19 Avr Heymoonshaker : Le duo se livre à nous
« Dès notre arrivée on nous a dit « Bienvenue ». Il y a vraiment un putain de respect. Merci beaucoup. »
Sound of Britain a profité du début de la tournée française du duo londonien Heymoonshaker pour aller à leur rencontre dans les locaux d’Ephelide durant leur passage par la capitale. Occasion pour nous de revenir sur ce groupe que nous vous présentions il y a peu grâce à leur EP « Shakerism » sorti le 18 mars dernier.
SOB : Que ce soit dans le choix du nom du groupe ou dans celui de votre premier EP « Shakerism » on retrouve cette idée de « shaker ». Pourquoi mettez-vous l’accent sur ce point?
Andy : Ah ah !
Dave : Ah ah ! Nous voulions garder toutes les idées autour et liées à Heymoonshaker. Après, comme dans tout label, tout est formaté.
Andy : Ah oui ! Ce que Dave veut dire c’est qu’il faut passer par tous les noms inimaginables avant de trouver le bon : « Shake the Moon » euh… « hey… I’m good shake moon to… », « Hey ! Moon ! »
Dave : Je n’avais jamais donné de nom d’album auparavant et Andy voulait que ce soit sa petite amie qui s’en charge. (rires) On a du passé 15 minutes au téléphone avant de trouver. Je lui ai dit : « Trouve un nom d’album ». (Il nous mime une liste de noms ce qui fait rire Andy)
Andy : Donc on avait encore beaucoup de travail sur cet album.
Dave : Tout ce que nous créons se doit d’être lié à Heymonshaker, comme un groupe. Nous avons un Shaker Record, Production et distribution. Le « Shaker » est donc l’idée première qui sert de maison mère à Heymoonshaker.
Vous vous êtes rencontrés à Nelson en Nouvelle Zélande alors que vous êtes tous les deux anglais. Comment cela s’est-il produit?
Andy : Nous nous sommes rencontrés en… Attends que je me souvienne.
Dave : 2000…
Andy : 3
Dave : Possible ! (Il hésite) 7?
Andy : C’est ça, nous nous sommes rencontrés en 2007.
Dave : Je l’ai vu en premier ! A l’époque j’enseignais la plongée sous-marine en Nouvelle Zélande et je venais de commencer à faire plonger les gens. Du coup j’étais tout le temps stressé à l’idée de voir quelqu’un mourir.
Andy : En ce qui me concerne, j’étais trapéziste.
Dave : Oui ! J’étais tellement stressé que j’ai eu besoin de me rendre dans ce « putain » de cirque. Il se trouvait derrière un stand et j’ai entendu sa voix. Immédiatement j’ai reconnu son accent anglais. Deux semaines plus tard, j’ai quitté mon job et au même moment il s’est cassé la jambe droite.
Andy : Et comme il enseignait la plongée il avait beaucoup de souffle ! Du coup j’ai pensé que ça pourrait être une bonne idée qu’il commence le Beat Boxing. Maintenant il peut garder sa respiration pendant un certain temps. (Andy prend sa respiration et nous fait une démonstration de Beat Boxing)
Vous avez joué à travers les rues de nombreuses capitales. J’imagine que chaque ville réagit différemment à votre art. Comment avez-vous ressenti cela?
Dave : Curieusement, quelque soit la ville on ressent toujours quelque chose de différent, vraiment. Nous vendons la même quantité de CD dans chaque ville. Dans les grandes villes … (Andy le coupe et prend un accent américain)
Andy : Ils vont adorer le Beat Box ! (rires)
Ensemble : « Everybody love Beat Box ! »
Dave : Lorsque l’on va dans les plus grandes villes il y a toujours quelqu’un, et ce quelque soit le pays et la ville. Quand je fais une performance ou quand nous jouons, nous gagnons de l’argent et vendons relativement le même nombre de CD. En Norvège ça c’est passé un peu différemment. Mais on a continué à jouer. Il y a moins de gens et tout le monde est heureux de se trouver là. C’est vraiment agréable.
Avez-vous déjà eus des problèmes lors de ces prestations?
