Placebo

Placebo offre une performance glaciale au Trianon

Pour fêter la sortie de son nouvel album très attendu, après un silence de presque dix ans, Placebo frappe fort : une tournée intimiste, sans téléphone, réservée (en tous cas en France) aux fans ayant pré-commandé l’album.

5 jours, 5 dates : Paris, Berlin, Amsterdam, Bruxelles et Londres. On revient sur ce placebo de concert.

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C’est dans un Trianon bondé que le groupe monte sur scène en ce 23 mars. Les fans sont survoltés, certains attendent devant la salle depuis 5h du matin. Sans même saluer le public, Brian caché derrière des lunettes aux verres fumés, Placebo attaque directement son set avec Forever Chemicals. Induite par une boucle de harpe distordue et discordante, le titre démarre sur un lit de synthés et de guitares sinistres. S’en suit l’émouvant Beautiful James, sorti en décembre 2021, défenseur des relations non hétéronormatives, sur lequel Stefan Olsdal essaie de réveiller les premiers rangs en les invitant à applaudir en rythme.

Pas le temps de souffler que les musiciens enchainent avec Scene of The Crime, et Hugz, ayant choisi à l’évidence d’alterner tubes et nouveaux titres, laissant la foule perplexe, dans une ambiance assez hétérogène.

En partie inspiré de la mort de David Bowie, Happy Birthday in the Sky retentit, musicalement moins implacable que certains autres titres de Never Let Me Go, mais pas moins déchirant.

Retour dans le passé avec Speak in Tongues, puis le groupe poursuit avec l’anxiogène Surrounded by Spies, point culminant de l’album, qui traite efficacement des questions de surveillance, de confidentialité et de contrôle, chaque ligne légèrement déformée à moitié parlée non pas une fois, mais deux, sur des rythmes agités à la Radiohead.

Après le déprimant Blind et l’introspectif Went Missing, Molko manque une occasion de charmer les fans en enchainant sur un Protect Me (From What I Want) intégralement en anglais, avant de poursuivre avec le moins lugubre Try Better Next Time, semblant réveiller un peu la foule, qui se met à applaudir en rythme. Ce morceau est sans conteste l’un des plus réussis de la nouvelle tracklist.

For What It’s Worth achève de relancer le public, encouragé par Brian, mais ce souffle d’énergie retombe bien vite lorsque Stefan se met au piano pour le mélodieux Too Many Friends, qui forme une transition parfaite avec les thèmes abordés dans ce nouvel opus.

Sad White Reggae prend le relais, avec ses relents d’électro pop expérimentale du début des années 80, agrémenté du son palpitant de basse familier du groupe et de ses guitares enragées.

Les musiciens enchainent avec un des meilleurs titres de Never Let Me Go. Plutôt qu’un guide d’amélioration de soi, Fix Yourself est une instruction aux médias (sociaux et autres) pour essayer de dire aux gens quoi penser et comment vivre. Au-dessus d’une ligne de basse à six cordes, Molko chante avec lassitude « Go fuck yourself, don’t tell me how to feel, I am bored of your Caucasian Jesus” avant d’enchainer avec le refrain “Go fix yourself, instead of someone else.”  Ni commercial ni nostalgique, mais discrètement puissant, c’est la conclusion parfaite du premier album de Placebo en près d’une décennie, capturant parfaitement la douleur de notre monde mourant.

Brian et Stefan, accompagnés de leurs musiciens qui ne seront même pas présentés, s’éclipsent de scène avant de revenir pour un (court) rappel. Ils enchaînent sur le nostalgique Post Blue, avant de terminer platement le set sur Running Up That Hill (une reprise Kate Bush).

Après avoir vaguement salué son public au bout d’une heure et quart de show seulement, le groupe tire sa révérence pour la soirée.

Même si avec Never Let Me Go Placebo nous propose un de leurs albums les plus subtils et nuancés à ce jour, la chaleur et l’interaction ce soir ne sont pas au rendez-vous. Try Better Next Time.

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4 Comments
  • Kevin Burger
    Posted at 12:07h, 28 mars Répondre

    Malheureusement, Placebo en concert, c’est très souvent ça. Ou alors il faut calculer et se retrouver sur le concert qui sera filmé pour le « DVD ».
    Amnéville 2006 époque « Meds » (Pas trop mal, et je me disais que le côté « on parle pas trop » venait des dissonances avec Steve Hewitt)
    Strasbourg 2009 pour « Battle for the Sun » (là on se retrouve face à un Brian qui s’arrête en plein morceau pour engueuler le premier rang qui filme avec leurs téléphones).
    Bref, Placebo, je kiffe leurs albums mais je ne retournerai plus les voir en concert.

  • Mirco Mirco
    Posted at 21:14h, 28 mars Répondre

    Comme à Bercy pour l album précédent…ou comment decevoir a jamais une fan de toujours…

  • Jack
    Posted at 08:00h, 30 octobre Répondre

    Le 29 octobre 2022 à Zurich, je me suis demandé s’il y avait un problème, tant l’ambiance était glaciale. Ben grâce à vous je suis rassuré, c’était normal !

  • Sam
    Posted at 15:33h, 12 novembre Répondre

    Bon, ça me « rassure » aussi. Vus hier à Bercy et effectivement c’était dommage de voir aussi peu d’interactions avec le public et, surtout le manque de communication entre musiciens !
    Brian et Stefan étaient mis en avant de la scène, on voyait à peine les autres derrière, dans l’ombre la plupart du temps.
    Et ça se voit qu’il n’y a pas de connivence entre eux. C’est triste

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