Pitchfork Avant-Garde 2018, jour 1 : la messe pop de Let’s Eat Grandma

En marge du Pitchfork Festival, qui s’impose comme le mastodonte de l’alternatif en cette fin d’année, le Pitchfork Avant-Garde prend ses quartiers dans les différentes salles près de Bastille pour deux soirées de découvertes musicales. Pour ce premier jour, notre programme est chargé : les sets se chevauchent, la distance entre certaines salles est loin d’être idéale mais nous relevons le challenge. Ni le froid, ni les kilomètres ne nous stopperont.

Le coup d’envoi de la soirée est donné par Mellah, auteur-compositeur que l’on a rencontré un peu plus tôt dans la journée (interview disponible sous peu). Accompagné de ses quatre musiciens, il balance une pop décomplexée qui pourrait rappeler un certain Declan McKenna de par les textes qui rompent avec la monotonie des chansons d’amour mellow, préférant discuter des problèmes de société actuels; le tout relevé de sonorités rock, mais toujours accessible. Le grinçant Cigarette Lighter issu de l’EP du même nom reste l’un des temps fort du set, il résonne, sonne fort et juste.

On enchaîne avec le duo IDER au Café de la Danse. Si l’on appréciait déjà leur pop atmosphérique et délicate en studio, sur scène la musique prend une toute autre dimension. Lily Somerville et Megan Markwick font preuve d’une intense complicité et semble en totale symbiose. Leur bonne humeur et énergie sont communicatives et on ne peut que se mettre à danser sur le son des synthés et frémir sur leurs harmonies vocales. Si vous les avez manqués cette fois-ci, on vous recommande vivement leur concert au Pop Up du Label le 8 mars prochain !

On se presse au Pan Piper, salle/bar situé près du Père Lachaise, pour voir l’un des artistes qui fait couler beaucoup d’encre Outre-Manche : Westerman. Talent brut, le musicien originaire de Londres a captivé l’audience avec une folk aux arrangements électro. On retiendra particulièrement quelques brillants solos de guitare. Affaire à suivre…

Sur le retour on passe en coup de vent pour aller applaudir l’australienne Stella Donnelly. Dans un bar archi blindé où il est difficile de faire deux pas, la chanteuse uniquement accompagné d’une guitare électrique charme l’Avant-Garde. Sa ballade Boys Will Be Boys qu’elle raconte avoir écrit avant même que le mouvement Me Too prenne tant d’ampleur, est une pièce féministe importante qui conteste les doubles standards. Un beau moment de douceur et un véritable coup de cœur hors UK.

L’autre tandem féminin très attendu de cette programmation est le groupe de Norwich Let’s Eat Grandma. Jouant pour la première fois à Paris depuis la sortie de leur second album I’m All Ears, les deux jeunes femmes n’ont rien perdu de leur théâtralité et présence scénique. Leurs silhouettes presque fantomatiques possèdent la scène et délivre leur pop expérimentale sans fausse note devant des premiers rangs très enthousiastes. Entre jeux de mains, instruments inattendus (saxophone, flûte à bec…) et un bref bain de foule pour Jenny Hollingworth, qui ira jusqu’à se coucher sur le sol de la fosse du Café de la Danse – on n’aurait pas osé – Let’s Eat Grandma cultive sa bizarrerie et cet aura mystique qui rend le duo si singulier. Une prestation qui confirme que leur pop alternative est taillée pour le live.

Notre dernier détour se fera au Badaboum où une foule compacte attend le rappeur londonien Jimothy Lacoste. On se fraye difficilement un chemin pour apercevoir la scène, surprenant compte tenu des fosses éparses que l’on avait pu apercevoir jusqu’à présent. Lorsque le MC et son DJ surgissent sur scène, la salle est bouillonnante. Si on est dubitatif quand aux paroles, pour vous donner une idée, son répertoire passe de morceaux comme DRUGS à I Can Speak Spannish, le flow est chill, accrocheur et les beats sont à la mode pop DIY. « C’est la troisième fois que je viens ici ! » s’exclame Jimothy devant un public de fans très réceptif. Certes, certains quitteront la salle avant la fin, perplexe devant l’engouement. Mais le ton décalé et l’aisance décomplexée du MC à se jouer des codes du milieu du rap et de la masculinité assumée de ses pairs, réussi à nous convaincre. Vous savez les trucs complètement décalés mais si assumés qu’ils en deviennent géniaux ? Vous avez la vibe.

L’Avant-Garde tient pour l’instant ses promesses et le cru 2018 est très prometteur. On se retrouve demain pour une seconde soirée de concerts.

La galerie de photos complète est disponible ici.

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