25 Oct Arctic Monkeys – The Car
Le 7e album des Arctic Monkeys se sera fait attendre pendant plus de 4 ans. Décryptage de ce nouvel album qui ne laissera personne indifférent.
Que les choses soient claires, je fais partie des défenseurs de Tranquility Base Hotel & Casino (2018) . Certes ce n’était pas l’album attendu après AM (2013), mais le concept était réussi. Bien que déroutant aux premières écoutes, son esthétisme unique en a fait une sorte d’ovni fascinant dans leur discographie. Afin que l’ovni TBH+C en reste un, il aurait fallu un successeur bien différent… On ne va pas vous cacher qu’à la première écoute de The Car, la déception a pointé le bout de son nez. Et pourtant les différences sont présentes mais bien plus subtiles qu’imaginées.
The Car débute avec There’d Better Be A Mirrorball. Nouveauté attendue, le groupe a enregistré pour la première fois avec un orchestre. L’introduction du morceau le met en évidence dès le début avec 40 secondes d’instrumental. L’idée est excellente et met directement dans l’ambiance de The Car mais pourtant impossible de ne pas se questionner. La durée totale n’est que de 37 minutes pour 10 titres, pourquoi ne pas avoir fait de cette courte introduction instrumentale un morceau à part entière ? Sur le reste du titre, l’utilisation saccadée du piano rappelle forcément le maître incontesté : Elton John (avec Bennie & The Jets entre autres).
I Ain’t Quite Where I Think I Am rappelle forcément des souvenirs du live à Rock en Seine même si en version studio on retrouve une orchestration en fond. Cet ajout évoque forcément la seconde formation d’Alex Turner : The Last Shadow Puppets. Pour autant le groupe arrive à en faire un titre unique avec des sonorités funky ; du jamais vu dans leur discographie. On se demande également comment est né ce morceau, l’introduction ressemble fortement au début de Why’d You Only Call Me When You’re High sur la tournée de TBH+C. Mention spéciale aux chœurs qui apportent clairement ce petit truc en plus.
Big Ideas et Hello You font également partie des satisfactions avec une réelle profondeur et une perspective cinématographique qui sonnent comme une évidence. Malheureusement tous les titres ne sont pas de ce niveau et on peut trouver une certaine forme de mollesse, de redondance et d’ennui. La lancinante Perfect Sense joue trop sur l’aspect larmoyant des violons tandis que la lenteur de The Car et Mr Schwartz portent préjudice au rythme global de l’album.
La pochette de l’album est une photographie réalisée par Matt Helders, depuis son ancien appartement de Los Angeles, avec son Leica M6. Alex Turner s’est ensuite inspiré de ce parking vide avec une Toyota Corolla pour composer le titre The Car. De fil en aiguille la photographie et le titre sont choisis pour porter l’étendard de cette nouvelle ère. Soyons honnête c’est la plus grande participation de Matt. Véritable talent brut de sa génération, le batteur semble s’éteindre peu à peu au sein de la formation de Sheffield. Sur TBH+C et désormais The Car, on ne trouve aucun charme à la batterie. Exit les roulements, les breaks et les chevauchements. Son apport se limite a des rythmiques répétitives et effacées. Seul le titre Hello You propose une rythmique avec des tambourins mais on n’est même pas sûrs que ça soit de son initiative… C’est bien trop insuffisant pour The Agile Beast. Encore plus inquiétant, on ne peut pas dire qu’il soit flamboyant sur scène non plus. A Rock en Seine il nous a semblé plein d’envie mais trop rarement dans le tempo !
Ce sont d’ailleurs les autres membres qui arrivent à se mettre en lumière. Jamie Cook est crédité comme auteur sur l’envoutante Sculptures of Anything Goes, sa première participation à l’écriture depuis… Still Take You Home en 2006 ! Sans aucun doute un des meilleurs moments de The Car avec une légère saveur d’AM. À titre de comparaison Nick O’Malley est crédité sur Balaclava et R U Mine? tandis que Matt Helders l’est sur Brick by Brick. Pour revenir à Jamie et Nick, leur présence se fait plus ressentir sur cet album que le précédent. On retrouve ici une âme de groupe. On peut citer les belles lignes de guitares et de basses sur Jet Skis On The Moat, Big Ideas ou encore Body Paint. Sur cette dernière la filiation avec David Bowie est probante.
Deux autres personnes ont eu une grande influence dans l’écriture. James Ford, considéré comme le 5e Monkeys qui s’occupe déjà des orchestrations avec The Last Shadow Puppets. Tom Rowley, le guitariste de Milburn et membre additionnel en tournée depuis 2018, co-signe avec Alex Turner les titres Mr Schwartz & Jet Skis On The Moat.
The Car est dans la lignée directe de TBH+C ; il se caractérise par une plus grande variation dans les instruments rock et une nouvelle dimension cinématographique avec son orchestration. Le manque de mélodies accrocheuses, de structures claires et de tempos rapides rend les premières écoutes déroutantes. De quoi diviser à nouveau les fans ! Paradoxalement le groupe est au sommet sa popularité. En 2023, 10 ans après la sortie de AM et avec deux albums controversés, le groupe donnera sa plus grande tournée jamais faite. Des stades dans le monde entier dont 2 Accor Arena déjà complètes à Paris. On peut donc s’interroger, voire s’inquiéter, sur la manière dont les prestations live vont intégrer ces nouveaux éléments. Vu le style actuel des Arctic Monkeys, on aurait plutôt misé sur des concerts dans des salles intimistes… En attendant, The Car se prête plus à une écoute sur vinyle accompagné d’un thé et de l’encens un dimanche pluvieux !
TRACKLIST :
There’d Better Be A Mirrorball
I Ain’t Quite Where I Think I Am
Sculptures Of Anything Goes
Jet Skis On The Moat
Body Paint
The Car
Big Ideas
Hello You
Mr Schwartz
Perfect Sense
LA NOTE DU RÉDACTEUR : 7/10
Ses morceaux favoris : Sculptures Of Anything Goes, I Ain’t Quite Where I Think I Am, Hello You
Les autres notes :
Fabien : 8/10. Préféré à son prédécesseur, et certes de qualité ; mais si éloigné de l’identité du groupe…
Brian : 7/10. La preuve qu’une ballade en voiture peut rester agréable sans drift. Cependant, le paysage manque un peu de diversité.
Adélaïde : 10/10. Une virée gainsbourienne et tarantinesque portée par des arrangements en dentelle et une rythmique magnétique, Arctic Monkeys au sommet de leur créativité.
Estelle : 7/10. Sympa, s’écoute bien au boulot, mais il me manque un petit quelque chose que je ne saurais pas expliquer !
Louison : 7/10. Jadis, quand le groupe voulait autant s’éloigner de son ADN, il créait des projets comme The Last Shadow Puppets. Ce virage à 180° est légitimement surprenant…
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