeBoer en personne viendront les encourager pendant le soundcheck.
L’enthousiasme de la bande est communicatif: très heureux d’avoir pu visiter Paris et son centre Pompidou la veille, Jonny me montre de jolies cartes postales un peu rétros qu’il a achetées en souvenir, même s’il ne va pas forcément les envoyer. Le temps pour Benji de nous rejoindre dans la minuscule salle backstage et nous commençons à parler de leur vie en tant que groupe montant, de leur album Weird Little Birthday (dont le concept est un enfant qui partage son anniversaire avec Jésus !), de films italiens des années 70, d’églises hantées… et bien plus encore !
J’ai lu dans quelques interviews que vous viviez tous dans le sud de Londres…
Benji : Oui.
…Tous ensemble dans la même maison ?
Jonny : Non, je ne crois pas que nous pourrions faire cela.
Benji : Nous passons 80% de notre temps ensemble de toute manière, que ce soit pour enregistrer, sur la route ou simplement socialement, en tant qu’amis. Je ne crois pas que vivre tous ensemble ait un intérêt quelconque, ça n’a pas vraiment de sens.
Jonny : Ouais, je veux dire- nous passons 95% de notre temps ensemble. Donc nous vivons ensemble, mais nous dormons dans des lits séparés !
Benji : Des lits séparés, c’est important-
Jonny : Ne dormez pas tous dans le même lit ! C’est une astuce pour la vie de groupe. Ayez chacun votre propre espace !
Benji : Des douches séparées, des lits séparés, et le tour est joué. Et… chacun sa copine ! (rires)
Jonny : Je voulais la faire !
Pour vous connaître mieux et avant de parler de votre album, je voulais savoir à quoi ressemblait votre vie quotidienne lorsque vous n’êtes pas en tournée.
Benji : J’aime cuisiner.
Jonny : Je… me réveille autour de midi, je prépare le petit-déjeuner… J’existe pendant un moment…
Benji : J’aime conduire ma moto autour du parc. Il y a un parc vers ma maison, c’est un espace assez ouvert.
Jonny : Je ne conduis pas de moto, alors je marche dans le parc.
Benji : Oui, parfois nous marchons ensemble dans un autre parc, cela nous rappelle notre côté nature.
Jonny : Nous sommes membres d’un truc appelé le London Wetland Centre. C’est une réserve qu’ils ont fait pour préserver la nature, mais c’est surtout des oiseaux.
Benji : Il y a deux otaries aussi.
Jonny : Elles sont adorables.
Benji : On traîne avec elles parfois.
C’est super ! J’en déduis que vous parvenez plus ou moins à vivre de votre musique ?
Jonny : Hmmm !
Benji : Cela dépend de ce qu’on fait !
Jonny : Lorsque nous sommes payés, nous le recevons par grosses parties. Nous ne sommes pas payés régulièrement. Donc lorsqu’on est payés, on vit comme des rois pendant un mois. Ensuite, nous vivons avec absolument rien pendant trois mois, jusqu’au prochain paiement !
Benji : Comme des otaries dans la nature !
Jonny : Ce serait sympa de pouvoir en vivre correctement.
Benji : Cela dépend de ta définition de « vivre » je pense, et du type de restaurants dans lesquels tu veux manger !
Je voulais juste savoir si vous gagniez assez pour satisfaire vos besoins vitaux.
Jonny : Eh bien, aucun d’entre nous n’a de loyer à payer. Nous sommes retournés vivre chez nos familles. C’est-à-dire-
Benji : Nous sommes en tournée la plupart du temps, alors cela n’avait pas vraiment de sens de louer un appartement. Je vis avec ma copine.
Jonny : Je vis avec ma maman et mon papa. C’est plutôt agréable.
Benji : Ils sont gentils. (rires)
Maintenant, parlons un peu de votre album Weird Little Birthday. Comment avez-vous eu l’idée de la pochette ?
Benji : La photo est sortie ainsi, nous n’avons rien fait. (rires) Non, nous l’avons trafiquée un peu.
Jonny : Nous avons donné des allumettes à un enfant sur la plage, et pris des photos.
Benji : Cela fait un moment maintenant.
Wow. Et qui était cet enfant ?
Jonny : Aucune idée, l’enfant de quelqu’un d’autre ! (ndlr : il éclate de rire). Non je plaisante, c’était juste l’enfant d’un gars… nous avions une connexion très bizarre avec lui.