Dave : Oui, ça arrive de temps en temps, des gens ivres qui tentent de voler nos CD pendant qu’on essaie de jouer. Un jour il y a un mec de 65 ans qui a commencé du break dance en se roulant sur le sol. A ce moment là t’as juste envie de dire « fuck off ». Nous avons aussi été arrêté par la police à Venise. Ils ont pris nos affaires pendant une semaine et nous ne pouvions plus jouer. Et bien sûr il y a le temps comme en Angleterre où nous ne pouvions pas travailler de 11h à 19h pendant une semaine à cause de la pluie. Tu es obligé de rester enfermé chez toi sans pouvoir faire la manche. Juste condamné à fumer des cigarettes à ta fenêtre. Mais quand il fait beau ça en vaut le coup ! On ne peut pas faire ce genre de chose lorsque l’on a un « emploi normal ».
Aujourd’hui vous avez la chance de pouvoir vous produire sur scène. Quel effet cela fait-il de passer de la rue à la scène.
Andy : Hum… Je dirais qu’il y a plus de personnes mais surtout que ce sont des gens qui apprécient notre musique. C’est tout aussi agréable de pouvoir jouer devant une foule plutôt que devant des gens saouls qui cherchent à tout prix à faire de la break dance devant toi.
Dave : Pour moi la différence et que j’aime le moment ou tu peux attirer l’attention de quelqu’un dans la rue pour le rendre vraiment heureux. C’est vraiment spécial… Par contre quand tu es dans un groupe tu as les réseaux sociaux et tout ce qu’englobe internet, les interviews,… Les gens peuvent comprendre ton histoire, vont commencer à s’intéresser pour apprendre à te connaître et construire un lien. Après ils viennent à un concert et il suffit de deux minutes pour commencer à devenir amis car nous pouvons montrer ce que nous voulons vraiment. Dans les rues il faut parvenir à garder l’attention des gens sur soi pendant quinze minutes et cela prend un certain temps pour créer un lien car ils sont souvent sur le point de faire quelque chose ou d’aller quelque part. Parfois on arrive à créer ce lien avec quelqu’un dans la rue mais ce n’est pas fréquent.
Pour votre tournée, est ce les salles qui ont pris contact avec vous, ou avez vous effectué vous même les démarches, et dans ce dernier cas pourquoi ce choix de lieu ?
Andy : Les salles de concert. Nous travaillons avec Peter Prod donc c’est eux qui font tous les arrangements !
Dave : Nous avons commencé à venir jouer dans des petits bars en France car les concerts y sont gratuits, tout comme les lits et la nourriture. Nous ne pouvions que rester. C’était vraiment difficile pour nous de rester en Suède, alors que nous n’avions rien à payer en France, ce qui nous a permis de vraiment en profiter. Dès notre arrivée on nous a dit « Bienvenue » (Il tend les bras en disant le mot en français.). Il y a vraiment un putain de respect. Merci beaucoup. Après quoi nous avons décidé de rester en France et d’y prendre nos quartiers ainsi que d’y passer plus de temps car c’est exactement l’endroit qu’il nous faut. Et c’était vraiment une bonne idée.
Dave, alors que tes influences sont plutôt du côté de la dubstep, comment as-tu eu envie de monter ce projet avec Andy?
Dave : Mon influence provient du dubstep… (Il soupire) Honnêtement, ce n’est pas comme un DJ. La première fois que j’ai entendu Skrillex je me suis intéressé à lui mais je connaissais ce courant avant. J’ai beaucoup aimé ce qu’il fait. Aujourd’hui il est relativement célèbre et je préfère écouter ce qu’il faisait avant. C’était une façon nouvelle et passionnante de faire de la musique du coup j’ai fais des recherches là-dessus et je suis tombé sur un autre Beat Boxeur qui se consacre uniquement à la dubstep. J’ai retrouvé le style que je voulais utiliser dans ce qu’il faisait donc il a été une réelle source d’inspiration pour moi. Seulement lui. Du vrai dupstep. Et pour répondre à ta deuxième question, quand nous avons commencé à mêler le Beat Boxing à la guitare ça sonnait vraiment bien donc nous avons continué.
J’ai vu que tu avais fait une apparition dans une émission de télé-croché (Britains Got Talent ndlr) en Angleterre. Que t’as apporté cette expérience?
