Souveraineté électronique, Blanck Mass s’abat sur le Point FMR

Des ténèbres jaillit la lumière. Blanck Mass venait défendre sur scène le surréaliste World Eater pour un live époustouflant et sonique. Récit.

C’est à 21h35 précises que Benjamin John Power AKA Blanck Mass débarque sur scène, devant une foule clairsemée n’osant risquer quelques applaudissements. Une entrée tiède, qui se comprend: nous ne sommes pas là pour l’homme derrière la machine, mais pour la machine elle-même, ce mur de son ravageur que sait construire avec brio la moitié de Fuck Buttons. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que sur ce point, la performance n’aura pas été décevante. 

Dès les premiers instants, c’est l’apocalypse. Violents larsens et trucages sonores embrayent instantanément sur de titanesques rythmes électroniques dévastateurs qui écrasent tout. D’abord étrangement isolé, le son prend peu à peu toute son ampleur et englobe l’intégralité de la foule; et tant pis pour ceux qui auraient eu la mauvaise idée de ne pas s’équiper de bouchons d’oreilles. Le monstrueux The Rat ne laisse pas insensible, malgré un évident défaut: le manque de jeux de lumières, empêchant de créer une ambiance permettant de parfaitement rentrer dans l’esprit de ce set. 

Mais cette déconvenue n’arrête pas l’homme derrière les impressionnantes platines. Est lancé un Rhesus Negative surpuissant, tandis que sont projetées en arrière-plan de cryptiques images convoquant tant le champ lexical du cauchemar que celui de l’immatériel. Défilent gélatines informes, insectes grouillants, silhouettes grotesques et autres effrayants visuels; au service d’une musique qui ne pardonne rien à personne, et qui ne laisse que peu de temps pour souffler. Car si un morceau de Blanck Mass semble s’adoucir, c’est pour mieux nous surprendre en balançant un beat implacable dans la seconde qui suit. 

Véritable guerrier de l’ombre, silencieux mais implacable, sir Power, en pleine possession de ses moyens, pioche habilement dans sa discographie pour faire étalage de ses capacités, avec évidemment World Eater en ambassadeur tout trouvé. Entre diverses complexes manipulations soniques, le musicien s’époumone dans un microphone entièrement voué à la distorsion; et c’est à la grande surprise du public que la tête d’affiche n’hésite pas à prendre les devants de la scène pour éructer dans un tonnerre de décibels. Si les jeux de lumière se sont montrés absents, Blanck Mass aura lui tout donné pour laisser quelques implacables souvenirs à son public. 

Ce set en 3 mots? Court mais intense. Tandis que passent Dead Silence et l’irrésistible single Please, la fin se fait sentir. The Great Confuso Pt. 2 vient fermer la marche, dramatique, théâtral, splendide. Et alors que tout semble se calmer, que le paysage s’apaise, les mélodies se liquéfiant doucement mais sûrement, Blanck Mass envoie une ultime vague électronique tétanisante visant à achever l’audience. Les visuels, eux, quittent tout territoire perceptible pour virer dans un abstrait total, arborant un aspect stellaire convoquant les visions futuristes de 2001 L’Odyssée de l’Espace au sein du Point FMR. Et dans un ultime cri de l’âme, le musicien se retire, en saluant sobrement. Et c’est en attendant l’allumage des lumières que l’impensable se produit. 

Un rappel non prévu. Un retour non-anticipé. Sous les cris et applaudissements d’une foule conquise par cette incroyable conclusion, et aors que les ingés sons s’apprêtent à tout couper, Blanck Mass revient sur scène pour un dernier tour de force. Modelant les sonorités pour leur donner une allure évoquant tant l’industriel que le sauvage, Benjamin John Power fait encore une fois étalage de ses prouesses et nous quitte cette fois sur une déflagration, comme pour mieux s’amuser avec nous. S’emparant de son microphone, l’artiste esquisse quelques propos s’égarant totalement dans la distorsion, donc on extrait péniblement quelques mots de remerciements chaleureux. Blanck Mass quitte la scène, et c’est cette fois bel et bien fini. 

1h10, il n’en fallait pas plus à sir Power pour réaliser un brillant étalage de sa maestria électronique. Là où le concert a pêché en ambiance, faute de lumières aux abonnés absents, il fut rattrapé par ses fulgurances sonores, son évident plaisir communicatif et surtout sa fausse conclusion, véritable catharsis aux allures cinématographiques qui restera longtemps dans les esprits. Un très grand cru qui à n’en pas douter divisera, sans laisser insensible. 

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Blanck Mass @ Point FMR (09/05/2017)

The Rat

Rhesus Negative

Dead Format

Silent Treatment

Please

The Great Confuso Pt. 2

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