09 Fév Interview : The Proper Ornaments
Rejoignez-nous pour une interview où nous parlons de l’album du groupe Foxhole, de télévision, de nostalgie et bien plus encore.
Faisant partie de cette scène de l’est de Londres parfois à tendance krautrock avec leurs potes de TOY et Charles Howl (dont ils sont aussi membres), les Proper Ornaments étaient de passage au Romandie le 31 janvier dernier. C’est avec leur dernier album Foxhole dans les oreilles – dont les chansons réchauffent le cœur face à la grisaille et le froid ambiants – que je me dirige vers la sympathique salle où je suis censée retrouver le groupe. Il est 18h40, c’est ainsi que je brise le cliché des suisses toujours à l’heure avec mon retard de dix minutes (j’ai vraiment honte). Lorsque j’arrive, les Proper Ornaments ne sont pas encore sur place, ce qui me sauve et m’arrange car j’ai le ventre vide. Nous nous retrouvons donc quelques heures plus tard dans leur loge.
Ravis de visiter Lausanne, les quatre compères me demandent quelles sont les choses à voir car ils ont la matinée libre le lendemain, et si la cathédrale en vaut la peine. Pendant ce temps, James est en train de dormir sur un canapé – le groupe me dit de ne pas m’en faire, « il est juste très fatigué ». Eux qui me paraissaient si sérieux au départ, les voilà en train de se vanner les uns les autres. La glace est donc brisée, et nous commençons l’interview.
Avant de parler de votre album, je voudrais faire plus ample connaissance avec vous. À quoi ressemble une journée normale dans vos vies lorsque vous n’êtes pas en tournée ?
Max Oscarnold : Lorsque nous ne sommes pas en tournée ? (rires) Nous aimons simplement passer du temps à la maison.
Daniel Nellis : Max et moi sommes colocs.
Max : Oui, tu sais… Par exemple nous allons dans un magasin sympa, nous préparons le repas … (rires) Nous avons une petite dispute à propos de qui doit faire la vaisselle… Et puis nous commençons notre journée, ce qui peut inclure regarder la télé… (rires) Nan, je ne regarde pas la télé. Je lis des livres, je vais faire des promenades… Il (ndlr : en pointant du doigt Daniel) fait des films. Mais bon voilà quoi, on fait juste des trucs normaux.
J’en déduis que vous n’avez pas de petits boulots par exemple, donc que vous parvenez à vivre de votre musique ?
Max : Ouais, c’est-à-dire – nous sommes dans plusieurs groupes, et tout le monde fait des choses différentes.
Daniel : Je gagne aussi ma vie en faisant des films. J’ai également fait le clip pour Magazine.
Génial ! D’ailleurs, tu as mentionné le fait que vous soyez dans plusieurs groupes. Ça va, vous gérez ?
Max : C’est faisable. Tu dois t’organiser, pour faire des choses tout au long de l’année.
Daniel : Max est l’une des personnes les plus organisées que je connaisse.
Vraiment ?
Daniel : Non. (rires)
Parlons à présent de Foxhole. Je l’ai tapé sur Google, et j’ai vu que ce mot avait deux significations.
Max : Oui, nous faisons référence aux tranchées de la première guerre mondiale (ndlr : et donc pas à la cachette d’un renard). Il y a une chanson sur l’album appelée Jeremy’s Song. Cette chanson est en fait Foxhole. Mais nous en avons changé le titre en référence à notre ami Jeremy, qui a masterisé le disque. Donc ensuite nous avions ce mot, Foxhole, qui était inutilisé. Il allait bien avec le ton de l’album, alors nous l’avons utilisé. Jeremy’s Song parle de la guerre dans les années 20.
Bobby Syme : C’est assez indirect tout de même, n’est-ce pas ? Beaucoup de chansons sur le disque sont très nostalgiques, elles font référence au passé.
En effet, c’est un thème récurrent de l’album.
Max : Oui, tu ne peux pas t’inspirer du futur parce que tu ne sais pas ce qui va arriver ; il n’existe pas encore. Donc tu n’as que le passé, tu t’inspires de choses du passé que tu aimes.
Pourrions-nous aussi parler de la pochette ? Pourquoi donc ces caractères japonais ?
