18 Nov Un Pitchfork Paris 2019 encore éblouissant
Cette nouvelle édition du Pitchfork Festival Paris a encore frappé fort à la Grande Halle de la Vilette. Retour sur un festival pleins de surprises.
VENDREDI :
Après un jeudi sous le signe de la musique urbaine, place à l’indie en cette Toussaint. Et pour cela, le Pitchfork a déployé quelques jolis noms au programme. Primal Scream, Squid ou encore Belle and Sebastian. De quoi passer une jolie soirée dans un Pitchfork remanié avec 2 nouvelles scènes, pour notre plus grand bonheur.
P4K<3, c’est la première chose que l’on voit affiché sur la Grande Halle de la Vilette pour ce deuxième jour de festival. Va-t-on l’aimer ce fameux P4K ? Réponse partielle ici. On commence en tout cas très bien avec, quasiment d’entrée, le set de Sons of Raphael. Sur la nouvelle scène du festival sobrement nommée la Petite Halle, le duo de vocalistes londonien offre un super set. Harmonies planantes et un son tout droit sorti des 70’s. Entre nostalgie et modernité, Sons of Raphael nous transporte dans un univers particulier mais terriblement accueillant qui fait de ce premier concert du jour un moment déjà fort.
Moins fort en revanche du côté de la Grande Halle avec Desire et son électro-pop kitsch. Très kitsch même. Les visuels sont multicolores et assez agressifs visuellement tout comme la voix de la leadeuse. On passe notre chemin rapidement.
On en profite pour visiter la nouvelle configuration du festival, bien plus intéressante que lors des précédentes éditions. Plus de scènes, plus d’espace aussi. C’est assez agréable.
Qui dit Indie dit forcément british. C’est donc au tour de Primal Scream et de Squid de monter sur scène. Un clash bien dommage puisqu’on tient d’un côté une légende et de l’autre une pépite très prometteuse. On est quand même attiré par les premiers accords de Movin’ On Up donc on rejoint la Grande Halle. Bobby Gillespie, tout de rose vêtu traverse la scène de droite à gauche avec des airs de Mick Jagger. Les visuels en fond de scène sont travaillés et le groupe semble prendre du plaisir à en voir les différents visages. Une audience bien calme profite cependant bien du concert. Les tubes sont là, tout le monde est content et une heure de set plus tard, on ne regrette pas notre choix, mais d’après nos sources Squid a aussi ravi le public parisien.
Nouveau changement d’ambiance avec Nilüfer Yanya. La londonienne aux origines barbadienne, turque ou encore irlandaise est assez attendu. Entourée d’une batterie et d’un guitariste, elle défend son premier album Miss Universe avec un talent dingue. A 23 ans, elle réussit à changer d’ambiance entre chaque morceau, d’une balade émotionnelle à un morceau à guitares distordues. Une aisance folle sur scène et une voix claire comme de l’eau de roche, voici la recette secrète que nous a concocté Nilüfer Yanya pour l’un des plus beaux moments de cette édition.
La suite de la soirée nous offrira la découverte américaine Sheer Mag. Un rock décoiffant mené par une chanteuse ultra dynamique. Très bon moment. Le retour de Chromatics était lui aussi très attendu. Les américains n’ont pas déçus.
Enfin, la soirée s’est terminé en beauté avec le set de Belle and Sebastian. Le groupe écossais n’est pas le plus dynamique sur scène et pourtant il va parvenir à faire bouger les milliers de personnes présentes sous la Grande Halle. 1 heure d’un set bien ficelé. Le groupe est talentueux sur scène et la multitude d’instruments rajoute une profondeur au son de la formation. La setlist se sert de toute la discographie du groupe. Jusqu’à la conclusion parfaite sur Le Pastie de La Bourgeoisie et une invasion de scène quasi improbable. La soirée est parfaite. Et pour les plus courageux elle se terminait au peu plus tard puisque John Talabot était encore à l’affiche après Belle and Sebastian, ce sera sans nous cette fois.
En tout cas, Pitchfork a mis l’indie à l’honneur et l’a fait de belle manière !
SAMEDI :
D’abord vint le rap, puis l’indie, et finalement la pop: récit d’une formidable 3ème soirée pour cette édition 2019 du Pichfork Paris.
C’est impatients que nous rentrons dans la Grande Halle de la Villette: en effet, nos chouchous The 1975, légèrement éclipsés à cette dernière édition du Lollapalooza Paris, sont de retour, pour leur première date headline française de festival qui plus est! Nous explorons un peu le site du festival, profondément modifié, passant de 2 à 4 scènes et bénéficiant de nouvelles installations de toute beauté. Les petits plats sont dans les grands, le public est présent: la soirée peut commencer.
C’est donc d’abord sur la toute nouvelle scène du Studio, aménagée en sous-sol, que nous découvrons la délicate folk de Jessica Pratt. Seulement accompagnée de sa guitare et d’un claviériste délicat, la musicienne suspend le temps l’espace de mesurés arrangements portés par son inimitable voix, comme venue directement des cieux, absolument angélique. La magie fait mouche, et on ressort enchantés par ce délicieux apéritif.
