Will Joseph Cook

Interview – Will Joseph Cook et l’importance de chérir les bons moments

Will Joseph Cook a répondu à nos questions avant son concert en première partie de Declan McKenna à l’Elysée Montmartre.

Sound of Brit : Tout d’abord, comment vas-tu ?
Will Joseph Cook : Je vais bien, j’ai beaucoup couru aujourd’hui. On a essayé de faire des activités touristiques parce que je n’ai pas été à Paris depuis plusieurs années. Mais peut-être que nous aurions dû juste venir dans la salle de concert pour se préparer.

SOB : Vous étiez à Montmartre juste à côté ?
WJC : Oui, on a aussi vu la Tour Eiffel. On a pris des trottinettes électriques. Une Idée stupide. On était autour de l’Arc de Triomphe en trottinettes, je me disais “c’est stupide”. La vraie expérience française.


SOB : La tournée vient de commencer, vous étiez à Nantes hier, comment c’était ?
WJC : C’était super. C’était mon premier concert français. Je n’avais aucune attente et hier c’était une foule très mignonne, tout le monde avait l’air sympa.


SOB : Comment tu te sens à l’idée de faire une tournée avec quasiment que des dates complètes ?
WJC : Pour moi c’est assez relaxant. J’ai joué des concerts il y a quelques années, quand j’avais 19 ans. Je suis venu et j’ai fait quelques concerts en Europe, et ils étaient loin d’être complets. Quand c’est une pièce remplie de personnes, tu sais à peu près à quoi t’attendre, comment jouer, c’est une ambiance, il n’y a pas à s’inquiéter. Plus la salle est grande, moins je suis stressé.


SOB : Donc si demain tu joues dans un stade tu ne seras pas stressé ?
WJC : Pas du tout. C’est un peu bizarre. Plus c’est grand, plus je me déconnecte du fait qu’il y ait des individus. Tu ne peux pas vraiment voir, c’est comme jouer pour s’amuser. Tu vois ton groupe et c’est tout.


SOB : Est-ce que cette tournée est une manière pour toi de tester tes prochaines chansons qui sortiront le mois prochain ? [Every Single Thing, le troisième album de Will Joseph Cook, sort le 20 juin]
WJC : Oui. A vrai dire j’ai une chanson qui sort demain, BOP. Je la joue ce soir. Je suis excité à l’idée de dire « Si vous l’aimez, vous pouvez littéralement l’écouter demain ». Mais c’est principalement des choses du nouvel album et des chansons qui sont déjà sorties. Quelques personnes les connaissaient à Nantes, c’était très cool, j’avais des personnes au premier rang qui chantaient en chœur.


SOB : En parlant de ton prochain album Every Single Thing, il ne contient que des chansons d’amour, c’est bien ça ?
WJC : Oui, c’est autour de l’amour, mais toutes les chansons ne sont pas des demandes en mariage. 


SOB : Dans l’univers anxiogène dans lequel on évolue depuis quelques années, c’est un choix conscient pour toi de rester optimiste dans tes chansons et de répandre de l’amour, ou ça te vient naturellement ?
WJC : Ça me vient naturellement. J’ai écrit des chansons plus emo, mais pour moi, personnellement, je sais ce que mon projet est. Je ne suis pas une personne extraordinairement joyeuse, je ne suis pas un gars bizarre qui est là : « Tout va super bien ! ». Mais pour moi, c’est important quand quelque chose incroyable arrive, ou que je me sens vraiment joyeux, j’en suis reconnaissant. Ces moments sont vraiment rares, donc j’essaie de me concentrer dessus. Les attraper c’est comme tenir un poisson, c’est difficile de les saisir. Donc j’aime les garder, les peindre pour que chacun et chacune puisse les regarder et se dire « je me souviens ce que ça fait ». Quand les gens écoutent ma musique, je veux qu’ils ressentent cette joie. C’est comme ça que je vois la chose. Quand notre humeur change, on a tendance à aller vers la musique pour ça ou pour exprimer quelque chose. Je ne pense pas que les gens devraient écouter ma musique seulement quand ils se sentent bien, c’est aussi là quand tu te sens comme de la merde, pour aller un peu mieux.


