Interview : Mabel

À 21 ans, Mabel est prête à prendre la relève du R&B britannique. Après être passée par Paris début Octobre, où elle a joué devant un Pop-Up du Label bouillonnant, la jeune femme vient d’être récompensée par une nomination pour le prestigieux Brits Critic’s Choice Award 2018 (précédemment remporté par Rag’N’Bone ManJack GarrattJames Bay ou encore Sam Smith). Nous avons eu la chance de la rencontrer la semaine dernière pour parler de son premier album, de l’influence des années 90 sur sa musique et bien d’autres choses ! (ENGLISH VERSION HERE)


 

Salut Mabel ! 2017 a été une grosse année pour toi, tu as joué un show à Paris le mois dernier et c’était plein ! Qu’est-ce que ça fait de se dire qu’on est capable de jouer des concerts à guichets fermés hors des UK ?

Mabel: Assez surréel ! En Angleterre c’est génial, mais aller autre part et savoir qu’une petite chose que l’on a créé – comme une chanson – peut se diffuser dans le monde entier c’est vraiment incroyable. C’est un grand pouvoir ! Et Paris était un concert magnifique, je pense qu’avec Londres c’était l’un de mes shows préférés.

Comment était le public ? C’était différent comparé à Londres ?

Je pense que Londres peut être assez compliqué, même je n’ai jamais eu cette expérience, pas à un show où j’ai joué en tête d’affiche, cependant les gens peuvent se montrer assez réservés. Quand je suis venue ici, des personnes m’ont dit « ça peut être assez bizarre, jouer à Paris c’est assez difficile aussi » et ça m’a rendu un peu nerveuse. Mais quand le concert est arrivé il y avait tellement d’amour et tout le monde connaissait les paroles… c’était super, vraiment un beau moment !

Cette année tu as aussi sorti ton premier EP Bedroom et un peu plus tard une mixtape, qu’est-ce qui est prévu pour la suite ? Un album ?

C’est sûr ! L’album est vraiment important pour moi c’est pourquoi je préfère ne pas le précipiter. Je suis déjà en train de travailler dessus, je suis assez avancée. Tout ce que je peux dire c’est que c’est plus grand et meilleur que tout ce que j’ai pu faire jusqu’à présent ! Avec l’EP et la mixtape, je voulais juste montrer aux gens que je pouvais créer des choses mais sans aller directement à la case album, parce que je pense qu’il ne faut pas griller des étapes.

Est-ce que tu pourrais nous en dire un peu plus sur la couleur musicale de cet album ? Sur l’EP tu chantes beaucoup à propos de relations amoureuses, est-ce que tu vas explorer d’autres thèmes ?

Je crois que j’écris toujours de la même façon, les relations amoureuses sont intéressantes et je n’arrêterais jamais d’écrire à leur propos. Mais j’ai aussi exploré d’autres sujets, plein de choses avec lesquelles j’ai grandi, comme par exemple la lutte que je mène contre l’anxiété et la dépression. Ce sont des combats dont  je pense qu’il est important de parler. Quant au son de l’album, c’est assez similaire à ce que j’ai fait auparavant mais je dirais que ça va un peu plus loin, c’est un plus audacieux et j’expérimente de nouvelles sonorités. Les influences des nineties sont toujours très présentes sur les morceaux plus lents et pour les chansons où le tempo s’accélère il y a beaucoup d’afrobeats. Je n’avais jamais vraiment exploré l’up-tempo avant Finders Keepers, j’ai toujours trouvé ça super dur et je me disais « comment vais-je faire pour y arriver ? ». J’adore danser mais les trucs vraiment pop avec des temps forts genre four-on-the-floor c’est difficile ! Et puis je me suis rappelée que les afrobeats étaient vraiment importants pour moi, j’ai des racines en Afrique de l’ouest et je sentais que je me devais essayer parce que c’est aussi un bon moyen d’accélérer la cadence.

Est-ce que tu t’attendais à ce que Finders Keepers soit un si gros succès ?

