
13 Juil Sting, Alt-J, Royal Blood… Retour sur l’édition 2023 du festival Beauregard
Retour sur une édition très mouvementée pour le festival Beauregard.
Le moins que l’on puisse dire est que cette édition 2023 du festival Beauregard aura été pleine de challenges pour les organisateurs. Tout a commencé en Juin avec l’annulation du duo The Waeve rapidement remplacé par le groupe anglais Chalk. Puis, deux jours avant le début du festival, Blur a dû annuler son concert sur ordre médical. Et là, c’est le drame. Blur était LA tête d’affiche de cette édition 2023 du festival Beauregard. Selon les organisateurs, cette annulation a entraîné plus 2500 demandes de remboursement. Heureusement, Royal Blood, remplaçant de dernière minute a relevé la barre. Car certes, c’est moins populaire que Blur mais c’est très rock, très anglais et c’est un groupe qui continue son ascension depuis plusieurs années maintenant. D’autres ajustements ont également eu lieu, comme l’annulation de Pedro Winter seulement trois jours avant son concert et l’échange des horaires entre M83 et Hamza. Toutefois, du côté des artistes britanniques, tout s’est bien passé, et le festival a pu maintenir sa qualité.
Un before très anglo-saxon
C’est à 18h, ce mercredi 5 juillet, que le groupe Coach Party débutait son concert avec All I Wanna Do Is Hate, mettant immédiatement le public dans une énergie positive. Force est de constater que les compositions du groupe sonnent aussi bien en album qu’en live. La setlist était identique à celle de leur concert aux Nuits de Fourvières mais au vu de la qualité et de la facilité avec laquelle s’enchaînaient les titres, cela nous allait très bien. Le groupe, manifestement ravi d’être sur scène, a partagé plusieurs blagues et moments de complicité avec le public. Cependant, quelques défis techniques ont entaché l’expérience : le son était étonnamment faible pour tous les groupes ce soir-là, ce qui a nui à la pleine appréciation de la performance. Dans un premier temps, c’est le son qui posait problème. Ce 5 juillet, le son était très faible pour tous les groupes qui jouaient. Ce qui n’était pas le cas les autres soirs du festival mais qui a vraiment gâché le potentiel de tous les concerts ce soir-là. Et puis il y avait le public. Un public poli qui soutenait le groupe mais qui était peu nombreux. Et pour cause. Le festival ouvrait ses portes à 18h et le concert démarrait à 18h également. Même en étant sur place avant l’ouverture des portes, le temps de valider ses billets et d’acheter une bière, la moitié du concert était déjà passée. C’est vraiment dommage pour le groupe qui a un potentiel énorme. Malgré cela, Coach Party a su rester fidèle à sa réputation, et nous avons quitté la scène avec l’envie d’aller les voir à nouveau dans des conditions idéales..
Juste après le concert de Coach Party, nous avons droit à une playlist d’1h essentiellement constituée de musiques des Strokes. Et soudain, la musique s’arrête. Des riffs agressifs de guitare éléctrique se font entendre. Une batterie sourde retentit. Le chanteur prononce ses premières paroles dans un hurlement. Chalk entre sur scène, et dès les premières notes, il est clair que ce concert ne laissera personne indifférent. Ce soir-là, Chalk fait ses débuts en France, et c’est un véritable choc pour le public. Bien que la presse anglaise les ait classés comme un groupe de post-punk, ils offrent ici une prestation résolument punk rock. Le groupe se donne à fond. Le chanteur est charismatique. Il vit sa musique à 200%. Par moments, son visage devient écarlate après des hurlements frénétiques ; à d’autres, il est tellement emporté par sa musique qu’il semble au bord de l’asphyxie, ses fils de micro enroulés autour de lui. Leur rage est communicative. Pour une première date en France, Chalk fait une entrée fracassante et laisse un souvenir impérissable.

