13 Juin La comète Thom Yorke s’écrase à l’Olympia
Échappé de son groupe phare, le grand manitou Thom Yorke a mené la danse pour un Olympia plein à craquer… Et l’émotion était au rendez-vous
Non pas curieux de découvrir ce que le violoncelliste londonien Oliver Coates avait à nous proposer en première partie de soirée, difficile de tenir en place, rien qu’en voyant pour la première fois le nom « Thom Yorke » inscrit sur la célèbre devanture de l’Olympia.
Si ce curieux set instrumental de Coates nous a scotché, c’est surtout pour son approche si subversive de l’instrument. Boucles, amplification, saturation… le violoncelle se dénature et se réinvente. Réservé mais sûr de lui, le garçon à la casquette ouvre grand les portants à la tête d’affiche, puisque l’ambiance est, dès lors, inhabituelle. Elle nage dans l’expérimentation.
À 21h15, la lumière se tamise et la salle accueille majestueusement Thom Yorke, accompagné de son ami de toujours et producteur Nigel Godrich ainsi que de l’artiste visuel hollandais Tariq Barri. Les trois musiciens enchaînent sans un mot une poignée de morceaux issus des deux albums solo de Yorke. « Interference », « Brain in the Bottle », le plus connu « Black Swan »… « This is fucked up » mais c’est certain, nous voilà propulsés dans le vortex Yorkien.
En fond de scène, des projections futuristes et multicolores baignent sur les immenses écrans, apportant une dimension visuelle totalement époustouflante. Si bien qu’on ne veut pas en louper une miette ; alors on contemple, éberlués, cette prestation venue d’un autre monde. On ne sait pas trop comment réagir, si ce n’est tomber en transe. Thom Yorke vogue sur la scène, alternant les instruments, de la gratte aux platines.
Et là-dessus, on ne peut plus être surpris, le musicien a toujours été friand de l’électronique, et cela s’est toujours d’autant plus ressenti sur ses nombreux projets – Radiohead et Atoms for Peace – qui se déstructurent au fil des âges. À ce propos, Yorke privilégie naturellement son répertoire solo, si ce n’est des morceaux « Amok » et « Atoms for Peace », deux perles rares et réjouissantes. Mais le roi de la soirée, c’est bien le dernier album (sorti en 2014, mine de rien), « Tomorrow’s Modern Boxes », avec les interprétations crépusculaires de « Truth Ray » et « Pink Section », que la formation prend plaisir à allonger. Entre « The Clock » et « Twist », Thom York se lâche, en effectuant ses fameux pas de danse et en se remuant comme un serpent, son micro du bout des doigts. Sa voix, qui ne cède jamais, demeure son instrument le plus impressionnant. Il sample, démultiplie ses vocalises ; Yorke cultive ici son génie, s’aliène lui-même.
En près d’1h50 de concert, Thom Yorke et ses acolytes auront le temps d’offrir deux rappels ; le premier se clôturant sur le puissant et inoubliable « Default », d’Atoms for Peace. Mais c’est bien l’épilogue, ou les cinq dernières minutes du set, qui chamboulera nos coeurs : « je dédicace ce morceau à mon groupe », glisse Thom Yorke au micro, alors qu’il se met à l’aise face à son clavier. Seul sur scène, le musicien interprète une magnifique version de « Glass Eyes » de Radiohead, sous fond étoilé. Là, c’est sûr, on nage dans le cosmos, on voudrait presque ne jamais en sortir (c’est dire que le groupe nous manque beaucoup). Ému, Yorke dérape sur une note; « oh shit ». La salle implose de joie, face à tant d’humilité. Il continue, délie les dernières notes de piano, pour finalement se prosterner face aux applaudissements, puis s’éclipser…pour de bon.
Aucun doute, Thom Yorke est devenu l’icône d’une scène protéiforme : au-délà de Radiohead, on se souviendra de lui comme un incroyable musicien et parolier. Tout ça, sans avoir un seul « hit », une seule facilité. Pour preuve, l’Olympia n’a pas beaucoup chanté ce soir-là (difficile de connaître ses paroles). Mais voilà, c’est pour mieux entretenir cette fascinante catharsis.
Setlist – Thom Yorke @ Olympia
Interference
A Brain in a Bottle
Impossible Knots
Black Swan
I Am a Very Rude Person
Pink Section
Nose Grows Some
Cymbal Rush
The Clock
Two Feet Off the Ground
Amok
Not the News
Truth Ray
Traffic
Twist
Rappel :
The Axe
Atoms for Peace
Default
Rappel 2 :
Glass Eyes
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