SOB : Donc ton inspiration vient de situations de la vie quotidienne ? Des moments dont tu veux te souvenir comme ayant eu lieu et ayant été importants ?
WJC : Oui, sur cet album c’est ça. C’est très autobiographique. Il a une esthétique très optimiste, mais il y a aussi quelques chansons très tristes selon moi, ou du moins une chanson qui fait un peu mal, mais ça reste des émotions importantes à capturer. Il y a une chanson qui s’appelle Today Is Raining. Pendant la pandémie, ma copine est tombée très malade, on ne savait pas ce qui s’était passé, et elle a été emmenée à l’hôpital, on n’avait pas le droit de rentrer et son téléphone allait s’éteindre. J’ai un peu perdu contact avec elle et je ne savais pas si elle est en vie. Donc il y a une chanson que j’ai écrite pour elle et je lui ai envoyée quand elle se remettait. Ensuite, il y a une autre chanson, The Feels, qui est sur le fait de tourner la page sur une rupture, mais des années après. Quand on se sépare de quelqu’un, souvent c’est un flot d’émotions, de colère, et toutes ces choses négatives. Pour aller de l’avant, on a besoin de ne pas parler à cette personne pendant longtemps, et c’est comme ça qu’on va mieux. Mais il y a aussi, profond en soi, peut-être ce désir de clôturer totalement cette relation, et toutes ces choses qu’on a avait besoin de dire l’un à l’autre, on ne l’a jamais fait. C’est à moitié basé sur ma vie, et à moitié sur le film Blue Jay qui relate une situation semblable. C’est un couple qui a été ensemble et elle trouve une lettre qu’il lui a écrit sans jamais l’envoyer. J’ai trouvé que c’était une image très puissante, les choses qu’on n’a jamais envoyées, qu’on n’a jamais dites, et ensuite, avoir la possibilité de les dire. Cette chanson est comme cette lettre, « voici toutes les choses que je voulais dire, maintenant je peux les dire, on n’est plus ensemble ».


SOB : Ton album a été conçu au Royaume-Uni, et aussi au Mexique et à Los Angeles. Tu vis au Royaume-Uni, et ton producteur et ton co-auteur à Los Angeles. Mais comment ça se fait que vous soyez allés au Mexique ?
WJC : Ça a l’air arbitraire, mais ça ne l’ai pas. J’ai une chanson de mon dernier album qui a bien marché au Mexique. J’y suis retourné il y a quelques mois, en Novembre, pour jouer au Corona Capital Festival. Il y avait quelque chose qui se passait là-bas en 2020 et je n’ai jamais pu en profiter, donc je voulais y aller. J’ai fait un peu de promo, mais aussi – probablement la raison principale – je ne pouvais pas entrer aux Etats-Unis. J’imagine que si tu étais Français c’était ok, mais si tu venais du Royaume-Uni, de Chine ou d’Afrique du Sud, tu devais être autre part pendant au moins deux semaines [avant de rentrer aux Etats-Unis]. C’est stupide, mais bon. Donc je me suis dit « Le Mexique est près de la Californie, donc retrouvons-nous au Mexique pour deux semaines et ensuite on ira le terminer ». Je pense que c’était le destin, parce que j’ai écrit ces chansons en Angleterre, je les ai emmenées au Mexique, on a fait la pré-production, on a emmené un studio dans nos valises, on s’est installé dans un Airbnb et on a travaillé dans un appartement, ensuite on les a terminées dans le home-studio de Matt [Parad]. Ça a permis de donner des étapes, et il était ensuite terminé en cinq semaines.

SOB : Est-ce que cette façon de faire a impacté l’album ?
WJC : Pour sûr. C’est le projet que j’ai préféré faire pour l’instant. C’est une opportunité d’avoir une équipe et une fanbase autour de toi qui veut un album, puis partir cinq semaines et revenir avec un album. Je n’avais jamais eu cette opportunité. Mes albums précédents étaient plutôt ma sélection de ce que j’avais écrit les deux années précédentes. Quant à celui-ci, c’est plus « De quoi ai-je envie de parler ? » Ces dix chansons marchent ensemble. Quand tu fais quelque chose d’un seul jet, comme celui-ci, ça sonne comme un album. Si tu le fais en deux ans, ça sonne comme quelque chose qui a été fait sur deux ans. Sans vouloir manquer de respect à mon album précédent.


