25 Mar Ben Howard – Collections From The Whiteout
Ben Howard dévoile un quatrième album poétique et audacieux, porté par la production d’Aaron Dessner, fondateur du groupe The National.
Tout commence par une sensation. Pour Ben Howard, raconte t-il, ce fut celle ressentie sur les routes du Portugal alors qu’il écoutait Santa Agnes, titre de 17 minutes composé par le groupe People Collective, formé par Justin Vernon et Aaron Dessner. Il n’en fallait pas plus pour convaincre l’artiste, éternel rêveur en quête de sens, d’expérimenter. Celui qui voulait écrire un album-concept a été distrait, pour reprendre ses mots, et quitte à décevoir ses fans de la première heure, il ira où son esprit le mène.
Il faut dire que le chanteur originaire de Totnes s’est peu à peu éloigné des splendides mélodies qu’il composait à la guitare et qui ont notamment fait le succès de son premier album en 2011. Si I Forget Where We Were était un formidable essai bercé au rythme des guitares, et même parfois aux accents électroniques, son successeur Noonday Dream marquait déjà le passage vers une nouvelle ère, résolument portée vers une volonté -à moitié réfrénée- de faire autre chose, d’explorer un autre univers.
Au final, Ben Howard aura passé ces dix dernières années à tenter de casser cette image de surfeur et chanteur de folk qui aurait pu lui coller à la peau – même si ceux qui suivent l’artiste depuis ses débuts savent qu’il n’est pas qu’un simple chanteur de folk. Se séparer d’une partie de son entourage en 2017 fut un premier pas vers cette déconstruction, et faire face à ses démons, un second.
Ce n’est qu’une question de maturité. Si la musique de Ben Howard a toujours eu un formidable écho dans l’esprit de ses auditeurs, c’est justement car, tel un barde, l’artiste n’a eu de cesse de convier son auditoire au coeur de ses histoires et de son imagerie onirique (on se souviendra de la magnifique Black Flies). Utiliser des faits divers afin d’y attacher ses émotions, s’imaginer comme un personnage de ces histoires à la tendance éphémère, n’est finalement que la continuité de cette volonté d’imager un état d’esprit.
Ce nouvel album, construit au gré des errances est une compilation, ou une collection comme l’indique le titre, comme pour justifier ses contradictions et l’éparpillement de ses morceaux dans des tonalités différentes. Nous noterons l’exemple de Rookery, version studio d’Untitled, jouée en live mais n’ayant jamais fait partie d’un album, et dont l’annonce a provoqué l’émoi parmi les fans du chanteur.
En retrait, les guitares autrefois omniprésentes ont laissé placé aux séquenceurs, aux arrangements de Rob Moore ou encore aux battements jazz de Yussef Dayes. Inégal et confus cet album l’est certainement, au moins tout autant qu’il semble difficile à écouter et à appréhender. L’effort que cela demande est justement l’intérêt de cet album. Ce n’est pas la destination qui compte, c’est la route, pourrions-nous arguer.
Voilà un essai qui ne manquera pas de diviser les fans du chanteur, et qui n’a eu de cesse d’interroger le rédacteur de cette critique, fan de la première heure. Si la consommation de musique, toujours plus intense, a souvent fait passer l’artiste au second plan, Ben Howard perçoit davantage la musique comme un moyen d’explorer ses émotions. Le chanteur n’est plus le même que celui qui avait déchaîné les passions en 2011, et il souhaite qu’on le sache. Après de multiples écoutes, il semble difficile de ne pas rentrer dans ce monde froid, chaotique et parfois injuste, que Ben Howard dépeint avec un talent qui lui est propre.
“I’m a fast talker, quick walker, dreamer” conclut-il dans Buzzard, ultime titre de l’album, sans doute conscient qu’il ne convaincra pas à tout le monde. Et alors ?
Tracklist
Follies Fixture
What A Day
Crowhurst’s Meme
Finders Keepers
Far Out
Rookery
You Have Your Way
Sage That She Was Burning
Sorry Kid
Unfurling
Metaphysical Cantations
Make Arrangements
The Strange Last Flight of Richard Russell
Buzzard
Nos morceaux favoris : Follies Fixture, What a Day, Crowhurst’s Meme, Sage That She Was Burning, The Strange Last Flight of Richard Russell
LA NOTE DU RÉDACTEUR : 7 / 10
Les autres notes :
Fabien : 4/10. Rien de bien transcendant.
Augustin : 4,5/10. Légèrement mieux que Noonday Dream, à écouter en fond sonore.
Audrey : 5/10. Un album très clivant.
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