Une ambiance royale pour Royal Blood
Le jeudi soir, seul un groupe britannique était programmé : Royal Blood. Bien que nous soyons de grands fans du duo de Brighton, nous ne pouvions ignorer la déception qui planait encore après l’annulation de Blur. Et comme pour en rajouter, dès la première chanson, Out Of The Black, un spectateur s’écrie sarcastiquement : « Bravo Blur !!« . Mais très vite, Royal Blood prend les rênes du concert et parvient à nous faire oublier cette déception. Dès les premières notes, le groupe parvient à électriser la foule avec une énergie palpable. Ils jouent principalement des morceaux de leur premier album, et l’intensité de leur performance est impressionnante. A la batterie, Ben Thatcher nous fait signe de faire un circle pit. En réponse, ce sont cinq ou six cercles qui se forment spontanément dans la fosse. À chaque moment du concert, la foule semble de plus en plus déchaînée : un homme imite chaque mouvement de batterie avec une précision étonnante, tandis que deux autres fans se lancent dans des crowdsurfing spectaculaires, leurs chaussures s’envolant dans les airs. Tous les autres semblent sauter en chœur au rythme des riffs endiablés de Mike Kerr. Ce même Mike Kerr qui avait fait parler de lui il y a quelques mois pour s’être plaint d’un public immobile, semble ravi ce soir. Son sourire est grand et il répète à plusieurs reprises « This is a fucking sick show! » ou encore « We’re having a fucking good time !« . Mais, ce soir-là, la véritable star sur scène est Ben Thatcher. Acclamé par la foule, il donne ses baguettes aux fans du premier rang. Un peu plus loin, une pancarte déclare sobrement : « Ben Thatcher : best fucking drummer in the world« . Ce n’est pas volé. Avec une setlist efficace, beaucoup d’interactions avec le public et un très bon jeu de lumière, le groupe est à son maximum. Ce n’est pas un concert comme les autres et ça se ressent de chaque côté de la scène. Lors de la conférence de presse du festival, le directeur nous confie que Royal Blood leur a envoyé un message le lendemain pour les remercier, qualifiant ce concert de l’une de leurs meilleures dates. Et, en toute honnêteté, nous ne pouvons qu’être d’accord avec eux. Oui, nous aurions aimé voir Blur, mais ce soir-là, Royal Blood a littéralement conquis la Normandie.

Un samedi en demi-teinte
Le vendredi soir, aucun groupe britannique n’était prévu, et bien que nous ayons apprécié les prestations de Louise Attaque et The Haunted Youth, c’est clairement le samedi que nous attendions avec impatience.
A 19h15, Anna Calvi monte sur la scène Beauregard. Voilà des années que l’on avait pas vue cette grande artiste sur scène et nous sommes donc ravis de la retrouver. Le concert débute avec Hunter, un morceau où la voix d’Anna Calvi brille véritablement. Et quelle voix ! Dès ce premier titre, il est évident que nous avons affaire à l’une des grandes chanteuses de sa génération. Mais ce n’est pas tout. Lorsque Indies Or Paradise démarre, une autre facette de son immense talent se révèle. En plus d’être une chanteuse exceptionnelle, Anna Calvi se distingue comme l’une des guitaristes les plus remarquables de ces dernières années. Ses solos, aussi bien en plein cœur des chansons qu’entre deux morceaux, sont époustouflants. La technique et la fluidité de son jeu sont impressionnantes. Le concert est une véritable démonstration de son art. Le public réagit, admiratif, notamment dans les premiers rangs où des commentaires enthousiastes saluent sa maîtrise de la guitare. Cependant, malgré l’intensité de sa performance, un manque criant d’interaction avec le public alourdit l’atmosphère. Aucun geste, aucun regard, aucun sourire, et très peu de mots. À part un bref « Thank you » en fin de concert, Anna Calvi reste totalement distante, presque éthérée. Cette froideur contrastait vivement avec la chaleur dégagée par sa musique.
Le clou du spectacle arrive avec un solo de guitare, suivi d’un geste inattendu : Anna Calvi pose sa guitare, fait une brève révérence et quitte la scène. Les lumières sont encore allumées, la guitare vibre encore légèrement, mais le concert est fini. Aucun rappel, aucun échange avec le public. Il faut un technicien pour débrancher l’instrument et mettre fin à la soirée. Cette absence de retour sur scène, ce silence total après une prestation pourtant brillante, crée une étrange sensation de frustration parmi les spectateurs.
Certes, le talent d’Anna Calvi est incontestable, mais la fin de ce concert laisse un goût amer. L’absence de chaleur humaine, de reconnaissance envers un public clairement acquis à sa cause, ternit une performance qui, autrement, aurait été mémorable.

Et puis quelques heures plus tard, c’est Alt-J qui monte sur scène. La setlist est qualitative. On note 7 chansons de An Awesome Wave, leur premier album, considéré par beaucoup comme leur meilleur. On reconnaît tout de suite l’énergie de classiques tels que Matilda, Taro et Breezeblocks, et le public y répond avec enthousiasme. Les chansons, fidèles à leur version studio, sont magnifiquement interprétées, et l’atmosphère est magnifiée par un jeu de lumières précis et soigné qui enrichit l’expérience visuelle. Cependant, bien que la prestation soit globalement de très bonne facture, il manque un je-ne-sais-quoi pour qu’elle se transforme en un moment vraiment exceptionnel. Peut-être quelques morceaux plus rythmés ou un peu plus de proximité avec le public auraient suffi pour intensifier l’interaction et donner un peu plus de vie à la scène.