Dave : Dans l’ensemble ça a été une mauvaise expérience. On été des milliers de personnes présentes pour la même chose et ça a été vraiment très rapide comme la sonnerie d’une cloche (il imite le son). En plus, on ne nous respecte pas comme des artistes. J’ai vraiment tout fait pour mais nous ne sommes que des marionnettes que l’on manipule pour parfaire leur programme.
Andy : Comme des personnages.
Dave : C’est ça ! Lorsqu’ils m’ont posé des questions et que j’ai répondu que je venais d’une bonne famille sans problèmes ils ont arrêté de me filmer car je n’ai pas dit « Oui, ma mère me battait ! ». Il n’y avait rien à boire. Rien à manger. Le thé coûtait deux livres et j’ai dû attendre 9h à trois reprises pour ne passer finalement que deux fois. Voilà tout… Si tu veux mon avis, on est entouré de personnes qui sont là pour te tirer vers le bas. Ils éliminent la célébrité. Finalement j’ai tenté parce que j’avais réellement besoin d’un coup de main pour montrer mon talent de Beat Boxer. J’ai simplement saisi cette chance de faire connaitre l’art du Beat Box aux téléspectateurs plutôt que d’avoir à le faire dans la rue. Je ne savais pas ce que je voulais faire. J’étais jeune, j’avais 19 ans à l’époque et ce fut une expérience très négative dans l’ensemble. Cependant, j’ai pu comprendre grâce à ça ce que je voulais. J’y ai goûté et c’était horrible. En tout cas cette putain de vidéo a eu du succès, un impact incroyable et m’a permis de me faire connaître de nouvelles personnes (vidéo ci-dessous avec plus de 9 millions de vues). Et quand nous avons commencé à travailler ensemble avec Andy j’ai ressenti une certaine tranquillité car il me donnait son avis.
Passage Dave Crowe à l’émission Britain’s Got Talent :
Andy on connait peu de choses sur toi par rapport à Dave et pourtant tu as sorti un album l’année dernière.
Andy : Yes ! (murmure)
Comptes-tu poursuivre cette carrière solo ou Heymoonshaker te suffit-il à présent?
(Dave se rapproche du visage d’Andy et le fixe droit dans les yeux)
Andy : C’est vraiment très rare de trouver quelqu’un avec qui vous pouvez passer beaucoup de temps entre amis tout en partageant la même passion. Un jour, Dave n’a pas pu se rendre à l’enregistrement d’une émission radio et j’ai dû me débrouiller seul. C’était vraiment moins amusant sans lui.
Dave : Quand on est ensemble et que notre train est annulé, 6h peuvent passer sans que l’on ne s’en rende compte car nous nous partageons de bonnes idées. Selon moi, son travail solo me paraît intéressant au sens ou il a vraiment eu de très bonnes idées avec Andy Balcon band. Et ce genre de choses c’est ce que j’ai envie d’entendre pour pouvoir faire ma part de création par la suite. Andy a commencé en sortant son album et même s’il avait vendu 6 CD on s’en fout, ce n’est pas ce qui nous importe.
Andy : On aurait aussi pu dire 100 millions ou quelque chose comme ça ! (rires)
Dave : Pour tout dire, on fait 50-50 sur les parts. Même si nous avons à nous séparer, nous continuerons à toujours tout partager, et c’est mieux comme ça. Par exemple, pour « London Part 2 » nous avons fait valoir nos droits et maintenant si quelqu’un veut l’utiliser on répond que le morceau nous appartient. C’était vraiment une bonne idée d’y avoir eu recours.
Andy : Et en même temps nous avons déposé nos droits sur nos morceaux écris pendant ces six dernières années.
On sent une grande influence blues dans tes morceaux, pourquoi s’être tourné vers ce genre musical plutôt qu’un autre?
Andy : Le Rock’n’Roll c’est vraiment quelque chose de spécifique. Il vient du blues, qui lui-même vient d’Afrique et a été exporté jusqu’en Amérique ou les blancs se sont servis des chants d’esclaves pour se faire de l’argent.