Mais l’heure est désormais à la pop, aussi alternative soit-elle; nous retrouvons ainsi Caroline Polachek, ex-Chairlift, en grande forme. Accompagnée d’un DJ/bassiste, la musicienne enchaîne les singles de son excellent premier album Pang, élevant chacun de ses titres avec une puissance vocale remarquable et sans l’ombre d’une fausse note. Le show est de plus sublimé par l’impressionnant lightshow de la scène de la Nef, créant un cocon nous invitant à nous plonger dans l’univers de madame Polachek. On peut simplement regretter le léger manque d’énergie du set, reposant sur quelques chorégraphies de la chanteuse; mais on ne se fait pas trop de soucis en pensant au concert qui nous attend juste après.
Le temps de pivoter vers la grande scène que d’impressionnantes notes électro-futuristes retentissent. « Are you fucking ready Paris« ? Charli XCX entre en scène avec une énergie prompte à mettre le feu à la Grande Halle toute entière. Performance investie, chorégraphies, hits à la chaîne, … La chanteuse fait feu de tous bois, nous laissant à peine le temps de respirer.
C’est évidemment son nouvel opus, Charli, qui est mis en avant, l’occasion même d’inviter Chris sur scène pour interpréter Gone en featuring sous les cris d’un public conquis. Et quand on sort de ce dernier opus, c’est pour mieux se retrouver avec une avalanche de tubes: Unlock It, Vroom Vroom, Blame It on Your Love et évidemment I Love It. Charli XCX catapulte sa pop vers des sommets expérimentaux inattendus, fracassant les rythmes et les mélodies jusqu’au bord de l’explosion, sans jamais se départir de ses évidences pop promptes à faire chanter une foule toute entière; en témoigne le formidable final 1999. On en redemande.
Encore sonnés, on se pose quelques instants tandis que Aurora se produit sur la scène de la Nef pour un set vraisemblablement puissant et incarné. Pas vraiment le temps de s’y attarder malheureusement, car nos héros de la soirée sont sur le point de monter sur scène.
« Go down, soft sound« . Sous la forme d’un karaoké géant, l’éponyme et culte titre d’introduction du quatuor retentit, libérant moult cris et hurlements. Et quand The 1975 montent finalement sur scène, c’est pour déchaîner une furie punk-rock vicieuse avec l’excellent nouveau single People, bravant l’épreuve du live avec brio. Ce sera la seule nouveauté de ce set d’1h15 (au lieu d’1h!), faisant plutôt part ce soir à A Brief Inquiry Into Online Relationships. Give Yourself a Try, TOOTIMETOOTIMETOOTIME, Sincerity Is Scary, It’s Not Living (If It’s Not With You), … Tous les titres sont repris avec puissance par un public ardent.
Sur scène, Matty Healy, évident frontman, mène l’embarcation avec une nonchalance inimitable, sans jamais dérailler sur le plan vocal. Les interactions avec le public sont légion: outres les traditionnels remerciements, il est question ce soir de prêt de bonnets, de song requests, de surprises de setlist inattendues (la sublime Robbers, inimitable) et de contact direct, le jeune frisé venant se frotter au public durant l’abrasive I Like America & America Likes Me. Le reste de la formation délivre à la perfection les multiples sonorités formant l’identité du groupe, toujours sous la houlette de l’épatant batteur George Daniel.
C’est vers la fin du set que l’on retrouve les hits de la première heure du quatuor avec l’irrésistible Chocolate et l’enragée Sex, ultime déflagration rock du set. « Rock & Roll is dead, God Bless The 1975« , tandis que ces derniers enchaînent sur un ultime The Sound, entraînant en diable et porté par un solo de guitare final transcendant la Grande Halle de la Villette. Pop, rock, électronique; le quatuor manie les différents genres avec précision, s’en appropriant les codes pour mieux les sublimer. L’avenir leur appartient; et nous, nous attendons leur prochaine venue française avec impatience.
Nous laissons volontairement de côté l’électro-pop de Agar Agar pour mieux nous préparer à la mandale SebastiAn. A une semaine de la sortie de son nouvel album, Thirst, le DJ français propose un live ultra-rodé, riche en mandales soniques, en tonalités agressives et en montées en puissance résolument cosmiques. La transe et totale tandis que de nouveaux titres sont malicieusement révélés (dont un featuring avec Charlotte Gainsbourg), et le toute se finit sous les coups acérés du Killing in the Name de Rage Against the Machine, retravaillé pour l’occasion. Le remède parfait à la gueule de bois.
Claqués, nous laissons 2manydj’s envoûter les âmes les plus courageuses, et nous quittons le Pitchfork Festival pour cette édition. Programmation éclectique et qualitative, métamorphose physique réussie, son de qualité: nul doute que nous serons de la partie pour revenir à la Grande Halle de la Villette pour le Pitchfork 2020.
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