SOB : Ton premier album est sorti sur Atlantic Records, et depuis ils sortent sur ton propre label Bad Hotel. Qu’est-ce que ça fait d’être celui qui prend les décisions, mais aussi les risques ?
WJC : C’est comme deux faces d’une même pièce. C’est incroyable quand je parle avec d’autres artistes de leurs problèmes avec les labels. J’ai quand même besoin d’avoir certaines conversations, je travaille avec d’autres gens, ce n’est pas que moi dans ma chambre imaginant des combines avec des images accrochées partout. J’ai un éditeur et des choses qui fonctionnent comme un label. Mais en terme de direction artistique, c’est incroyable, parce que je peux juste dire « Voici ce le projet, voici la vidéo, voici le visuel » et personne ne va le critiquer ou essayer de faire partie du process, c’est juste des collaborations sur la sortie, sur le marketing et des choses comme ça. Je ne pense pas que ce soit facile à faire en tant que nouvel artiste, parce que tu ne sais pas encore comment ça marche, et je continue d’apprendre. Mais quand tu as une idée de comment un label fonctionne, tu te dis « Oh, je peux le faire ». C’est super. Quand quelque chose marche, c’est tellement mieux, parce que tu te dis « Oh mon Dieu, c’est moi qui ai fait ça ». Ce sont des montagnes-russes émotionnelles, je mets tellement de moi dans la chose. Ça donne plus de place à la réussite, et plus de place à l’échec.


SOB : Tu sembles garder les mêmes personnes autour de toi par contre. Tu travailles avec Matt Parad et Eric Radloff [producteur et co-auteur] et Bertie Gilbert [réalisateur]. A quel point c’est important pour toi d’avoir une équipe qui suit ton parcours artistique ?
WJC : Ça te permet de faire les meilleures choses. C’est quelque chose que j’aime sur le fait d’être indépendant. Je pense que les labels ont besoin de sentir qu’ils font quelque chose, donc ils vont te dire « tu devrais travailler avec ce nouveau réalisateur dans la vague », plutôt que de se dire « tu es sur un chemin artistique, et ces relations sont importantes ». Tu peux presque parler avec des abréviations. Quand je produis avec Matt, je dis « Est-ce que tu peux… » et il a déjà fait ce à quoi je pensais. Et littéralement, quand je pense à des idées de clips avec Bertie, on dit en même temps les mêmes choses. Je pense que c’est bon pour moi. Ma musique et mes clips sont plus personnels, je suis naturel. Je pense que si quelqu’un ne me comprend pas parce qu’il n’a pas assez traîné avec moi, alors quelque chose va manquer. Je serai plus ouvert à d’autres collaborations dans le futur, mais là où j’étais ces deux dernières années, c’était important pour moi de prendre confiance à travers ces relations et de trouver ce que je suis vraiment. Une fois que tu sais qui tu es, tu peux travailler avec n’importe qui.


SOB : Est-ce qu’il y a des artistes avec qui tu aimerais collaborer ?
WJC : Je suis assez ouvert. J’aime quand c’est inattendu. Tout me semble inattendu quand ça arrive. Là où je serai entraîné. J’aimerais bien faire des versions duos de certaines chansons sur l’album après qu’il soit sorti, pour avoir des nouvelles versions. Mais les faire bien. Sur mon dernier album j’avais une chanson, Be Around Me, qui avait une version en duo. Au lieu de donner un couplet, on a prit les paroles et on les a ré-imaginées en dialogue. J’ai un peu écrit cette chanson comme une conversation, avec deux personnes qui se répondent, donc c’était parfait pour ça. Il y a quelques chansons pareilles sur cet album. Parfois c’est plus simple d’écrire une situation en n’entendant pas uniquement ton point de vue. Ou parfois, un deuxième personnage peut être utile pour dire quelque chose que je n’ai pas envie de dire. C’est un concept avec lequel j’aime bien jouer.

SOB : Un peu comme un film.
WJC : Oui, je déteste le mot, mais « théâtral », deux voix rendent l’histoire plus vivante. La plupart du temps, les gens ne remarquent pas qu’il y a deux dialogues, seulement s’ils font bien attention. Donc le rendre évident avec deux voix, je trouve ça amusant.


On va se quitter et tu ne vas pas tarder à monter sur scène. Est-ce que tu as des rituels particuliers ?
WJC : J’ai un échauffement vocal assez particulier où je chante avec ma langue sortie pour l’étirer. Je n’ai jamais vu quelqu’un d’autre le faire, mais ça marche. Je fais ça habituellement, et je mange une banane. Je ne mange pas vraiment avant de monter sur scène, donc la banane est l’en-cas parfait.

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