05 Juil Montreux Jazz Festival : Sinéad O’Connor enchante le Stravinski
Votre correspondante SoundOfBrit n’a pas pu s’empêcher de verser quelques larmes face à la sincérité désarmante de l’artiste irlandaise.
Il est environ 19 heures lorsque votre correspondante Sound Of Brit arrive à Montreux. Nous sommes samedi soir et il fait très chaud. L’organisation du festival a pris quelques mesures anti-chaleur assez minimes : les visiteurs peuvent demander de l’eau gratuitement aux bars, tandis que des vendeurs de bouteilles d’eau à prix correct se déplacent le long de la promenade au bord du lac Léman. Même si les transports publics sont gratuits en ville, il n’y a toujours pas de forfaits spéciaux concernant les trains. Cela pourrait s’expliquer par le choix des sponsors principaux du Montreux Jazz Festival, parmi lesquels se trouvent la chaîne de stations-service Socar et la marque de voitures Jeep ; encourager l’utilisation des transports publics ne fait probablement pas partie de leur politique…
Après avoir dévoré vite fait une portion de frites, votre fidèle reporter entre dans le célèbre Auditorium Stravinski. La climatisation est salvatrice, et à peine ai-je le temps de boire un verre que la légendaire Sinéad O’Connor monte sur scène. Elle nous salue timidement mais de manière sympathique avant de commencer son set, accompagnée de ses musiciens : une guitariste (avec laquelle Sinéad parle espagnol !), une bassiste, un pianiste et les deux frères Ken et Carl Papenfus du groupe Relish à la batterie et à la guitare soliste. Son groupe semble varié au niveau de l’âge et du background de ses membres, ce qui donne de la fraîcheur aux chansons. Il faut dire que Sinéad O’Connor n’est plus toute jeune, tout comme la majorité des spectateurs présents, venus parfois en famille. Rassurez-vous cependant, on aperçoit aussi quelques compatriotes âgés entre 20 et 30 ans parsemés au compte-goutte dans les premiers rangs de la fosse.
Vêtue simplement d’un jean, d’une chemise à carreaux et de lunettes de soleil, la chanteuse n’est visiblement pas là pour impressionner. Pourtant, dès qu’elle commence à chanter, on est instantanément ébloui ; sa voix est toujours aussi puissante et captivante qu’il y a vingt ans. Un peu nerveuse mais passionnée, Sinéad n’hésite pas à prendre des envolées vocales impressionnantes. Son guitariste n’est pas en reste, et l’accompagne avec des solos parfois bluesy, parfois rock’n’roll. Il y aura aussi une partie du concert où la musicienne sera seule sur scène avec sa guitare, interprétant plusieurs chansons dont une belle version de Black Boys On Mopeds. Franche et drôle, elle n’hésite pas à demander à son ingénieur du son de régler le volume de sa guitare tout en jouant, ou même à lui demander si tout va bien (« Tu ne crois pas qu’il y a quelque chose qui sonne bizarre ? »). On entendra un espèce de talkie-walkie à la fin d’une chanson : « What the fuck was that ? It sounded like a police siren ».
Peu importe la chanson, elle met sa voix à nu. Sinéad O’Connor est une artiste capable de toucher n’importe qui, y compris votre correspondante qui a dû se retenir de pleurer à maintes reprises. Ses mains tremblent parfois, par exemple lorsqu’elle interprète I Am Stretched On Your Grave en duo minimaliste avec son batteur. Le public est respectueux, écoutant religieusement les chanson en dansant un peu avant de laisser éclater un tonnerre d’applaudissements lorsqu’elles se terminent. Cela semble convenir à Sinéad, d’abord surprise, puis soulagée en entendant les encouragements déchaînés. Du coup, nous aurons droit à des moments magiques lorsque l’artiste chantera a capella. Lorsqu’elle enlèvera ses lunettes, révélant des yeux humides, elle nous dira que c’est à cause d’une infection oculaire : « Can someone bring me a tissue ? I look like I’m snorting cocaïne » (Quelqu’un peut-il m’apporter un mouchoir ? On dirait que j’ai sniffé de la cocaïne). Elle oublie de commencer à chanter lors d’une chanson, ayant un flash de réalisation : ils sont à « fucking Montreux ».
Sinéad O’Connor dédicace sa chanson I Had A Baby à son fils Shane et nous annonce qu’elle est grand-mère depuis peu. Ravie de la présence d’enfants dans la salle, elle leur dédiera également deux chansons. La famille, autrefois source de tristesse et de conflits pour l’artiste, est devenue sa force. Toujours fragile à cause de ses luttes personnelles mais désormais en paix avec elle-même, son héritage et ses émotions sont parvenus jusqu’au public. Elle nous offrira également un mélange de hits comme No Man’s Woman, The Emperor’s New Clothes, Take Me To Church, Thank You For Hearing Me et tant d’autres. Par contre, nous n’aurons pas droit à sa légendaire reprise de Nothing Compares 2 U. À la place, Sinéad O’Connor nous chantera une sorte de berceuse-prière a capella qui terminera à merveille ce concert magique.
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