Benji : Je crois que nous ne sommes même pas restés en contact avec lui. Il ne sait probablement pas que son enfant est sur la couverture.
Jonny : Il ne sait probablement pas qu’il est sur cette planète !
C’est inquiétant.
Jonny : Très. Mais il est quelque part.
J’ai lu dans le magazine DIY que vous aviez d’abord essayé d’enregistrer votre album dans une église, et qu’il y avait une atmosphère étrange.
Benji : Oui, c’est vrai.
Jonny : Puisqu’on parlait de nos moyens financiers- nous étions en train d’établir un budget pour l’album, et je crois que nous n’avons dépensé que 40 pounds sur l’enregistrement ! Nous avions déjà tout le nécessaire, parce que nous enregistrions chez nous.
Benji : Oui, et dans ces 40 pounds il y a le café et les chips qu’on a achetés à la station-service !
Jonny : Il faisait très froid dans cette église, et nous ne savons toujours pas si elle était en réalité hantée. Nous sommes tous très sceptiques sur ces choses-là, mais…
Benji : Peut-être que le fantôme était très religieux, et il a trouvé que nous n’étions pas assez croyants pour être là.
Jonny : La première et seule chanson que nous avons enregistrée sur place est la première sur l’album, Baby, Jesus (Jelly Boy). Peut-être que ce n’était pas le meilleur choix.
Benji : Il faisait tellement froid ! C’était horrible !
Jonny : Nous avons tenu deux semaines et nous sommes partis.
Benji : Pourtant, nous avions acheté un chauffage à gaz industriel. Nous l’avions placé au milieu de l’église pour nous tenir chaud, mais cela n’a rien changé, à part nous donner un peu la nausée parce que le gaz était dans l’air dans la pièce.
Jonny : C’était une idée très stupide, parce que l’église était à une heure et demie de Londres, et nous devions chaque jour faire l’aller-retour en voiture jusque là-bas.
Vous avez sorti l’album en édition deluxe également. J’aime beaucoup la chanson bonus You Come To Kill Me ?!, comment est-elle née ?
Jonny : C’est drôle, parce que nos disques ne sont pas sortis dans le même ordre dans lequel nous les avons enregistrés. Nous avons d’abord enregistré l’album, puis nous avons enregistré les deux chansons en trop de notre premier EP. C’était Montreal Rock Band Somewhere et Lascascadas. Lorsque nous avons sorti l’album, la première chose que nous avons enregistrée après était- nous étions tous très enthousiastes, et je crois que nous voulions composer une chanson en un jour – You Come To Kill Me ?!. L’enregistrement est un peu merdique. Je crois que si nous devions la refaire l’enregistrement serait meilleur.
Benji : Nous avions écrit les grandes lignes de la chanson, nous avions en quelque sorte une idée… Mais nous l’avons complètement réécrite après être entrés en studio.
Jonny : C’est devenu une chanson entièrement différente. Je crois que la seule chose que nous ayons gardée de l’originale, c’est la petite mélodie que tu entends dès le début et tout au long de la chanson.
Benji : Nous avions regardé un film italien que nous aimons beaucoup, The Suspiria (ndlr : un film de Dario Argento, paru en 1977). C’est un espèce de film d’horreur théâtral, plutôt ridicule. C’est comme une école de sorcières…
Jonny : Et il y a une scène très drôle à la fin, où cette fille entre en quelque sorte dans la tanière de la sorcière. Et elle dit (ndlr, il le dit avec un accent italien) « You come to kill Helena Markos ?! »
Benji : « You come to kill me ?! » (rires) Tu devrais le regarder, la bande-son est géniale.
Pourrions-nous aussi parler de votre nouvelle chanson SB’s Truck ?
Benji : Oui, nous avons fini de l’enregistrer il y a environ deux ou trois semaines.
Jonny : On a beaucoup réfléchi à notre 2ème album, qui sortira probablement dans 3, 4 ou 6 mois. Nous devons encore enregistrer la plupart des chansons, mais nous avons beaucoup écrit. Je pense aussi que notre label en particulier voulait que nous sortions quelque chose.
Benji : Oui, et beaucoup de fans nous ont demandé ce que nous avions fait ces 6 derniers mois ! Plutôt que simplement mettre en ligne les démos, nous voulons faire quelque chose de bien.
