21 Juil Interview – Nxdia : « Je joue sur les contrastes pour ne pas m’ennuyer »
À l’occasion de son passage au festival Lollapalooza, Nxdia nous a accordé une interview dans laquelle iel évoque ses influences, son processus d’écriture et où iel se voit dans les prochaines années.
Révélée par son alt-pop intense et sans compromis, Nxdia est une artiste d’origine égyptienne qui a grandi à Manchester. À seulement 25 ans, iel s’impose déjà comme une voix singulière de la scène alternative britannique, entre hyperpop, textures R&B et éclats rock. Authentique, looké·e, engagé·e, iel séduit par sa capacité à dire les choses sans filtre et à créer un lien direct avec son public. De sa performance remarquée au BludFest de Yungblud à son passage sur l’Alternative Stage de Lollapalooza Paris, Nxdia incarne une nouvelle génération d’artistes libres, audacieux et profondément humains.
SOB : Ta musique puise sa force dans un mélange assez unique : hyperpop, textures R&B, parfois des sons plus bruts, alternatifs. Tu te souviens du moment où ce mélange est devenu une évidence pour toi ?
NXDIA : Tu sais quoi? Je mélange ma nourriture. Je mélange tout autour de moi. Je mélange tout le temps. Les couleurs, peu importe. J’aime tout, et je veux tout, tout de suite. Et ce besoin de gratification instantanée, il faut que je le suive et, heureusement, avec la musique c’est quelque chose de beau, ce moment où tu mélanges des choses. Tu obtiens du neuf, tu revisites de l’ancien, mais tu peux le faire à ta manière.
SOB : Tu fais justement partie d’une génération d’artistes qui refusent de faire semblant, qui disent la vérité, comme Yungblud, par exemple. Tu as d’ailleurs joué dans son festival. Avec cette volonté de créer un lien direct, presque brut, avec les gens, notamment les jeunes : est-ce que c’est difficile de toujours être honnête et de te dévoiler autant ?
NXDIA : Je pense qu’on ne peut pas le prévoir. On ne peut pas décider ce qui va toucher ou déranger les gens. En fait, quand je suis honnête, peu importe si la réaction est celle que j’espérais ou non, ça reste une réaction. Une réponse à quelque chose de tangible, de réel. Et ce que j’apprécie, c’est que ma mère me l’a martelé dans la tête : ne mens pas, sois toi-même, sois honnête. Et j’ai été pas mal harcelé·e pour ça. Mais c’était incroyable, parce que j’ai été obligé·e de m’habituer à être mal à l’aise autour de gens qui ne m’aimaient pas. Et une fois que j’ai été à l’aise avec ça… c’est fini. Tu peux rien me dire qu’un ado de 15 ans un peu méchant, ne m’a pas déjà balancé au lycée, tu vois ce que je veux dire ? Ce sera toujours dur d’être vulnérable, mais jamais d’une manière qui n’en vaille pas la peine.
SOB : Dans ton album I promise no one’s watching, j’ai remarqué qu’il y a plusieurs titres ou phrases autour du mot « boy » — comme boy clothes ou she likes a boy. C’est un motif qui revient souvent dans tes chansons. Tu peux m’en dire plus ?
NXDIA : Je pense que quand j’étais plus jeune, je voulais juste être super masculine. Je voulais être comme un garçon. Je me souviens que je jouais au foot et que je me moquais des filles. Je crois que je ne réalisais pas qu’on peut exprimer son genre comme on veut, sans avoir besoin d’y coller une grosse étiquette. J’étais probablement juste non-binaire, et je me disais : « J’aime le foot, donc je joue, donc je suis un garçon. » Et si t’aimes pas, bah je suis juste Nadia, je suis ce que je suis. Il n’y a pas forcément de raison. J’aime juste le mot « boy » . Il sonne super bien en chanson.
SOB : Tu sembles porter une grande attention aux contrastes, entre douceur et distorsion, entre clarté et saturation. Qu’est-ce que tu recherches dans ce déséquilibre ?
NXDIA : On est tous un peu de tout. Il y a des facettes différentes de soi-même. Il y a des gens avec qui tu es doux, d’autres avec qui tu es plus dur, et certains qui ne te connaissent pas du tout. J’aime les hauts et les bas, et je pense beaucoup au live : comment ça sonne sur scène, si ça redescend d’un coup, et puis ça remonte et ça te frappe. Je joue sur les contrastes pour ne pas m’ennuyer. Je me lasse tellement vite.
SOB : Ton écriture navigue souvent entre vulnérabilité et force. Est-ce que tu écris pour comprendre ce que tu ressens, pour affronter tes peurs ?
NXDIA : C’est comme quand un thérapeute te dit de tenir un journal. La moitié du temps, je suis là, complètement dépassé·e par quelque chose, et je me dis : « Merde, je peux penser à rien d’autre, je peux rien faire d’autre.«
SOB : Et ton processus d’écriture, il te vient facilement ?
NXDIA : Ça dépend. Certaines chansons sont plus dures à écrire parce que tu te dis : « J’ai déjà pensé à ça mille fois, comment je le dis en une seule phrase ? » Tu penses à un million de manières de l’exprimer. Et, parfois, tu arrives en studio et c’est LE jour parfait pour tout sortir. Tu écris exactement ce que tu avais en tête sans même savoir que tu en avais besoin. Et là tu te dis : Merci, putain, je comprends tout beaucoup mieux maintenant.
SOB : Tu écris seul·e, en général ?
NXDIA : Oui, la plupart du temps. Je suis un peu égoïste là-dessus. Parfois, il y a des producteurs dans la pièce, mais en général, j’écris seul·e. J’ai quelques personnes de confiance, comme Orlando pour l’écriture, ou Henry Tucker que j’adore. Mais en général, je suis toute seule.
SOB : Tu es à Lollapalooza aujourd’hui. Qu’est-ce que ça te fait d’être en France, dans un festival comme celui-là ? Est-ce que tu prévois une tournée ou une date à Paris ?
NXDIA : Je vais clairement revenir à Paris pour faire un concert, c’est sûr. Je suis tellement heureux·se d’être ici aujourd’hui. Je vais aller voir tous les artistes, je vais en profiter à fond. Je veux tout voir, j’ai trop hâte ! Ça va être incroyable ! Je suis conscient·e de la chance que j’ai d’être ici. Franchement je me dis : « Mais qu’est-ce qui se passe ? Je suis vraiment à Paris ? J’étais à Londres ce matin, c’est fou ! »
SOB : Si on se projette un peu dans l’avenir, où te vois-tu dans quelques années ? Est-ce que tu as un rêve un peu fou, ou une vision très précise de ce que tu veux représenter artistiquement ?
NXDIA : J’ai plein d’objectifs fous. J’ai tellement de rêves dingues. Je veux vraiment savoir faire des solos de guitare de malade sur scène, ce serait trop stylé. Je veux remplir des arenas. Tu vois cette vidéo de Rihanna qui court à Paris avec une foule immense autour d’elle ? C’est ce genre de moment que je visualise. Une foule comme ça, un vrai lien humain, tout le monde qui se tient, qui ressent tout ensemble. C’est ça mon rêve. Je trouve ça magnifique. Je veux tout ce qui peut m’amener à ça. Tout ce qui est rempli de gens. Je veux voir les gens, je veux les rencontrer, leur dire bonjour, leur faire un câlin. Leur dire merci en vrai. Ça me fait ma journée.
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