C’est assez fou, ça a toujours été ma chanson préférée ! Maintenant, je peux dire que j’ai des nouvelles chansons qui vont arriver et que j’aime encore plus, mais lorsque je l’ai écrite, c’était vraiment l’un des morceaux les plus important pour moi. Je pense que les gens autour de moi étaient plutôt nerveux avant sa sortie car c’est assez différent de tout ce que j’ai pu faire auparavant. Mais c’est une importante partie de moi et je voulais laisser mes fans l’entendre et savoir ce qu’ils en pensaient. Que ma chanson préférée soit aussi la favorite de mes fans, c’etait la meilleure chose qui pouvait arriver ! C’est merveilleux que les choses se soient passées comme ça ! Parce que se sont essentiellement mes fans qui décident…

Donc tes fans ont une influence sur ton travail ?

Absolument ! Je n’avais même pas sorti la chanson entant que single, ce n’était qu’un petit avant-goût de l’EP. Bedroom était le véritable single mais Finders Keepers est allé bien au-delà de Bedroom ! Et on s’est dit « merde, on n’a même pas de clip ! » alors on a dû en shooter un. Le morceau est sorti en mars, on est maintenant en novembre et il est toujours dans le top 10 aux UK, c’est incroyable !

Sur Finders Keepers tu as collaboré avec le rappeur Kojo Funds, est-ce qu’il y a d’autres artistes avec qui tu aimerais travailler sur ce nouvel album ? J’ai vu que tu parlais pas mal avec Zak Abel sur twitter…

Zak est un ami, c’est un musicien merveilleux mais je ne suis pas sûre que l’on fasse une collab. On a déjà composé ensemble parce que c’est drôle d’écrire à plusieurs et que c’est un très bon auteur ! Sinon je pense qu’il y a énormément d’artistes féminines formidables en Angleterre comme Stefflon ou Raye, donc j’espère qu’il arrivera quelque chose avec elles. On a fait des sessions d’écriture mais à chaque fois on finit par juste trainer ensemble et sortir… ça va nous prendre une année pour écrire une chanson ! Il y a aussi d’autres artistes britanniques comme Stormzy, j’adorerais faire un truc avec lui, il est génial ! Ou avec des rappeurs américain…  J’aime beaucoup Tory Lanez !

Donc ça serait plutôt des artistes de la scène rap et urbaine ?

Oui sûrement ! J’aime le rap et le R&B, c’est une grande partie de mon identité. Mais ouais, je ne serais pas contre quelques afrobeats, j’adorerais faire quelque chose dans ce genre là. Travailler avec Maleek Berry ça serait super cool !

J’ai lu que tu étais une grande fan de Beyoncé, est-ce qu’il y a d’autres musiciennes que tu trouves inspirantes et que tu prends pour exemple ?

Lauryn Hill, Aaliyah… De nos jours je dirais probablement Kehlani, SZA ou juste n’importe quelle femme qui est téméraire dans ce qu’elle écrit. Je pense que Lauryn Hill et Aaliyah étaient vraiment dans un monde d’hommes où elles ont dû s’imposer. Et puis il y a les Destiny’s Child, grâce à elles j’ai grandi à l’époque de Survivor et Independant Woman, on m’a appris que je n’avais pas besoin que quelqu’un m’aime pour me sentir bien avec moi-même et c’est un message que je veux transmettre aux filles qui écoutent ma musique !

Tu as commencé à écrire de la musique assez tôt, est-ce que tu te souviens de ta première chanson ?

C’est assez drôle parce que oui je m’en souviens mais je me suis faite la promesse de ne jamais la partager ! C’était une chanson d’amour et j’avais cinq ans… donc à cette époque je n’étais évidemment jamais tombée amoureuse ! C’est marrant cette obsession que l’on a avec l’amour, qu’elle commence si tôt et qu’on lui donne une si grande importance. Mais ouais, c’était à propos d’un garçon dans ma classe… je n’ai vraiment aucune idée de ce qu’il est devenu ou ce qu’il fait maintenant.

