Massive Attack plus puissants que jamais aux Nuits de Fourvière

Pour fêter leurs 30 ans de carrière, les ambitieux Massive Attack se sont lancés dans une tournée européenne. 1er arrêt français: les nuits de Fourvière… Récit.

Ce n’est pas parce que Massive Attack n’ont pas sorti d’album depuis l’inoubliable Heligoland en 2013 que Robert « 3D » Del Naja et Grant « Daddy G » Marshall se privent de sillonner les routes; pas moins de 5 passages français cet été, rien que ça. Intimiste, le cadre de l’amphithéâtre de Fourvière était somptueux pour cette première date française estivale.

Mais avant de retrouver Massive Attack, ce sont les inénarrables Young Fathers qui ouvrent pour le duo de Bristol; une habitude depuis maintenant plusieurs années, les groupes s’admirant et collaborant fréquemment ensemble. Montent donc sur scène Alloysious Massaqoi, Kayus Bankole et « G » Hastings, accompagnés d’un percussionniste, prêts à défendre leur récent Cocoa Sugar.

Pendant près de 45 minutes, c’est un mélange audacieux de trip-hop, d’électro et de rythmes tribaux qui viennent secouer l’amphithéâtre. Refusant de se contenter d’une simple case, la performance des Young Fathers vire sans cesse du chaos à l’harmonie, du guttural au sublime, avec une intensité et une puissance forçant l’admiration. De What a Time To Be Alive à In My View, de Get Up à Toy, sans oublier la puissante conclusion Shame, le trio fait feux de tous bois, soutenu par un percussionniste aux irrésistibles pas de danse. La formation s’éclipsera en ayant lâché quelques rares mots; il n’y en avait pas besoin, tant leur musique suffisait à captiver, dérouter et épater.

C’est donc à 22h, et face à un amphithéâtre rempli, que les héros de la soirée montent sur scène. Armée de claviers, 2 batteries, guitare et basse, nombreux micros: le setup de Massive Attack est prêt à accueillir les nombreux collaborateurs ayant bâti au fil des années la réputation de la formation, à commencer par l’incontournable Horace Andy. La délicate Hymn Of the Big Wheel ouvre ce set, avec une délicatesse et une beauté suspendues.

Le set de la formation de Bristol ne cessera d’osciller entre lumière et ténèbres. Risingson, single du culte Mezzanine, nous propose une virée hallucinée à la limite de l’angoisse, tandis que la frénétique b-side United Snakes nous emporte avec sa cinétique rythmique. Le groupe accueille sur scène Azekel le temps d’un Ritual Spirit hantant, et Horace Andy revient pour interpréter un Girl I Love You terrassant.

La température redescend avec l’ambiante Eurochild, rescapée de Protection; mais c’est sans compter sur Future Proof, ouverture du mésestimé 100th Window, qui vient délivrer un pont surréaliste, intense et fracassant, se prolongeant jusqu’à la rupture pour finalement conclure sur une délicate note. Sir Del Naja en profite alors pour inviter « le meilleur groupe du monde » sur scène, Young Fathers, pour Voodoo In My Blood, extrait de leur « récent » EP The Spoils, et Way Up Here, hypnotique inédit.

Difficile de parler de Massive Attack en live sans parler des visuels du groupe. En plus d’une armada de jeux de lumières, la formation dispose d’un écran géant ne se contentant pas de s’illuminer d’esthétiques façons. Éminemment politique, la formation se sert de ce médium pour aborder de nombreux sujets: le sort des migrants, la politique du pays, les idéologies, le sens de la vie, nos rapports à la technologie, les conflits armés, le but de l’être humain au cours de son existence, … Si le tout manque parfois un peu de finesse (à l’image d’un Banksy, tiens donc…), la scénographie de Massive Attack vient nous remémorer le contexte socio-politique actuel, allant même jusqu’à reprendre des titres d’actualité, basculant progressivement vers l’information la plus futile imaginable. Le point d’orgue? Ces photos d’enfants, face caméra, recouverts par l’évidente phrase « Nous sommes tous dans le même bateau ». Simple et puissant.

Triplé inimitable: le groupe reçoit la plus grosse réaction de la soirée au moment de lancer un dévastateur Angel qui ne peut qu’épater, suivi d’un vénéneux Inertia Creeps et de l’évidence quasi-rock de Safe From Harm et sa ligne de basse, soutenue dans une conclusion prolongée qui donne d’inévitables frissons. Les musiciens prennent deux petites minutes de pause avant de revenir sur scène.

Take It There, autre extrait de The Spoils, vient ouvrir ce rappel, manquant cependant d’un peu de puissance pour tout à fait convaincre. Qu’à cela ne tienne; Del Naja s’éclipse pour la seule et unique fois de la soirée pour laisser Daddy G et ses musiciens lancer un superbe Unfinished Sympathy, lumineux et éclatant. En guise d’épilogue, la formation se réunit au complet une ultime fois pour un Splitting the Atom captivant, clôturant le set du groupe. Et comme il est de tradition à Fourvière, le ciel se remplit bien vite d’une pluie de coussins verts s’abattant sur la scène, déclenchant une bataille à laquelle tous les musiciens prennent un malin plaisir à participer. La scène presque entièrement recouverte, le groupe s’éclipse finalement, pour de bon.

Quel anniversaire. 30 ans après leurs débuts, Massive Attack continuent de surprendre avec un set épatant, tant techniquement que musicalement. Allant droit au but (1h30 de set, seulement 1 morceau de Protection et de 100th Window), le duo livre une sorte de concert best-of ne perdant jamais rien de son intensité et de sa splendeur, affichant frontalement une modernité à toute épreuve. Encore à ce jour, le groupe de Bristol reste le maître de sa catégorie; gageons qu’il le restera encore pour les années à venir.

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Massive Attack @ Nuits de Fourvière (01/07/2018)

Hymn Of the Big Wheel

Risingson

United Snakes

Ritual Spirit

Girl I Love You

Eurochild

Future Proof

Voodoo In My Blood

Way Up Here

Angel

Inertia Creeps

Safe From Harm

Take It There

Unfinished Sympathy

Splitting the Atom

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