King No-One au Bushstock Festival + Interview

C’est à Londres à l’occasion du festif festival Bushstock dans le quartier de Shepherd’s bush que nous avons rendez vous avec les prodiges du Yorkshire, King No-One ! Découverts il y a peu et encore inconnus en France, nous avons eu un véritable coup de coeur pour leur univers et les trois garçons vont sans nul doute bientôt faire parler d’eux outre-manche. Avant le concert qui aura lieu dans un Pub, Zach, le leader,  Joe et James les guitariste et batteur nous accueillent avec un grand sourire. Ils viennent souvent jouer à Londres, dans les bars ou dans les rues même si leur public de prédilection les attend dans le nord du Royaume-Uni.

Nous avons discuté processus créatif, anecdotes de concerts et féminisme : 

 

Pour ceux qui ne vous connaissent pas, pourriez-vous vous présenter aux fans français ?

Joe: Je m’appelle Joe,et je suis le guitariste.

James: Moi c’est James et je suis le batteur.

Zach: Et je suis Zach, le chanteur. Plutôt barbant, hein !

Très bien, passons à la première question. Comment la musique est-elle entrée dans vos vies ?

James: Avec ma famille. Mon tout premier souvenir remonte à l’époque où mes parents mettaient de la musique en voiture quand j’étais sur la banquette arrière. Et puis, je ne suis pas fils unique alors je balançais entre la pop et le black métal. J’aime l’idée de me situer entre les deux. C’est ainsi que la musique a commencé à faire partie intégrante de ma vie.

Zach: Je suis d’accord, ça commence avec la famille. On avait l’habitude de conduire un peu partout aussi et ma mère a d’incroyables goûts musicaux. Elle aime tous les genres, on écoutait tellement de choses différentes. J’ai réalisé que je cogitais beaucoup, et c’est en pensant énormément que j’ai été intimement poussé vers la musique. C’est devenu ma façon de m’exprimer et ça a commencé quand j’avais environ 11 ou 12 ans.

Vous étiez camarades à l’école, c’est bien ça ?

James: Zach et Joe se connaissaient, oui.

Zach: Oui on se connaît depuis douze ans. Douze petites années ! Il semble que c’était encore hier, l’époque où je donnais des coups de pieds dans le dos de sa chaise en classe. Il m’a vraiment détesté pendant deux ou trois mois mais il a dû finir par se rendre compte que je n’étais pas si terrible. Et voilà où nous en sommes maintenant.

Vous vous produisez beaucoup un peu partout dans le Royaume Uni actuellement, notamment dans la rue. Vous avez quelques anecdotes à nous raconter, des choses qui se sont passées à ces occasions ?

Zach: On en a tellement, il va falloir qu’on choisisse au hasard. Je ne pense pas avoir vraiment le droit de raconter celle que l’on vient de raconter à nos amis !

Allez-y, racontez-moi votre pire et votre meilleur souvenir.

Zach: Ok on commence avec le pire alors !  On jouait dans une salle de concert au début du groupe et on commençait à se faire un nom. On a commencé à boire beaucoup quand on était toujours dans la salle après le concert. On logeait à l’autre bout de la ville et le taxi était trop cher. On était pauvres à l’époque, on venait d’avoir 18 ans. Il y avait nous quatre (avec Alex, ex-bassiste de King No-One) et mon frère, qui nous hébergeait. On ne pouvait faire rentrer tout le matériel dans la voiture qu’en forçant beaucoup dessus et en abaissant les sièges. On a décidé qu’il fallait rentrer et puisqu’on ne pouvait vraiment pas prendre le taxi, toujours aussi bourrés, on a rentré tout le matos dans la voiture et l’un de nous a pris le volant et deux autres se sont retrouvés sur le siège passager, avec la batterie au-dessus d’eux. C’était vraiment n’importe quoi, vous imaginez bien. Donc, tous nos instruments étaient empilés les uns sur les autres dans la voiture, un vrai jeu de Tetris. Et on a réussi à se faufiler entre tout ça. J’avais la tête complètement écrasée contre la vitre.

Joe: Et Alex était de l’autre côté, contre l’autre vitre.

J’imagine bien !

Zach: C’était bien évidemment le pire souvenir ! Et on se rendait bien compte que ce qu’on faisait était extrêmement risqué, je me répétais sans cesse « Si je me fais choper, c’est fini pour moi, je suis sûrement en train de violer au moins neuf lois là maintenant ». On s’est arrêtés au feu rouge et il y avait des gens dans la rue qui avaient l’air de se disputer tout en mangeant des frites. Ils étaient une dizaine environ. Ils se sont tous arrêtés d’un seul coup et l’un d’eux a pointé du doigt ma tête écrabouillée et mes amis qui étaient à l’avant de la voiture. Ces gens n’en revenaient pas ! Les pieds d’Alex étaient collés au plafond, c’est dire le bordel qu’il y avait dans cette voiture. Ils ont commencé à nous prendre en vidéo et j’ai trouvé ça hilarant, contrairement à d’autres ! Ensuite, on a entendu une sirène au loin et on a vu la voiture de police se rapprocher de nous. On a immédiatement pensé « Ca y est, c’est fini, on va droit en prison c’est sûr ». On s’est rabattus sur le côté en attendant que la voiture se rapproche et elle avait l’air de ralentir. On a continué à dire « C’est fini, c’est fini ». Et au dernier moment, la voiture nous a dépassés et est en fait partie au loin.

