Gorillaz – Song Machine, Season One: Strange Timez

Septième album du projet virtuel emmené par Damon Albarn et Jamie Hewlett.

28 janvier. Sur les réseaux sociaux de Gorillaz, un mystérieux teaser est dévoilé, un mois après la mise en ligne de leur dernier documentaire. 2 jours après, les rumeurs se confirment : le premier des huit singles (oui oui, huit) est publié. Aujourd’hui, 23 octobre, est donc enfin venue la sortie de ce nouvel effort du groupe. Verdict.

Strange Timez, avec le grand Robert Smith, a la lourde responsabilité d’ouvrir cette nouvelle page de l’aventure Gorillaz. Et dès le début, une cohérence évidente : qui d’autre que le leader des Cure pour un titre intitulé ainsi ? On entre directement dans un univers mêlant l’obscurité de Smith et la pop désordonnée d’Albarn.

On poursuit avec un autre gros poisson : Beck. Le multi-instrumentiste américain se montre plus que convaincant sur The Valley of The Pagans. Le choix de ne pas avoir désigné ce duo avec l’auteur du tube Loser comme single étonne : pourquoi celui avec Octavian et non celui-ci ? Ce genre de petits détails n’étonnent même plus avec ce sacré Damon

Voici désormais un nom qui ne parle pas forcément : Leee John. Et pourtant, la voix vous dit forcément quelque chose… En effet, il s’agit du chanteur du mythique groupe Imagination. Pour The Lost Chord, les deux londoniens offrent un superbe titre, et une belle liberté d’expression à une guitare et des synthés envoûtants.

A l’arrivée du quatrième titre, vous vous demandez sûrement où sont les rappeurs et rappeuses, qui ont fait la force de Gorillaz. Voici voici ! Pour vous servir, on ne fait pas dans la dentelle : ScHoolboy Q pose sa voix sur Pac-Man. La recette fonctionne parfaitement, et instrumentale et paroles sont en osmose. On regretterait presque que cela se termine si vite !

On n’arrête plus les gros featurings, à croire que personne ne refuse les propositions de Damon Albarn. C’est au tour de St Vincent, première représentante féminine, d’entrer en piste pour Chalk Tablet Towers. En chantant à l’unisson, les deux musiciens offrent un mariage éphémère terriblement bien trouvé.

Qui, aujourd’hui, peut se vanter d’avoir mêlé le grand Elton John avec un rappeur typique de notre époque, en la personne de 6LACK ? Comme une bonne poignée de mains entre les artistes d’hier et ceux d’aujourd’hui, The Pink Phantom permet à Gorillaz de réunir deux univers différents, et presque de les réconcilier : tous les publics y trouvent leur compte.

Elle fut une de nos chansons favorites durant ce confinement. Aries continue de faire rencontrer les époques, avec le bassiste Peter Hook, et la si peu médiatisée Georgia. Avec son instrument fétiche, l’ancien membre de Joy Division et de New Order s’impose, et s’emboîte dans l’électro-pop de la londonienne que l’on ne saurait trop vous recommander.

Gorillaz, c’est également depuis toujours des découvertes, de la mise en avant de jeunes artistes à qui l’on promet un avenir radieux. Octavian est de ceux-là, lui qui s’offre le luxe d’être le seul featuring sur Friday 13th. Le rappeur franco-anglais aux références solides (The Blaze, Theophilus London…) est irréprochable sur ce morceau, subliment clôturé par le piano de Damon.

Que serait un album de Gorillaz sans ses surprises ? On a toujours connu un côté mystérieux au projet, et les choix artistiques des membres ont toujours su alimenter cette idée. Avec Dead Butterflies, l’étonnement est grand : on découvre une certaine Roxani Arias, qui il faut l’admettre est très discrète sur Internet. Une belle rencontre, aux côtés du peu connu en France Kano, auteur de six albums rap très intéressants.

Damon Albarn et la musique malienne, c’est une grande histoire d’amour. Pas étonnant donc de voir une de ses plus grandes représentantes, en la personne de Fatoumata Diawara, présente sur cet album. Pour Désolé, le londonien se risque dans la langue de Molière pour notre plus grand plaisir chez SOB. Comme un soleil en cet automne pluvieux, les cuivres réchauffent nos cœurs le temps d’un instant.