Max : Il y a un moine qui vivait en Angleterre dans les années 50. Il écrivait de la poésie, et l’un de ses livres avait une couverture similaire à celle que nous avons utilisée pour notre livre. Nous nous sommes donc inspirés de son travail, en créant le design de notre pochette dans le même style. Il s’appelle Dom Houédard.
Je trouve aussi que les chansons de Foxhole sont plus calmes que celles de son prédécesseur, Wooden Head. Comment l’expliquez-vous ?
Max : Oui, tu as raison. Nous avions de nombreux pianos à la maison, alors nous avons commencé à composer avec. Et puis, nous voulions simplement faire quelque chose de différent tu sais, quelque chose de plus clairsemé et plus tranquille. Nous voulions tenter quelque chose d’autre, et les chansons nous sont venues naturellement ainsi.
Il y a une chanson à la fin de l’album, The Devils. Je la trouve très intrigante. Quelle en est la signification ?
Max : Hmm… C’est à propos de quelqu’un ou de quelque chose qui vient vers toi, et dont tu sais qu’elle est mauvaise pour toi. Malgré cela, tu décides quand même consciemment de t’y abandonner, de te laisser aller, ou de t’y perdre. Dans cette chanson, il s’agit d’une fille, mais cela peut être n’importe qui, ou n’importe quoi tu sais ? Alors cette mauvaise chose viens vers toi, et tu décides tout de même de l’essayer. La chanson te dit de ne pas te perdre, et il y a cette image… comme lorsque tu pêches, et qu’il y a la ligne qui est sur le point de se casser. Tu risques de tomber dans l’eau et de te perdre. Donc The Devils peut être à propos de ce que tu veux. La drogue, l’alcool, la télévision… À partir des paroles tu peux interpréter la chanson comme tu le souhaites. C’est sympa de les garder ouvertes (ndlr : les chansons), car chacun en tire sa propre version.
Oui, créer de la distance pour au final créer de la proximité peut-être ?
Max : Oui, et aussi ne pas donner aux gens quelque chose de très concret et apparent, mais quelque chose de plus relatif. De cette manière, il y a un engagement plus interactif avec le disque. À la place de l’écouter et de se dire « oh, voilà de quoi ça parle », tu dois t’impliquer. Chaque personne aura des images différentes. C’est donc interactif dans le sens que tu dois faire un petit effort pour l’apprécier. Il ne t’es pas servi sur un plateau.
Enfin, je vous demande de compléter cette phrase : lorsque je suis seul, j’aime… (ndlr : quelqu’un pouffe de rire). S’il vous plaît, ne dites pas que vous aimez vous masturber.
??? : Je pense que tout le monde y a pensé. J’y ai pensé en tout cas.
Max : Lorsque je suis seul, j’aime le rester.
Bobby : Oui, j’allais le dire. J’aime aussi être seul.
Daniel : Ces trois-là (ndlr : Max, Bobby et James qui dort toujours) aiment être seuls. J’aime le contraire.
Max : Il rassemble toujours des amis pour aller quelque part.
D’un autre côté, j’imagine que c’est normal de vouloir être seul parfois en tournée lorsqu’on est constamment entouré d’un groupe non ?
Bobby : Personnellement, je n’ai pas ce sentiment en tournée. Mais lorsque tu te retrouves seul, que tu n’as rien à faire toute la journée et que personne ne te déranges, c’est très agréable. Après je ne pourrais le faire que pour un jour, à force j’aurais besoin de parler à quelqu’un. (ndlr : à Max) Tu pourrais le faire pendant des semaines.
Max : Ouais, j’adore être seul, mais je dois faire attention. C’est comme une boule de neige qui grandit, et cela devient mauvais. J’aime être seul, mais ensuite je vais trop loin et je deviens grognon et en colère contre tout le monde. C’est pour cela que c’est bien pour moi d’avoir des obligations sociales, sinon je me perdrais en moi-même en quelque sorte.
Enfin, que pouvons-nous attendre de Proper Ornaments dans le futur ?
Max : Nous allons continuer à faire de la musique et à donner des concerts, je suppose.
Daniel : Rester très organisés. (rires)
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