02 Déc Peter Doherty – Hamburg Demonstrations

Sept ans après Grace / Wastelands, l’ange maudit Peter Doherty revient au solo de manière tonitruante et poétique.

En sept années, il s’en est passé des choses pour Doherty. En 2013, il sortait Sequel To The Prequel avec les Babyshambles avant de raviver un chapitre éteint de la perfide Albion, les Libertines, avec une reformation et un album, Anthem For A Doomed Youth. A chaque fois, deux bons opus, des belles tournées. Mais il manquait quelque chose. Il manquait que Pete redevienne Peter. Et la nuance a toute son importance.

Avec Hamburg Demonstrations, le dandy maudit et dégingandé revient au solo, et il a beaucoup de choses à dire du haut de ses 37 ans. Suite parfaite de Grace / Wastelands, ce deuxième effort voit Doherty renouer avec un certain amour de la vie, notamment illustré par une nouvelle version de Flags of The Old Regime où le songwriter, en écho à la disparition de son amie Amy Winehouse, clame qu’il ne veut plus mourir ou du moins, pas autant qu’avant. D’Amy, il en sera également question avec Kolly Kibber dans lequel il raconte la destinée d’un homme traqué par la meute, mais aussi avec Birdcage, un morceau qui existe depuis quatre ans sous une forme demo et que Winehouse aurait écrite pour Peter. Ce dernier lui donne vie avec une rythmique à la guitare séduisante avec la voix de Suzi Martin pour le refrain.

Des fantômes comme des démons, ils en planent sur de nombreuses chansons chez Peter Doherty, à l’instar de Down For The Outing où le repenti s’excuse devant sa mère, parle d’Arcadie (un de ses thèmes récurrents, référence au paradis terrestre et terrain de jeu de nombreux poètes) et d’esprit torturé. Il chante également l’amour avec I Don’t Love Anyone (But You’re Not Just Anyone) ou parle du traumatisme des attentats de Paris et s’affiche plus véhément dans Hell to Pay at The Gate of Heaven où symboliquement, il pose la musique comme une arme de réponse à la terreur, en demandant à son auditoire de choisir entre J-45 (une guitare) et le AK-47.

Musicalement parlant, Peter Doherty croise à la fois la quintessence du rock qui a fait sa marque de fabrique, ses guitares grisantes comme celles du superbe Holly Kibber (qui ouvre l’album de manière magistrale) venant croiser un piano de saloon, et quelques envolées folkloriques comme avec Oily Boker ou She Is Far. Preuve d’une certaine inspiration, il proposera deux version différentes de son single-phare, I Don’t Love Anyone (But You’re Not Just Anyone), la première plus lente et langoureuse au violon, la seconde étant la version radio, une brillante réussite et composition.

Au final, Peter Doherty fait un retour en grâce avec Hamburg Demonstrations. Il prouve encore tout son brio en matière de songwriting, se posant en poète déchu mais désinhibé, un artiste torturé qui a mis derrière lui des années de déviance, et pose des mots très personnels sur des mélodies touchantes et le fait avec une intensité parfois bouleversante (Oily Boker). Il ne fait aucune doute que Doherty est un artiste à part sur la scène britannique. Un bad-boy à la réputation sulfureuse qui devient étonnamment un artiste passionnant et sensible lorsqu’il se lance en solo, dans une introspection salutaire en tout point – ce que Hamburg Demonstrations est assurément. On en finit presque par oublier le côté très produit de la chose (le travail de Johann Scherer qui a rajouté des musiciens aux enregistrements solo de Doherty à Hambourg), celui-là même que l’on perd sur scène pour retrouver toute la puissance de Doherty, entre chaos et passion.

Tracklisting :

1. Kolly Kibber
2. Down For The Outing
3. Birdcage
4. Hell To Pay At The Gates Of Heaven
5. Flags From The Old Regime
6. I Don’t Love Anyone (But You’re Not Just Anyone) v2
7. A Spy In The House Of Love (Demo Vocals)
8. Oily Boker
9. I Don’t Love Anyone (But You’re Not Just Anyone)
10. The Whole World Is Our Playground
11. She Is Far

Nos titres favoris : Holly Kibber, I Don’t Love Anyone (But You’re Not Just Anyone), Birdcage

LA NOTE : 8,5 / 10