Jonny : On tourne tellement, on voudrait bien jouer de nouvelles chansons en live. Donc SB’s Truck est sorti une semaine seulement après que nous l’ayons enregistrée. Elle a été écrite très vite. Le titre vient du catcheur français André The Giant (ndlr : André Roussimoff). Nous sommes de grands fans ! Lorsqu’il était enfant, il est devenu trop grand pour la voiture de ses parents à un certain point. Du coup, le voisin devait l’emmener à l’école car il avait un camion. Ce voisin était Samuel Beckett. C’est donc pour ça que nous avons appelé la chanson SB’s Truck, même si la chanson n’en parle pas du tout. Nous avons juste trouvé que ça la rendait intéressante.
Oui, il y a toujours ce côté rigolo et mystérieux à la fois dans vos chansons. Cela va plus loin que simplement s’amuser.
Jonny : Oui, j’étais presque surpris parce que nous avons tout écrit avant de faire quoi que ce soit d’autre en tant que groupe. Je n’avais rien montré à mes proches, nous n’avions pas donné de concerts. Nous nous sommes pratiquement enfermés pendant un an. Bien-sûr, nous nous sommes éclatés en écrivant l’album. Beaucoup d’idées viennent de nos conversations et de blagues. Mais ce n’est pas supposé être de la comédie à 100%.
Benji : En voyant nos titres et nos paroles, beaucoup de gens pensent que nous faisons de la musique clic-bait, pour que les gens cliquent à cause du titre de nos vidéos. Pourtant, il y a aussi tout un autre sens dans la plupart de nos chansons.
Jonny : Nous n’avons jamais sorti quelque chose qui n’ait pas de sens plus profond derrière le côté drôle, ou qui n’ait pas de signification plus profonde pour nous.
Maintenant, j’aurais une question bizarre à vous poser. Si vous deviez boire une chose pour le reste de vos vies, que choisiriez-vous entre le vin et le jus de tomate ?
Jonny : Ah, c’est très difficile. Peut-être… aucun des deux ? (rires)
Tu préfèrerais mourir de soif ?
Jonny : Donc je n’ai pas le choix ?!
Benji : Je pense que je choisirais le vin, pour la seule raison que l’acidité du jus de tomate me donnerait des brûlures à l’estomac. Le vin aussi, mais je serais saoul, donc ça irait !
Jonny : C’est vraiment difficile. Je crois que si je devais boire du vin toute une journée, je n’y parviendrais plus le lendemain. Je pense que je choisis le jus de tomate. Mais c’est quoi l’histoire derrière ? On est sur une île ? Est-ce que tout le monde serait saoul ?
Vous devez continuer à mener votre vie normale. Imaginons que vous êtes dans un univers parallèle et que tout le monde doit faire ce choix à la majorité.
Benji : Alors j’ai changé d’avis. Je prends le jus de tomate.
Jonny : J’ai une autre question. Est-ce qu’il y a une séparation entre ceux qui boivent du jus de tomate et ceux qui boivent du vin ?
Benji : Y a-t-il une distinction politique entre les deux ?
Non, non ! Vous allez trop loin !
Jonny : Tu devrais faire ce film ! Une guerre civile entre les jus de tomate et les vins ! C’est comme les Hunger Games ! (rires) Quelle marque de jus de tomate ? Est-ce que le vin sortirait du robinet ?
Benji : C’est l’une des questions les plus sérieuses que nous ayons jamais eues.
Non, vous pourriez toujours utiliser de l’eau pour vous laver. Vous ne pourriez simplement pas la boire.
Jonny : Ce serait affreux. Je crois que je me tuerais sur-le-champ. Non, en fait je choisirais le vin et je ferais la fête pendant une bonne semaine avant de mourir !
Benji : Nous pourrions mourir ensemble.
Que pouvons-nous attendre de Happyness dans les mois qui viennent ?
Benji : Un EP cet été, puis un autre album à la fin de l’année.
Jonny : Oui, et nous avons un projet en parallèle, appelé Soy Sauce. Nous allons bientôt sortir des chansons. Et pour la suite, nous n’en n’avons absolument aucune idée. Nous aimerions beaucoup écrire pour les comédies musicales, si quelqu’un nous offre l’opportunité ! Pareil avec la musique de film, si c’est des bons films !
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