Tu as dit un peu plus tôt que tu souffrais de problèmes d’anxiété. Comment fais-tu pour les gérer quand tu dois te produire devant une grosse salle comme quand tu as fait la première partie de Years & Years l’an dernier ?

Je pense que je deviens nerveuse et anxieuse uniquement quand quelque chose a beaucoup d’importance pour moi. L’anxiété m’épuise mentalement et physiquement, ça me fatigue beaucoup donc le truc c’est de se servir de toute énergie pour en faire quelque chose de positif. Pour moi c’est me déconnecter, me dissocier de la Mabel qui lit, de la Mabel qui traine avec ses amis et devenir cette autre chose. C’est un peu comme si je ne me considérais plus moi-même comme une humaine mais juste comme de l’énergie pure… c’est exactement ça. Prendre toute cette négativité et arrêter de penser « et si ceci ou cela arrive ? » il faut juste tout assumer. Je pense que c’est le meilleur sentiment au monde.

D’être sur scène et de sentir la foule avec toi ?

Oui, ça me faisait peur avant… puis j’ai réalisé que si je sautais, le public allait sauter aussi ! Mais je dois me lancer ! Si je crie, il crie et c’est simplement extraordinaire d’avoir cette connexion avec les gens !

Ça t’est déjà arrivé les moments de malaise sur scène ?

Oh oui bien sûr il y a eu des moments assez gênants ! Comme quand je demande aux gens de faire du bruit et que personne ne répond… Il y a toujours des fois où je me dis « et si mon soutien-gorge n’est pas à sa place, et si ceci, et si cela… » mais je crois que si j’ai bien appris une chose de ma mère c’est que… on s’en fout ! Peu importe ce qu’il arrive, des merdes arrivent tout le temps mais il faut les assumer ! Je pense que les gens apprécient aussi le fait que l’on ait des défauts. Il y a une époque où j’étais vraiment terrifiée à l’idée de performer, si quelque chose se passait mal, je ne disais rien, je continuais jusqu’à la fin du concert et je pensais « j’ai vraiment détesté ça » parce que j’étais si obnubilée par l’erreur que j’avais faite que tout se réduisait à ça. Mais maintenant que c’est arrivé une paire de fois en tournée, je sais que je peux simplement dire « il y a eu un problème, on va juste recommencer ». Le public aime ça parce qu’il voit que je suis humaine, on est tous humains, ça arrive à tout le monde de merder. Je l’admets et parfois ces moments deviennent même mes préférés parce que la foule m’encourage, elle est avec moi. Je me dis « dieu merci ! », parce que si mon public pensait que j’étais un petit ange il serait bien déçu !

Ta musique et ton style vestimentaire sont tous les deux inspirés des 90s, si tu ne devais garder qu’un trend de cette période qu’est-ce que tu choisirais ?

C’est une question super dure ! Okay, je vais dire deux trucs : une pour la musique et une pour la mode ! Je dirais que ce sont les harmonies, les harmonies des 90’s sont fantastiques. Je pense que les gens les négligent beaucoup dans la musique actuelle. J’ai deux choristes sur la tournée et à tous les shows il y a un moment où c’est juste ma voix et les leurs. Beaucoup de R&B des 90’s est également basé sur les harmonies… Et pour ce qui est de la mode, ça serait le crayon pour les lèvres ! C’est un truc que j’utilise tous les jours et j’ai l’habitude de faire un trait assez kitch avec du gloss… J’aime l’esprit !

Si tu devais choisir une époque où vivre tu serais une millenial ou 90’s kid ?

Ouais ça serait les années 90, je pense que j’étais faite pour être une ado à cette époque. Je demande toujours à ma tante « raconte moi une histoire à propos de l’année 1996 ! ».

Et enfin, qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour l’année prochaine ?

Un album, faire beaucoup de tournées… encore plus de choses que cette année !


Vous pourrez retrouver Mabel  en concert à Paris à la Maroquinerie le 27 avril 2018 et en première partie de Harry Styles aux Accords Arena Hotel (Bercy) le 13 mars 2018 !

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