Passons au premier single de Song Machine. En associant slowthai et Slaves, autant dire que Gorillaz ne voulait pas faire dans la dentelle. Et c’est une réussite : Momentary Bliss donne la pêche, fait bouger les têtes, offrant un cocktail punk/rock/rap explosif. On se réjouit d’autant plus de voir que Laurie et Isaac ont eu leur mot à dire sur l’instrumentale.

Le rap est à nouveau mis à l’honneur, par le biais de l’invitation de EARTHGANG pour poser sur Opium. Bien que le groupe ne soit des plus populaires, on ne peut qu’admettre qu’Albarn a eu du flair pour ce morceau. Évoquant les temps actuels difficiles et notamment le confinement, tous trouvent ici un lieu d’expression, magnifiquement porté à son terme par un solo de piano si agréable.

Les percussions africaines s’invitent alors sur Simplicity, en très bonne compagnie en la personne de Joan As Police Woman. Emmenée par Joan Wasser, les références sont nombreuses : Lou Reed, Jeff Buckley, Nick Cave, Dave Gahan… Un titre à l’image de son intitulé, qui offre un cadre reposant qui n’est pas de refus.

Voici venir un titre très très attendu. Nous avons là de très bons musiciens studios rassemblés, à savoir GoldLink et Unknown Mortal Orchestra. Malheureusement, on reste un peu sur notre fin. Les espoirs étaient grands pour Severed Head, mais il arrive même au(x) plus grand(s) de se tromper dans les rencontres entre artistes. La sauce n’a pas pris, mais qu’importe !

La musique africaine est une nouvelle fois mise à l’honneur sur With Love To An Ex. En l’espèce, c’est en effet à Moonchild Sanelly de démontrer toute l’étendue de son potentiel. La sud-africaine est convaincante, et nous pousse à risquer de dire que nous n’avons pas fini d’entendre parler de cette artiste à l’univers qui devrait faire mouche en Europe et aux Etats-Unis notamment.

Gorillaz continue de nous faire découvrir la musique des quatre coins du monde, avec cette fois-ci le groupe Chai, en provenance du Japon. Associé au rappeur de Baltimore JPEGMafia, les quatre musiciennes nous donnent le sourire sur MLS. Le mélange des deux styles est très bien trouvé, offrant au dernier morceau qui arrive un cadre idéal pour clôturer cet album.

Comment choisir une autre place que celle-ci pour cette chanson si riche en émotions ? Dévoilée deux jours après la disparition de l’immense Tony Allen, How Far? s’appuie sur un rythme de ce si grand batteur dont lui seul a le secret. On retrouve également sa voix sur le morceau, telle une aura, pour s’achever sur son rire si atypique. Skepta a la lourde responsabilité d’y ajouter quelques mots, et y parvient sans se défiler.

Finalement, que retenir de ces 17 titres aux nombreux featurings ? Comme toujours, Damon Albarn parvient à faire un état des lieux de la musique actuelle, mêlant les genres et influences de tout bord. Ainsi, il offre à son compère Jamie Hewlett de grandes libertés, pour que celui-ci puisse exprimer tout son talent dans les clips, visuels, et promos du groupe. Alors oui, on peut admettre que cet album n’est pas parfait ; mais il est de nos jours une grande réussite et regorge de superbes morceaux. En espérant que ces derniers prennent vie sur scène dès 2021.

Strange Timez (Ft. Robert Smith)
The Valley of the Pagans (Ft. Beck)
The Lost Chord (Ft. Leee John)
Pac-Man (Ft. ScHoolboy Q)
Chalk Tablet Towers (Ft. St. Vincent)
The Pink Phantom (Ft. 6LACK & Elton John)
Aries (Ft. Georgia & Peter Hook)
Friday 13th (Ft. Octavian)
Dead Butterflies (Ft. Kano & Roxani Arias)
Désolé (Ft. Fatoumata Diawara)
Momentary Bliss (Ft. Slaves & slowthai)
Opium (Ft. EARTHGANG)
Simplicity (Ft. Joan As Police Woman)
Severed Head (Ft. GoldLink & Unknown Mortal Orchestra)
With Love to an Ex (Ft. Moonchild Sanelly)
MLS (Ft. CHAI & JPEGMAFIA
How Far? (Ft. Skepta & Tony Allen)

Nos morceaux favoris : The Lost Chord, Pac-Man, Chalk Tablet Towers, The Pink Phantom, Aries, MLS

LA NOTE : 7/10

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