Un dimanche légendaire
Le dimanche 9 juillet marque la fin de cette magnifique édition 2023 du festival Beauregard. Avant de dire au revoir, nous avons droit à deux concerts britanniques. Le premier à 16h, avec The Murder Capital, sur la scène John. Dès leur arrivée, la présence scénique du groupe est palpable. Que ce soit le chanteur en costard ou le bassiste vêtu d’une parka, on est comme hypnotisés par eux. Dès le début, on ressent chez eux une impatience de jouer et de partager leur travail avec le public. Avant même de prendre sa basse, Gabriel Paschal Blake demande au public de crier et de lever les mains.
Les premières notes de For Everything résonnent, et la prestation prend de la vitesse. James McGovern, totalement absorbé par sa performance, conclut la chanson avec un « ça dit quoi ? » complice, provoquant un sourire parmi la foule. Les titres s’enchaînent avec fluidité, et Return My Head, extrait de leur dernier album Gigi’s Recovery, fait sensation, sonnant déjà comme un incontournable. Avant d’interpréter le morceau éponyme de l’album, McGovern quitte brièvement la scène. Lorsqu’il revient, cigarette à la main, il l’allume tranquillement, une image qui ne fait qu’amplifier son charisme et son élégance britannique.
Les chansons se succèdent et l’on se dit que nous sommes clairement face à un des meilleurs groupes de post-punk anglais. Le groupe se donne à fond. Il est entièrement dévoué à ses chansons qu’il vit intensément comme à son public à qui il fait suffisamment attention pour repérer les fans portant des vêtements du groupe et leur offrir, en guise de récompense, des cigarettes et une setlist du concert.

A 21h30, c’est l’icone Sting qui monte sur scène. Et le moins que l’on puisse dire c’est que son concert démarre très fort puisque la première chanson jouée est Message In A Bottle de The Police. Le public est aux anges. Tout le monde chante. Et puis il enchaîne avec Englishman in New-York, Every Little Thing She Does Is Magic… Trois chansons qui sonnent incroyablement bien en live, qui font chanter tout le monde tant elles sont connues et qui collent parfaitement avec l’ambiance de ce début de soirée d’été.
Dès les premières notes, Sting fait preuve d’une humilité touchante. En français, il se présente simplement : « Je m’appelle Sting. » Tout au long du concert, il prend soin de présenter ses musiciens et choristes un par un, leur offrant un moment de gloire à travers des solos ou des duos. Leur talent est indéniable, et, par moments, leur présence revitalise l’ambiance du concert, apportant un vent de fraîcheur à des passages plus calmes.
À 73 ans, Sting reste un artiste exceptionnel, non seulement un grand chanteur, mais aussi un musicien et un showman hors pair. Cependant, après l’intensité des trois premières chansons, le rythme du concert ralentit considérablement avec huit morceaux plus calmes. Bien qu’exécutés avec brio, ces titres plus longs et plus introspectifs semblent diminuer un peu l’élan initial. Heureusement, les solos des musiciens et les moments plus dynamiques apportent un équilibre bienvenu.
La fin du concert est un retour en grande forme avec des chansons cultes telles que Walk On The Moon, So Lonely et Every Breath You Take. Après avoir salué son équipe sous un tonnerre d’applaudissements, Sting quitte la scène.
Après son départ, ce n’est pas Sting que le public réclame mais Roxanne. En effet, nous venons d’assister à un concert exceptionnel mais il nous manque LA chanson culte de The Police. Celle pour laquelle tout le monde est venu. Le public scande « Roxanne ! Roxanne ! Roxanne ! » et Sting revient sur scène avec sa basse. Il bredouille un timide « Mais je sais pas quoi chanter » en français et enchaîne avec les premières notes de Roxanne. Le public est ravi et reprend en chœur les paroles de ce classique du rock anglais.
Ainsi, le dernier concert anglais de cette édition se termine sur une note positive et il est déjà temps pour nous de quitter les lieux.
Que retenir de cette édition 2023 ?
En dehors des britanniques, nous avons adoré la prestation de Louise Attaque qui a fait chanter le public du début à la fin, le show survitaminé des suédois de Royal Republic, l’énergie positive de Jain, la folie d’Airbourne… Et parce que Beauregard, ce n’est pas que des concerts, on notera une fois de plus l’organisation parfaite du festival. Que ce soit au niveau de la programmation où ils ont assuré comme des pro malgré de nombreux soucis, au niveau des stands qui proposaient de tout pour tout le monde ou au niveau de la circulation très fluide des navettes aller comme retour… Nous n’avons vraiment rien à redire. Tellement rien à redire que nous avons déjà hâte d’y retourner l’année prochaine du 4 au 7 juillet 2024 !
Retrouvez toutes les photos des concerts de cette édition 2023 ici
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