Dave : Les blancs ne connaissaient rien à cette musique ! Ils ne pouvaient pas comprendre. Il n’y a que les vrais musiciens qui peuvent ressentir quelque chose et avoir cette capacité technique. C’est une musique vraiment incroyable ! Elle est ce que nous sommes, ce que nous créons et ce que nous écoutons. Les Africains avaient leur histoire à écrire. Quand 40 mecs sont enchaînés avec des pioches dans les mains à frapper le sol, ils chantent et la musique devient tout bonnement incroyable. Donnez-leur une guitare et tout va mieux. Nous avons un réel respect pour cette musique ancienne et primitive.
Andy : Jack White s’est servis de leurs chansons pour son label.* Les vieux musiciens blues venaient enregistrer gratuitement leurs morceaux pour des labels qui sortaient des vinyles par la suite pour se faire de l’argent sur les ventes sans donner le moindre sous aux musiciens parce que « ce n’était pas nécessaire ». Comme ils n’avaient pas de soutien financier pour les commercialiser eux-mêmes les labels en ont profité. Jack White fait comme ces hommes blancs et il le fait bien.
Dave : T’es un enfoiré Jack White ! Pourrais-tu faire ce qu’il a fait? Il se fait juste de l’argent sur le dos de ces personnes qui ne possèdent aucun droits et maintenant il est en train de fermer les portes à ses amis et connaissances. C’est malheureux de tomber aussi bas. Il se croit supérieur et il ne se sent plus pisser ! « He rock baby ! He rock ! » (rires)
On peut aussi entendre un saxophone dans tes morceaux solos. Y aurait-il possibilité d’accorder une place à cet instrument avec Heymoonshaker par la suite?
Andy : Oui. Heymoonshaker veut faire intervenir autant de musiciens que possible. De temps en temps Danny, un joueur de cithare parisien vient se joindre à nous quand nous nous y produisons. Mais jouer avec des musiciens est différent de ce que nous faisons lorsque nous sommes que tous les deux sur scène.
Ils interviennent comme des guests?
Andy: Oui ! Enfin… nous ne les considérons pas vraiment comme tel.
Dave : En Angleterre nous avons terminé notre tournée à 7 sur scène, seulement en ramassant des musiciens sur notre chemin en leur disant : « On joue une heure Andy et moi, puis une autre avec tout le monde. » Personne ne nous a jamais demandé de jouer une heure de plus. On nous disait : « Nous ne vous paierons pas plus !« , ce à quoi on répondait: « On en a rien à faire de ton argent mec ! On veut juste que tu nous laisses jouer une heure de plus ! »
Andy : Et tout le monde a été payé !
Dave : Tout le monde ! Donc oui nous sommes prêts à accueillir des musiciens avec nous. En ce qui concerne l’enregistrement du prochain album peut-être que nous explorerons ça. Et pourquoi pas même faire appel à un orchestre à l’avenir?
Andy : Vers le haut Johnny ! Nous devons aller vers le sommet ! (rires)
Que diriez-vous à ceux qui ne vous connaisse pas encore pour qu’ils aient envie de vous découvrir?
Dave : Nous avons ce que vous voulez !… Non, je vais changer : Nous avons ce dont vous avez besoin ! (Andy le reprend) Et même si nous n’avons pas ce dont vous avez besoin, nous avons ce qu’il vous faut alors venez voir par vous-même ! Nous sommes de gentils garçons et nous faisons de la bonne musique. Nos concerts sont souvent abordables voir gratuits. C’est ce que nous faisons de mieux en tant que musiciens.
Andy : Laissez-nous jouer dès maintenant et amusez-vous !
Pour finir, un petit pour vos fans français?
Ensemble : On vous aime !
Dave : Vraiment, vraiment beaucoup ! C’est beau d’être accueilli par un pays qui vous ouvre les bras. Nous avons une relation spéciale avec la France.
Petit rappel des prochaines dates de leur tournée :
19 avril : Luna Negra (Caveau des Augustins à Bayonne)
20 avril : Salle des Merveilles – Gignac
27 avril : Printemps de Bourges (Bourges)
7 mai : L’Autre Canal (Nancy)
29 mai: Divan du Monde (Paris)
31 mai : Le Carré (Perpignan)
* Jack White ressort en vinyle toutes les légendes du blues des années 20-30 grâce à Document Records à qui il rachète les droits afin de pouvoir les sortir sous son propre label Third Man Records.
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