A part au Royaume Uni, avez-vous joué dans d’autres pays européens ?

James: On a fait quelques dates ailleurs, oui.

Joe: On a joué en Espagne par exemple.

James: C’était à un festival, et c’était une des meilleures expériences de nos vies.

Vous n’avez jamais joué en France ?

James: Non, mais on aimerait beaucoup.

On aimerait aussi vous y voir. Vous avez de fortes convictions féministes et vous vous engagez aussi pour la cause animale. Pouvez-vous me dire comment votre jeune public ressent ces combats ? Je sais par exemple que Zach se couvre les tétons en soutien aux femmes et je trouve ça super.

Zach: Eh bien, ils (les fans) sont l’une des raisons principales pour lesquelles nous menons ces combats puisqu’ils sont très influençables et qu’ils sont notre avenir, de toute évidence. On pense qu’ils prennent tout ça très à cœur à tel point qu’ils vont même au-delà des messages que l’on fait passer, bien plus qu’on aurait pu le soupçonner. Nos concerts sont un peu comme des meetings politiques. Les fans sont tellement impliqués dans la cause féministe et l’égalité entre tous et ils s’imprègnent de tout le pouvoir qui émane de ces combats. Les fans veulent vraiment prendre part à tout ça.

Vous interagissez avec eux pendant vos concerts ?

Zach: Oui, on fait deux ou trois speeches sur les principes du groupe.

 Vous vous couvrez les tétons aussi ? (s’adressant à James et Joe)

Joe: Non, on reste habillés !

Zach: Oui, je suis le seul tout nu !

J’ai le sentiment qu’être sur scène vous permet d’exprimer une autre forme de masculinité, quand vous portez du maquillage, et des paillettes par exemple. Que pensez-vous de la place qu’occupe la masculinité dans l’industrie du rock ?

Zach: J’ai l’impression que les gens se sentent beaucoup plus confiants. Ils se regardent beaucoup plus dans le miroir de nos jours. Mais il est vrai qu’on se fait ranger dans des cases : si tu es un homme, tu dois faire des choses masculines. Si tu es une femme, tu dois faire des choses féminines. Dorénavant, on commence à prendre conscience que ce n’est pas parce qu’on est un homme que ça signifie qu’on veut porter une veste en cuir, manger de la grosse viande rouge et saignante ou encore ne se déplacer qu’en Harley Davidson – non pas que tous les hommes fassent ça ! Je détesterais ça ! Mais il y a quelque chose qui lie la masculinité et la féminité, un peu comme une balance, et ce n’est clairement pas défini par notre genre, mais par ce que l’on ressent sur notre propre personne. Je suis un homme et je me définis comme un homme, mais je me sens également très féminin et j’aime bien dépasser cette limite. J’imagine que je me retrouve plus chez les femmes que chez les hommes !

Joe: Oui, exactement, tout n’est pas blanc ou noir. Comme Zach l’a dit, c’est comme une balance. Il se peut qu’un jour on se sente plus féminin qu’un autre, c’est comme ça.

James: Et c’est super de ressentir ça. C’est pour cette raison que l’on porte des paillettes et du maquillage, ça nous fait voyager en quelque sorte. (En s’adressant à Zach et Joe) Je ne sais pas pour vous, mais je me sens bien plus féminin quand on est en tournée.

Joe: Je pense que c’est pour ça qu’être en tournée est si bon pour nous, ça crée une complémentarité entre le public et nous.

J’ai remarqué que vous aviez une forte communauté LGBTQ+ ?

Zach: Oui c’est vrai. C’est le meilleur sentiment, voir toutes ces personnes qui viennent nous rencontrer et nous expliquer qu’après un certain concert, ils sont rentrés chez eux et on fait leur coming out à leurs parents. Le nombre de personnes qui nous ont dit ça sur cette tournée était incroyable et ça a donné un réel sens à nos principes. Les gens ont l’air d’être intimement touchés par notre message et c’est tellement satisfaisant de constater que ce que l’on fait aide véritablement nos fans.

Oui, c’est lourd de sens. Quelles sont vos inspirations musicales ? Quel est l’artiste avec lequel vous aimeriez vous produire ?

Zach: Pour ce qui est de l’inspiration, je ne crois qu’en ma propre expression et je pense avoir été inspiré évidemment, mais de façon très subtile. En revanche, j’aimerais bien jouer avec Kanye West, peut-être. Kanye West et Stevie Nicks, les deux au même concert.

D’après mes sources, vous n’êtes pas encore signés.

Tous: Non, c’est vrai.

Est-ce un choix ?

James: Oui, c’est un choix personnel. Là où nous en sommes, on n’a pas le sentiment d’avoir vraiment besoin d’un label pour le moment.

