Coldplay – Music of the Spheres

Deux ans après Everyday Life, qui avait unanimement suscité la surprise tant parmi les adeptes que les non-fans, le groupe de Chris Martin revient avec un neuvième opus. Alors, doit-on s’attendre à un renouveau ou à un retour aux vieilles habitudes?
Retrouvez l’avis de deux de nos rédacteurs, Mathilde et Samuel.

L’avis de Mathilde

Une chose est sûre, Coldplay ne déroge pas ici à sa réputation de groupe de stade. Album conceptuel autour de l’espace (propulsé par un énorme coup de com’ avec l’écoute en avant-première de leur premier single par Thomas Pesquet) Music of the Spheres se veut épique, trop sans doute.

La construction de la tracklist colle avec ce désir de grandeur : alternance d’interludes instrumentaux (Music of the Spheres, Alien Spheres, Music of the Spheres II), de « gros tubes » catchy et de morceaux plus longs, nous rappelant la recette magique qui a fait le succès du Absolution de Muse en 2003. Mais là où ce dernier nous transportait dans les étoiles, Music of the Spheres se contente d’être timidement planant par moments.

Outre lesdites interludes, très agréables, l’album est globalement un condensé de ce qui a été reproché au groupe par ses détracteurs : accompagnements pompeux et lyrics (trop) pleins de bons sentiments. Les exemples les plus frappants restent Humankind et Infinity Sign, hymnes à arénas sur fond de foule en délire. My Universe, immense tube en feat avec les BTS, reste dans la même veine, tout en étant plus efficace. Le duo avec Selena Gomez (Let Somebody Go), lui, est plutôt appréciable : les voix se mélangent bien, même si le morceau reste quelque peu ennuyeux. Biutyful, en revanche, arrive comme un cheveux au milieu de la soupe avec son auto-tune qui nous rappelle les heures sombres du nightcore.

Quelques bonnes surprises ressortent néanmoins du lot : les chœurs de Human Heart constituent une jolie pause entre deux tubes tandis que People of the Pride nous propose un rythme puissant et accrocheur. L’album se conclut par le très réussi Coloratura, longue et hypnotique production de dix minutes.

Que retenir de Music of the Spheres, donc ? De la déception avant tout : Coldplay est capable de bien mieux et nous l’a déjà prouvé avec ses premières productions. Le ressenti final est mitigé, avec ce sentiment que le groupe est resté coincé dans une écriture adolescente qui ne colle plus à son âge. Le sentiment est d’autant plus rageant car ce neuvième effort est ponctué de très bons moments. Encore une fois, la scission entre passionnés et haters ne fera que s’agrandir ; et c’est quelque part ce qui constitue l’ADN d’un des groupes les plus clivants de ces deux dernières décennies.

L’avis de Samuel

En 2019, avec Everyday Life, Coldplay avait surpris avec un double album audacieux, qui élargissait (enfin) le champ des possibles, assez restreint depuis le chapitre bouleversant et très personnel au chanteur Chris Martin, Ghost Stories (2014). Un album plus organique et cosmopolite mais qui n’a pas eu le succès espéré et qui, avec du recul, s’est avéré assez « bâtard » (si on peut employer le mot) : joliment produit, parsemé de moments forts, mais trop peu abouti dans une seconde partie hasardeuse, nous laissant un peu affamé. Malgré tout, l’effort du groupe, qui a voulu cette fois-ci rester les pieds ancrés sur Terre, fut à saluer. Un chapitre qui n’a pas privilégié d’aucune tournée, Coldplay voulant revoir les données de celle-ci pour revenir plus éduqué vis-à-vis de la situation climatique alarmante, poids de plus en plus lourd sur nos consciences.

Finalement, il n’aura fallu que deux petites années pour que le groupe revienne en force, presque rajeuni, étrangement même, comme si l’épisode précédent n’avait que peu existé. Non, ne vous attendez pas à un essai répliqué de Music for Airports de Brian Eno ou du projet Music for Plants : autrement appelé Plantasia du producteur Mort Garson, qui a chamboulé la fin des années 70. Coldplay reste Coldplay, l’expérimentation se fait à petites doses. Sur le plans des sonorités, Music of the Spheres remet les compteurs à fond pour le groupe de pop le plus en vogue des deux dernières décennies.

Je ne vais pas m’éterniser sur les divers éléments évoqués dans la critique, déjà bien fournie, de ma consœur, à lire ci-dessus. Force est de constater que Coldplay est, depuis la sortie de Mylo Xyloto en 2011 (déjà !), un groupe ultra populaire mais qui ne fait plus l’unanimité. La preuve en est : Music of the Spheres semble à nouveau diviser. A mon sens, le groupe repart dans les travers qu’il empreinte depuis une bonne décennie : une musique trop électronique, aux arrangements moins recherchés. Cependant, cette nouvelle machine à tubes est redoutable (là où Everyday Life, par exemple, faillissait de manière assez admirable, en proposant des titres plus exigeants), même si je pose un doute sur « My Universe », enregistré avec BTS, qui manque selon moi d’une alchimie difficilement explicable.
Le groupe respecte le cahier des charges en enchaînant les refrains accrocheurs, qui feront mouche à la prochaine tournée des stades, d’autant plus supportés par une scénographie qui, sans doute, nous en mettra pleins les yeux. Là est le point positif que je ne peux enlever au projet ; c’est à nouveau un blockbuster fédérateur, un shot de sérotonine, un moment réjouissant.

Dans l’absolu, Music of the Spheres ne propose pas grand chose de neuf : « Let Somebody Go », avec Selena Gomez, me fait écho à « Fun », qui figure sur A Head Full of Dreams (2015), « Byutiful » me rappelle vaguement « Army of One » sur le même disque, avec la même modulation vocale de « Cry Cry Cry », sur Everyday Life. Mais ce qui révèle comme un goût de déjà vu fait en réalité partie, désormais, de l’ADN de Coldplay : un groupe qui s’érige comme « ange gardien » de la pop sur un monde à la dérive, qui revient, tous les deux à trois ans, les bras chargés d’un gros cadeau bien emballé, nous emmener dans son univers multicolore et explosif. Dans l’absolu, il n’y a aucun mal à ça, d’autant plus que ces 41 minutes passent à la vitesse de la lumière (tiens tiens…). Coldplay continue de produire cette musique connectée au monde, au-dessus des nuages. A t-on vraiment attendu autre chose de la bande à Martin depuis l’éminent Viva La Vida ? Pas sûr.

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Coldplay a par ailleurs annoncé une tournée mondiale et se produira deux soirs de suite au Stade de France en 2022 (pour les intéressés, une listening party en présence du groupe aura lieu sur le compte Twitter Tim’s Listening Party ce mardi 19 octobre).

TRACKLIST :

Music of the Spheres

Higher Power

Humankind

Alien Choir

Let Somebody Go (feat. Selena Gomez)

Human Heart (feat. We are King et Jacob Collier)

People of the Pride

Biutyful

Music of the Spheres II

My Universe (feat. BTS)

Infinity Sign

Coloratura

Les notes des rédacteurs :
Mathilde : 4/10
Samuel : 7/10

Leurs morceaux favoris : Alien Choir, People of the Pride, Coloratura

Les autres notes :
Fabien : 7/10. Plusieurs bons titres à en tirer.
Augustin : 5/10. Un album commercial qui ne tient pas ses promesses de renouveau.

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