Muse – Will of the People

Depuis Showbiz, leur premier album, le trio de Teignmouth a beaucoup évolué, que ce soit musicalement ou dans leur travail sur scène. Et c’est finalement tout ce que l’on peut souhaiter de mieux à des artistes : grandir, affiner ses sonorités, les diversifier pour créer le renouveau. Du rock garage au dubstep en passant par une symphonie en trois parties, on ne peut pas dénier à Muse une capacité de régénération immense. Mais au bout du neuvième album, Will of the People signerait-il l’épuisement des ressources créatives du groupe ?

We Are Fucking Fucked, dernier titre du disque, annonce l’intention derrière les nouveaux textes du trio. La subtilité lyrique et musicale des premiers albums est aussi complètement mise de côté, Will of the People se veut brut, direct, « immédiat ». Comme depuis ses débuts, Matthew Bellamy utilise des thèmes de science-fiction pour faire passer des messages politiques. On peut citer les thèmes spatiaux d’Origin of Symmetry, le contrôle des masses orwellien sur The Resistance, ou encore l’album concept Drones et ses messages antimilitaristes, contre le contrôle de la pensée et le côté déshumanisant de la guerre. Sur Will of the People, Bellamy continue à parler d’une rébellion du peuple contre un système qui l’oppresse, comme sur les titres Liberation ou sur la chanson-titre qui ouvre l’album, un hymne qui cherche à viser aussi bien les stades que les radios. Mais les titres sont lourds, écrits toujours au second degré, et les messages « politiques » ne visent jamais personne.

En écoutant le disque, on se demande plusieurs fois si Muse ne cherche pas à s’auto-parodier, tant les compositions semblent être un potpourri de tout ce que le groupe a pu proposer par le passé. Bellamy a décrit l’album comme un « greatest hits » de nouvelles chansons, suite à une demande de compilation par la Warner. Mais après la compilation Origin of Muse, et le remaster d’Origin of Symmetry sorti l’été dernier, le groupe propose peu de nouveautés et réutilise des gimmicks qui ont pu marcher par le passé sur presque tous les morceaux, de la ballade Verona qu’on verrait bien sur Black Holes and Revelations, au tube synthwave Compliance, ô combien kitsch. Les compositions rappellent souvent un autre morceau du catalogue du groupe, ou un autre artiste. Liberation transpire l’hommage à Queen, Won’t Stand Down associe un couplet pop-rock à la Imagine Dragons et un riff métal tiré de Slipknot, Euphoria croise les arpèges de claviers d’Origin of Symmetry avec un son motivant à la Blockades, du précédent Simulation Theory.

You Make Me Feel Like It’s Halloween, cinquième single sorti le même jour que les autres titres, qui semble être là uniquement pour viser un public jeune, et jouant avec l’imagerie des films d’horreur sans aucune créativité. Ce n’est pas la première fois que le groupe fait un album d’influences, cela semble être une formule depuis The Resistance. Mais la plupart des morceaux semblent être écrits pour viser un des divers, et souvent inconciliables publics du groupe, peut-être pour mettre tout le monde d’accord, avant une tournée intimiste de quelques dates en automne, et une date (complète) à la Salle Pleyel, puis une tournée des stades en 2023.

On reconnait à l’album des moments plus sincères, avec par exemple Ghosts (How Can I Move On), un piano-voix sur le deuil, mais chanté de façon très superficielle. L’album contient aussi une réussite, Kill Or Be Killed, qui arrive à réunir les meilleurs aspects du Muse post-The Resistance et les anciens, sur un morceau foutraque de 5 minutes, mais très efficace. On apprécie aussi We Are Fucking Fucked, conclusion voulue nanardesque mais assez fun qu’on imagine taillée pour le live. Mais après l’écoute de l’album, on reste sur sa faim et on sent l’inspiration qui manque, la créativité laisse au final sa place à l’auto-parodie et un cynisme calibré pour plaire, là ou Simulation Theory divisait mais représentait une volonté d’expérimentation. On ressort déçus sans retenir grand-chose de ce Muse qui cherche à faire plaisir à tout le monde sans se trouver lui-même, jamais trop bon ni trop mauvais. Allez, vous reprendrez bien une tournée des stades ?

TRACKLIST :

Will Of The People

Compliance

Liberation

Won’t Stand Down

Ghosts (How Can I Move On)

You Make Me Feel Like It’s Halloween

Kill Or Be Killed

Verona

Euphoria

We Are Fucking Fucked

La note de la rédactrice : 3.5/10

Ses morceaux favoris : Won’t Stand Down, Kill Or Be Killed

Les autres notes :
Fabien : 7,5/10. Beaucoup de déchet mais tout n’est pas à jeter, loin de là.
Claire : 5/10. Des éclats de brillance bien trop rares dans un album terne et sans originalité.
Augustin : 6/10. Un album avec un mixage sans relief et un ordre des titres plus que raté. Néanmoins ca s’ecoute bien et certains titres trouveront leur place dans les setlists du groupe

Tags:
2 Comments
  • Pierre B.
    Posted at 18:33h, 01 septembre Répondre

    J’aimerai bien vous entendre chanter Ghost de manière moins superficielle pour entendre ce que ça peut donner.

    Ce titre est une vraie claque a la charge émotionnelle importante !

    Je pense qu’on attend trop d’eux au bout de plus de 20 ans de carrière. Je n’ai pas souvenir d’un groupe capable de séduire autant un public si large album après album ni d’avoir autant de tubes qu’eux…

    Je n’oserai pas la comparaison mais le seul reproche à cet album, c’est qu’il manque malheureusement 2 titres supplémentaire et quelques minutes d’écoute.

  • effet larsen
    Posted at 14:20h, 23 mai Répondre

    Trop racoleur et boursouflé à mon goût.

Post A Comment