Zach: On aime bien décider pour nous-mêmes. On a reçu quelques petites offres, des bonnes et des moins bonnes. Se précipiter sur un contrat maintenant serait un peu ridicule puisqu’on s’en sort tout seuls actuellement. On a déjà des assistants et ça nous suffit pour l’instant, et on veut se focaliser sur nos propres idées plutôt que d’être contrôlés par des gens qui n’ont pas nécessairement le même état d’esprit que nous.

Quel est votre processus de création ?

Zach: Ca change tout le temps !

James: Oui, on n’a pas de procédé prédéfini pour chaque chanson, c’est toujours un peu différent. Zach reste celui qui écrit  le plus. Une idée et une structure de chanson lui viennent et comme on habite les uns sur les autres, on se réveille parfois un matin et on peut l’entendre jouer une nouvelle composition sur son piano. Et ça nous plaît !

J’ai l’impression qu’être sur scène et rencontrer vos fans est quelque chose d’important pour vous. Que préférez-vous entre la scène et le studio ?

Joe: C’est tellement différent.

Zach: Ecrire des chansons est une façon de s’exprimer et se produire sur scène en est une autre. Elles touchent à des choses si différentes et comme on l’a dit précédemment, ça dépend vraiment de l’état d’esprit dans lequel on est ce jour là. Parfois je veux juste écrire et je ne veux pas me sociabiliser et je me retrouve dans un bordel général : ma chambre est bordélique, ma vie est bordélique et tout ce que je fais est bordélique alors que je veux faire les choses bien. Et la minute qui suit, je veux juste être sur scène. Ca dépend vraiment.

Joe: Exact. Le sentiment que tu as quand tu écris une chanson sur un sujet qui te tient vraiment à cœur est aussi intense que celui que tu éprouves sur scène en jouant devant des gens qui aiment ce que tu fais, et en même temps, ils sont incomparables. C’est ce pourquoi c’est si génial. C’est très épanouissant.

 

Quelle chanson de votre propre composition est votre préférée ?

Joe: Dans notre registre ? Ma préférée c’est Antichrist.

Oui, je l’aime beaucoup aussi. (S’adressant à James et Zach) Et vous ?

James: C’est difficile. Je n’ai pas envie d’être celui qui répond Antichrist aussi ! Néanmoins j’adore cette chanson, et j’adore toutes nos chansons, j’y tiens énormément. Mais si je devais vraiment choisir, ce serait Antichrist aussi.

Zach: Je tiens aussi beaucoup à toutes nos chansons, elles proviennent toutes plus ou moins de ma propre imagination et j’ai l’impression de devoir choisir entre mes enfants.

Joe: Mais tout le monde a un enfant préféré !

Zach: Oui c’est vrai ! D’autant plus que lorsque j’ai écrit Toxic Love, je me complaisais dans ma propre misère depuis très longtemps, et c’était un peu comme briser un mur. C’est un peu une chanson « égoïste » et je pensais réellement qu’elle deviendrait notre tube. (Sur un ton ironique) Et en fait c’était de la merde ! De l’autre côté, je n’aurais jamais imaginé qu’Alcatraz deviendrait si populaire. Elle est écoutée chaque jour un peu plus et elle grandit encore et encore. Mais pour revenir à la question, ma préférée se doit d’être Antichrist aussi. Je l’aime tellement que je l’ai tatouée sur le bras !

 Je vois ça ! Donc, vous êtes seulement trois musiciens maintenant. Prévoyez-vous de travailler avec des musiciens occasionnels ou recherchez-vous un bassiste permanent ?

Zach: Je trouve que la façon dont on travaille actuellement est tellement appréciable et profonde et il y a une forte chimie entre nous. Créer quelque chose avec une personne avec laquelle on n’a pas cette chimie, c’est l’enfer. J’évite cette situation à tout prix. Je ne suis bien que dans mon monde. Je peux être un vrai con quand on travaille parce que je veux projeter toutes ces pensées hors de ma tête. Le mieux, c’est quand les autres comprennent ce que tu veux avant même que tu n’aies à expliquer ce à quoi tu penses. C’est pour ça que je déteste ça (collaborer avec d’autres personnes que James et Joe), puisqu’il faut se faire comprendre avant de travailler ensemble. En revanche je sens qu’ils (James et Joe) me connaissent tellement bien qu’ils comprennent pourquoi je peux être un con et pourquoi je suis si exigeant. Plus je suis créatif et plus je suis dans tous mes états.

Joe: Je trouve que ça fonctionne bien parce que c’est ce dont on a besoin. C’est comme une approche quelque peu égoïste de notre écriture. Je pense que ça fait ressortir la meilleur de soi-même. C’est une réciprocité.

Dois-je écrire dans l’article que Zach est un con ?

Tous: Certainement pas ! (rires)

King No-One se prépare pour une grande tournée à l’automne prochain au Royaume-Uni et nous les attendons avec impatience pour un concert en France très prochainement !

Merci à Raphaëlle Berlanda pour la traduction et la transcription !

Photos : Zoe Antoniou & Margaux Badénès

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